Thelma et Louise
USA : 1991
Titre original : Thelma and Louise
Réalisateur : Ridley Scott
Scénario : Callie Khouri
Acteurs : Susan Sarandon, Geena Davis, Harvey Keitel
Distribution : Europe Image
Durée : 2h09
Genre : Aventure, Drame
Date de sortie : 29 mai 1991
Réalisation : [rating:4.0]
Scénario : [rating:5.0]
Acteurs : [rating:5.0]
Musique : [rating:4.5]
Globale : [rating:5.0]
[five-star-rating]
Thelma et Louise fête cette année ses 20 ans ! Une occasion en or pour revenir sur ce film qui marqua une génération ! Créant la controverse dès le départ puisque les financements furent compliqués à trouver, ce film s’affiche comme culte pour le mouvement féministe, à tort ou à raison, et si Callie Kouri ayant reçu l’Oscar du meilleur scénario avaient eu autre chose à dire ?
Synopsis : Deux amies, Thelma et Louise, frustrées par une existence monotone l’une avec son mari, l’autre avec son petit ami, décident de s’offrir un week-end sur les routes magnifiques de l’Arkansas. Premier arrêt, premier saloon, premiers ennuis et tout bascule. Un évènement tragique va changer définitivement le cours de leurs vies.
Un portrait de femmes
On pourrait croire dès le début du film que tout oppose Thelma et Louise mais finalement on se rend vite compte que ces deux femmes sont assez semblables. Il paraît évident que Louise, interprétée par Susan Sarandon, cache un passé douloureux qu’elle n’arrive cependant pas à abandonner. D’ailleurs, ces suspicions sont confirmées lorsqu’elle prend la décision de tuer Arlan, celui qui a frappé et tenté de violer Thelma. L’histoire pourrait s’arrêter là puisqu’elle le menace d’une arme, il n’y a donc plus de raison de recourir à la mort. Cette femme en apparence libre, libre dans sa sexualité, dans ses choix, est en fait prisonnière d’un passé dont elle refusera toujours de parler. Thelma, jouée par Gena Davis, est quant à elle complètement dévouée à son mari, Daryl, devant subir au jour le jour toutes ses crises d’autoritarisme. Ce qui marque néanmoins c’est que la plupart des décisions prises lui sont dévolues : aller au bar, s’amuser, prendre de l’alcool puis plus tard braquer un commerce.
Ce qui interpelle le spectateur c’est l’évolution que connaissent les personnages. Thelma, à mesure que les décisions sont prises, s’affranchit de la tutelle de Daryl, mais aussi de la société, des convenances, des obligations. Elle qui n’a jamais vécu que pour le plaisir de son mari, rencontré à l’âge de 14 ans, découvre les joies de la liberté, les plaisirs de la sexualité. Elle s’affirme et prend en main son destin. Rappelons que c’est elle à la fin qui décide du dénouement. Louise est sans doute le personnage le plus mystérieux du film. On sait d’elle qu’elle cache quelque chose, qu’elle n’a pas réalisé ses rêves, qu’elle n’est pas complètement heureuse avec son compagnon. En même temps qu’elle condamne la soumission de Thelma elle n’hésite pas à la blâmer très sévèrement. Dès le départ, par son accoutrement et par son attitude, elle symbolise le dominant, celui qui prend les décisions, qui exécute les actions, mais en même temps elle est aussi extrêmement féminine, ou plutôt pleine d’émotions, comme le montre ses adieux avec Jimmy ou encore la scène finale. C’est elle la tueuse, donc celle qui accomplit l’élément déclencheur de l’intrigue, mais elle laisse Thelma prendre les décisions majeures. On a donc un duo de femme très convaincant et qui s’équilibre. L’alchimie entre les deux actrices participe à la sincérité du film.
