On aime bien les comédies sportives comme Good Luck Algeria, qu’on vient de rattraper en ligne avant qu’il ne disparaisse demain du catalogue de la plateforme de vidéo par abonnement OCS. Le sport y a une importance au moins aussi grande que le lien social, le premier ne pouvant réussir sans le deuxième et inversement. En même temps, malgré le côté sentimental indéniable du film que le réalisateur Farid Bentoumi a tiré de l’exploit incroyable de son frère Noureddine, le ton y demeure infiniment plus sobre que dans des histoires équivalentes, adaptées sans la moindre retenue par le cinéma hollywoodien. Dans ce contexte, on pense évidemment à Rasta Rockett de Jon Turteltaub, l’exemple typique de l’épreuve sportive qui se voit aseptisée par le filtre des bons sentiments, jusqu’à devenir parfaitement méconnaissable. Pareil sort a heureusement été épargné à ce premier long-métrage plutôt prometteur.
C’est que, au delà de l’effort physique fourni par le personnage principal, celui-ci, ainsi que son entourage, accumulent en un rien de temps un capital de sympathie difficile à ignorer. Les quelques poncifs du scénario ne pèsent alors pas lourds, face à la sincérité désarmante avec laquelle Sami Bouajila et Franck Gastambide abordent l’immense majorité de leurs rôles. Ici, ils se voient certes affublés d’une forme d’idéalisme un peu trop exempt, à notre goût, de quelque défaut que ce soit. En même temps, le fait de relever le défi, film après film, de dépasser les limitations manifestes du stéréotype de l’immigré maghrébin qui se veut plus français que les autochtones pour Bouajila et du meilleur ami, toujours présent quand il faut remonter le moral ou lancer une vanne pour Gastambide, fait partie des raisons pour lesquelles on aime voir sans modération ces acteurs sur nos grands et – le temps du confinement – nos plus petits écrans. Seule la pauvre Chiara Mastroianni ne s’en sort pas tellement avec les honneurs au fil d’une intrigue, qui ne lui réserve que l’emploi bien ingrat de l’épouse de moins en moins réticente à soutenir son homme dans son projet fou.
Or, la folie n’est pas vraiment le maître-mot ni formel, ni narratif de Good Luck Algeria. Il s’agit davantage d’un film qui fait preuve d’une efficacité presque trop expéditive, sa durée relativement courte de moins d’une heure et demie ne lui permettant guère de développer convenablement tous les volets de son histoire inspirante. Tiraillé entre ses responsabilités de chef de famille, de chef d’entreprise et d’athlète amateur qui tente désespérément de rivaliser avec les pros, alors qu’il est déjà au beau milieu de la quarantaine, le protagoniste court un peu partout, sans savoir sur qui ou sur quoi s’appuyer pour mener à bien ses objectifs en apparence contradictoires. La dynamique traditionnelle du film sportif ne s’y applique par conséquent que jusqu’à un certain point, puisque la suprématie de la victoire ne devient jamais tout à fait la valeur reine par rapport à laquelle pourrait être mesuré le taux de réussite des personnages dans leur globalité.
L’enchaînement des passages obligés, entre la difficulté de se montrer à la hauteur en termes sportifs et le retour aux sources en Algérie, qui peine à se solder par un apaisement des tensions à la fois entre cultures et générations, confère ainsi une structure presque bancale au film. Rien de trop préjudiciable non plus, rassurez-vous, puisque le spectacle édifiant est préservé à chaque instant sans excès notable. Il n’en demeure pas moins vrai qu’on aurait préféré une mise en scène un peu plus aventureuse, un peu plus prompte à sortir des pistes de ski de fond tout tracées. En son absence, il faudra se contenter d’un film en tous points respectable, soit, mais qui manque un peu trop de clarté dramatique en raison de son penchant pour l’éparpillement scénaristique.