Test Blu-ray / DVD : Black Jack

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Black Jack

Royaume Uni : 1979
Titre original : –
Réalisation : Ken Loach
Scénario : Ken Loach d’après le roman de Leon Garfield
Acteurs : Stephen Hirst, Louise Cooper, Jean Franval
Éditeur : Rimini Éditions
Durée : 1h45 (DVD) 1h50 (BR)
Genre : Drame, aventure
Date de sortie en salles : 5 mars 1980
Date de sortie en combo DVD/BR : 20 avril 2021

En Angleterre, au XVIII siècle, Tolly, un jeune orphelin se retrouve pris en otage par un bandit de grand chemin, Black Jack. Le brigand kidnappe bientôt une fillette, Belle, et charge Tolly de la surveiller. Profitant de l’inattention de Black Jack, les deux enfants parviennent à s’échapper…

[4/5]

Dans l’Angleterre de 1750, à York, un condamné à mort est pendu en place publique. Il s’agit d’un marin français, un véritable colosse devenu meurtrier au cours d’une rixe et que, par facilité face à un nom imprononçable, on appelle Black Jack. Comme elle a l’habitude de le faire chaque fois qu’un corps n’est pas réclamé, dans le but de les revendre à des chirurgiens, Mrs Gorgandy, surnommée la veuve du gibet, a récupéré celui de Black Jack et elle a demandé à Tolly, un jeune apprenti, de le garder quelques minutes. Surprise ! Black Jack n’était pas vraiment mort et le voilà qui s’enfuit, entrainant Tolly avec lui. Leur route va rencontrer celle de Belle, une fillette de 12 ans que ses parents, la considérant comme folle et voulant préserver la réputation de leur famille alors que Kate, leur fille aînée, est fiancée à un Lord, viennent de mettre entre les mains du pasteur Parson Hall et du Docteur Jones afin qu’elle devienne invisible au sein d’un asile. Tolly et Belle vont trouver refuge chez une troupe de saltimbanques menée par le Dr. Carmody, un sympathique charlatan, et qui se déplace d’un village à l’autre, de foire en foire. Le Dr. Carmody ayant pris la décision de donner à Tolly le rôle d’assistant jusque là occupé par Hatch, ce dernier n’a de cesse de chercher à se venger tout en s’efforçant par tous les moyens de soutirer de l’argent aux uns et aux autres.

Adaptation cinématographique d’un roman pour la jeunesse écrit par Leon Garfield, Black Jack est un film qui fonctionne à plusieurs niveaux. En effet, les jeunes spectateurs y verront surtout un film d’aventure dans lequel deux jeunes adolescent.e.s arrivent difficilement à surmonter une série d’obstacles, le rôle de certains adultes étant de créer ces obstacles et le rôle d’autres adultes de les aider à les surmonter, alors que les cinéphiles plus âgés ne seront pas très surpris de retrouver plusieurs thèmes chers à Ken Loach dans ce qui est son seul film à costumes, dans une action se déroulant en 1750. Un de ces thèmes est celui de la folie et de l’arsenal pouvant être utilisé pour la traiter, thème principal de Family Life, tourné 8 ans auparavant. Certes, le cas de Belle est beaucoup plus léger que celui de Janice : ayant été victime d’une très forte fièvre à l’âge de 5 ans, Belle a survécu mais elle n’a plus reconnu ses parents et est tombée dans une alternance d’épisodes de grande mélancolie et d’épisodes de violences injustifiées. Un état considéré à juste titre comme anormal par ses parents mais qu’ils n’ont manifestement jamais cherché à améliorer en apportant attention et amour à la fillette, d’où ce choix, au bout du compte, de l’abandonner à l’enfermement, à l’enchaînement de la psychiatrie de l’époque. Et pourtant, le seul fait de trouver prévenance et écoute de la part de Tolly et de la troupe de saltimbanques va suffire à Belle pour retrouver la raison.