Un portrait d’hommes
Résolument, les hommes du film sont tous, sauf exceptions, des êtres mauvais. Pour commencer, il y a Daryl, joué par Christopher Mcdonald, qu’on ne peut que détester tant ses défauts sont exécrables. Il se montre tyrannique, autoritaire, et ne s’empêche pas de rabaisser à longueur de temps Thelma. Il se conduit comme un père avec elle, ce qu’elle finit par lui reprocher plus tard. Il est donc son père mais aussi quelque part son fils, il est extrêmement capricieux et lâche. Il voue un culte à son apparence, ce qui est également le cas pour le policier retrouvé emprisonné dans le coffre de sa voiture. Celui-ci est aussi un tyran à sa façon, il joue de son insigne puis ensuite se montre lâche et n’a rien de virile du tout quand il supplie les deux amies en pleure de le laisser en vie. L’agresseur bien évidemment qui frappe et tente de violer Thelma : jusqu’au dernier moment il bafoue ces femmes dans sa vulgarité, il est aveuglé par ses pulsions et par sa sensation de supériorité.
Ensuite, dans une moindre mesure il y a Jimmy, interprété par Michael Madson, qui d’un côté n’hésite pas à se déplacer pour apporter l’argent nécessaire à la fugue des deux jeunes femmes, et qui se montre très attentionné envers Louise, mais qui d’un autre côté, est dans un système de relation à l’autre sublimé dans la possessivité : c’est parce qu’il croit qu’il la perd qu’il se démène et la demande finalement en mariage. Pour finir, il participe aussi à la traque puisqu’il passe aux aveux alors qu’il avait promis le contraire. Dans le genre il y a aussi JD, rôle révélant Brad Pitt. Autostoppeur, braqueur en série, il fait découvrir à Thelma les plaisirs de son corps, il semble éprouver une réelle attirance pour elle et on peut dire que de ce point de vue il est le point de rupture pour Thelma. Néanmoins, ses vieux démons le rattrapent et il vole l’argent prêté par Jimmy puis, ensuite, donne aux policiers la destination de Thelma et Louise : le Mexique.
Le routier est un personnage central : il est celui qui ne respecte pas les femmes, qui est pervers et vulgaire mais semble en même temps si faible ! On le retrouve trois fois et l’attitude de Thelma et Louise évolue à chaque fois : passant d’un rejet complet à l’indifférence comme si elles étaient au-dessus de tout mais surtout de lui, pour finalement mettre en place une vengeance à la hauteur du mépris qu’il leurs inspire (une scène d’anthologie!).
Le seul personnage masculin ayant des valeurs est le policier, chargé de l’enquête, interprété par Harvel Kytel. Il personnifie la justice, ce qui est sans doute voulu puisque ces femmes, bafouées, sont en quête de justice par l’abandon de leur servitude et aussi par la volonté d’être elles, d’être libres ! C’est le seul a vraiment s’intéresser à ce qu’il s’est passé, qui veut jusqu’au dernier moment les sauver d’une fin tragique. Il incarne la compassion, l’intelligence et méprise Daryl ainsi que JD.
Quoi d’autre ?
On a donc un film hymne à la liberté et qui, en la pourchassant, montre que c’est la vie elle-même qui est remise en cause, d’où la scène finale que l’on peut qualifier de mythique. C’est aussi un film de femmes, fragiles et fortes à la fois. Le jeu des actrices est flamboyant, les personnages secondaires sont fouillés. Ce film transgresse les genres sexuels c’est pourquoi il est unique, les héroïnes deviennent de plus en plus masculines et adoptent des comportements d’homme, d’autant plus qu’elles partent métaphoriquement à la conquête de l’Ouest pendant que les hommes, eux, les attendent au foyer ! On mêle aisément scènes dramatiques et comiques. On est émerveillé, on rit, on a envie de pleurer et on se dit : quel panache! Chaque scène a son importance, a un but, même si certains regrettent quelques longueurs. La B.O est excellente et colle parfaitement au film. Certains ont vu une cause pour le féminisme, ce qui n’est pas faux, mais il serait réducteur de ne le penser que sous cet angle, c’est aussi un hymne à la possibilité des hommes de jouir de leur liberté, sans être sclérosés, étriqués, dans leurs convenances.
Résumé:
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