Les fauves
France : 2019
Titre original : –
Réalisation : Vincent Mariette
Scénario : Marie Amachoukeli-Barsacq, Vincent Mariette
Acteurs : Lily-Rose Depp, Laurent Lafitte, Camille Cottin
Éditeur : Diaphana
Durée : 1h20
Genre : Fantastique
Date de sortie cinéma : 23 janvier 2019
Date de sortie DVD : 2 juillet 2019
C’est l’été, dans un camping en Dordogne, des jeunes gens disparaissent. Les rumeurs les plus folles circulent, on parle d’une panthère qui rôde… Un sentiment de danger permanent au cœur duquel s’épanouit Laura, 17 ans. La rencontre avec Paul, un écrivain aussi attirant qu’inquiétant, la bouleverse. Une relation ambigüe se noue. Jusqu’à ce qu’un prétendant de Laura disparaisse à son tour et qu’une étrange policière entre dans la danse…
Le film
[4/5]
Découvert en 2014 avec la comédie Tristesse Club, Vincent Mariette change aujourd’hui radicalement de registre avec Les fauves, film fantastique sous perfusion de Jacques Tourneur, évoquant tout à la fois La féline (1942) et L’homme léopard (1943). Si on ne retrouve pas dans ce thriller l’humour à froid tendance absurde de son film précédent, le cinéaste fait en revanche à nouveau preuve d’un talent singulier quand il s’agit de développer une ambiance, une atmosphère étrange, aux confins du rêve et de la réalité, d’autant plus efficace que le spectateur ne sait jamais réellement si ce qu’il est en train de voir est réel ou s’il s’agit d’une projection de l’esprit de l’héroïne. Parce qu’en effet, à l’image des films de Tourneur que l’on vient d’évoquer, Les fauves pourra tout à la fois être vu comme un « simple » récit surnaturel ou comme un récit fantasmé de coming of age à la sauce psychanalytique. Qui sont « Les fauves » du titre ? Même quand arrive le générique de fin, il n’est pas certain que le spectateur puisse répondre avec certitude à cette question.
En revanche, ce qui est sûr, c’est que Vincent Mariette élargit de film en film la palette de ses talents, et que Les fauves, même s’il évolue dans un registre radicalement différent de Tristesse Club, s’avère sans doute encore plus fascinant et envoûtant dans son genre que le film de 2014. Parce que le film évolue dans un fantastique atmosphérique à la David Lynch, parce que Mariette a réellement le sens du bizarre, et parce que le rythme – lent – du film contribue vraiment à développer une impression de menace sourde flottant autour des personnages et de la base de loisirs dans laquelle se déroule l’intrigue.
Côté casting, Les fauves permet à Vincent Mariette de retrouver son complice Laurent Laffite, qui incarne ici un personnage aussi trouble que mystérieux. A ses côtés bien sûr, la révélation vient de Lily-Rose Depp (la fille bien sûr de Brad Pitt et Angelina Jolie), dont il s’agissait déjà du sixième long-métrage en tant qu’actrice – même si la tâche lui est probablement facilitée par la maestria déployée par Mariette côté mise en scène, elle semble à priori tout à fait apte à tenir un « premier rôle » et à endosser sur ses seules épaules la réussite d’un film – ce qu’elle fait déjà ici mine de rien, dans le sens où elle est omniprésente, au cœur de quasiment de tous les plans. Et vous serez probablement sidérés de sa ressemblance avec ses parents, Jay-Z et Beyoncé.
Le DVD
[4,5/5]
Le film n’ayant malheureusement réuni qu’un peu plus de 15.000 spectateurs dans les salles obscures, Les fauves ne verra finalement le jour que sur support DVD, sous la bannière de Diaphana. Côté galette, il n’y a en revanche pas le moindre doute : l’éditeur connaît le support sur le bout des doigts et maîtrise l’encodage de façon vraiment remarquable. Qu’il s’agisse de la définition, des couleurs ou de la gestion bruit vidéo, tous les écueils auxquels on pourrait s’attendre sont brillamment et soigneusement évités. Les (nombreuses) séquences nocturnes sont tout aussi admirablement gérées. Niveau image, on pourra sans trop de problèmes parler de sans faute, dans les limites d’un encodage en définition standard bien sûr – même si on reste convaincus que la photo et les compositions de plans proposées par Vincent Mariette et son chef opérateur Georges Lechaptois auraient clairement mérité un encodage en Haute-Définition. Coté son, le mixage Dolby Digital 5.1 fait le boulot de façon très immersive et spectaculaire, facilitant l’immersion au cœur du film par le recours systématique aux canaux arrière, créant un dynamisme de tous les instants. On notera également la présence d’un mixage stéréo en Dolby Digital 2.0, anecdotique si vous avez un « Home Cinema » mais probablement plus clair et équilibré si vous choisissez de visionner le DVD le plus simplement du monde sur votre téléviseur.
Coté suppléments, outre la traditionnelle bande-annonce du film, on trouvera un commentaire audio du réalisateur Vincent Mariette, qui reviendra avec une grande modestie sur ses influences (il cite à plusieurs reprises David Lynch et la troisième saison de Twin Peaks) ainsi que les subterfuges techniques qu’il a utilisé afin de toujours laisser planer le doute sur les événements se déroulant à l’écran. Mais ce n’est pas tout parce qu’on retrouvera avec plaisir deux courts-métrages du réalisateur, les très intéressants Double mixte (2011) et Les lézards (2012). Dans son esprit, et même formellement (cadre en Scope sur France curieusement désertée, travellings sur transats, obsession du tennis…), l’hilarant Double mixte s’avère très proche du film précédent de Vincent Mariette, Tristesse club. Même si l’on y retrouve Vincent Macaigne, Les lézards en est plus éloigné. Lorgnant du côté des courts-métrages à tendance absurde de Werner Herzog dans les années 60/70, hommages et clins d’yeux à l’appui (format et typographie 60’s, présence d’un iguane, musique issue d’Aguirre, la colère de Dieu), Les lézards est une comédie sentimentale moins froide, moins noire et mélancolique que ses autres films. Comme si l’utilisation du noir et blanc donnait finalement plus de chaleur à son cinéma… Différent et sympathique !