Si l’on prête bien attention à ce film de Ken Loach, il n’est pas difficile d’y trouver d’autres thèmes qui lui sont chers : les nuisances causées par l’appât du gain qu’on retrouve avec le personnage de Hatch, le jeune garçon sans scrupule et sans aucune valeur morale dont Tolly a pris  la place auprès du Dr. Carmody, l’absence de compassion dans certaines classes de la société, exposée par le comportement de Mr et Mme Carter qui ont choisi d’abandonner Belle dans le seul but que la réputation de la famille reste intacte, la générosité des plus humbles montrée par l’accueil fait à Tolly et Belle par la troupe des forains, l’humanisme du réalisateur avec la rédemption du personnage de Black Jack qui, grâce à Tolly, prend petit à petit conscience qu’il est possible de gagner sa vie sans avoir recours à la seule violence. Comme c’est toujours le cas chez Ken Loach, il y a dans Black Jack un souci constant d’authenticité, de crédibilité, par exemple dans le choix des couleurs, très ternes, des vêtements portés par les protagonistes, vêtements qui, au 18ème siècle, n’étaient que rarement changés et nettoyés. Ce souci d’authenticité a d’ailleurs poussé le réalisateur à se démarquer du roman en transposant l’action de Londres à York, la campagne autour de Londres étant devenue trop urbanisée, et s’est trouvé amplifié par la volonté de Ken Loach de ne pas adoucir le fort accent du Yorkshire chez les protagonistes. Pas d’inquiétude si vous croyez être très bon.ne en anglais et que les dialogues vous échappent, les critiques américains conseillent de faire appel au sous-titrage disponible sur les « galettes » locales pour arriver à comprendre ces dialogues. Stephen Hirst et Louise Cooper, les deux jeunes interprètes de Tolly et de Belle, font leurs débuts au cinéma dans Black Jack et ils font preuve de beaucoup de fraicheur. Quant au personnage de Black Jack, il est, contrairement au roman, supposé être français et, à ce titre, il est interprété par Jean Franval, un comédien français.

Lorsque Ken Loach réalise Black Jack, il n’a pas tourné de long métrage de fiction au cinéma depuis 8 ans, son activité se limitant à des productions pour la télévision. C’est peut-être une des raisons qui fait que le budget obtenu pour Black Jack est incomparablement plus faible que celui obtenu par Stanley Kubrick pour Barry Lyndon, autre film britannique, sorti 5 ans plus tard, dont l’action se déroule également au 18ème siècle : 500 000 livres d’un côté, 11 millions de dollars de l’autre. Alors que, dans ces deux films, de nombreuses scènes se déroulent dans un environnement éclairé par une bougie, il faut reconnaître que, malgré la présence de Chris Menges comme directeur de la photographie, cette différence de moyens suffit sans doute à expliquer que les images de Black Jack n’ont pas l’exceptionnelle beauté de celles de Barry Lyndon. Par contre, on est en droit de préférer l’humanisme et la chaleur humaine que dégage le film de Ken Loach à la froideur et à la lenteur souvent ennuyeuse du film de Kubrick.

Le DVD et le BR

[4/5]

C’est une fois de plus sous la forme d’un combo DVD/BR que Rimini Editions propose ce film peu connu de Ken Loach, jusqu’ici inédit en France, tant en Blu-ray qu’en DVD. Film tourné en 35 mm pour les scènes d’intérieur, avec, presque toujours, un éclairage très faible, et en 16 mm pour les scènes d’extérieur, il ne faut pas s’attendre à une image d’une exceptionnelle beauté. Il y a du grain et c’est normal, c’était même un souhait du réalisateur. On se contentera de remarquer que l’image du Blu-ray, avec la définition vidéo 1080i, est plus « propre » que celle du DVD, surtout dans les scènes d’intérieur, souvent confuses sur le DVD. Le son mono, d’une qualité correcte, est disponible en VF et en VO sous-titrée, Dolby Digital 2.0 pour le DVD, DTS-HD Master Audio 2.0 pour le Blu-ray.

Deux suppléments sont proposés, tant sur le DVD que sur le Blu-ray. Le premier est une interview d’une durée de 21 minutes d’Agnès Blandeau, Maître de Conférences en Anglais à l’Université de Nantes : tout ce que vous avez voulu savoir sur Black Jack sans avoir osé le demander ! Le second, d’une durée de 11 minutes, consiste en une interview de Ken Loach et de Jean Franval, réalisée au moment de la sortie du film, le 16 mars 1980, par Sélim Sasson, le Monsieur Cinéma de la télévision belge francophone.

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