Annie Colère
France : 2022
Titre original : –
Réalisation : Blandine Lenoir
Scénario : Blandine Lenoir, Axelle Ropert
Acteurs : Laure Calamy, Zita Hanrot, India Hair
Éditeur : Diaphana
Durée : 1h56
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie cinéma : 30 novembre 2022
Date de sortie DVD/BR : 4 avril 2023
Février 1974. Parce qu’elle se retrouve enceinte accidentellement, Annie, ouvrière et mère de deux enfants, rencontre le MLAC – Mouvement pour la Liberté de l’Avortement et de la Contraception qui pratique les avortements illégaux aux yeux de tous. Accueillie par ce mouvement unique, fondé sur l’aide concrète aux femmes et le partage des savoirs, elle va trouver dans la bataille pour l’adoption de la loi sur l’avortement un nouveau sens à sa vie…
Le film
[4/5]
« Certains combats valent la peine d’être menés sur la durée. Puisque la liberté, ce bien si précieux, court en permanence le risque de se voir sapée par des forces obscurantistes de tous bords, un film comme Annie Colère est plus que jamais urgent, utile et nécessaire ! La croisade que la réalisatrice Blandine Lenoir y conduit a beau être celle des femmes, les victimes exclusives de pratiques sauvages d’interruption de grossesse jusqu’à la légalisation de l’avortement en France au milieu des années 1970, son troisième long-métrage est si généreux et bienveillant qu’il pourrait presque servir d’exemple universel au film idéal sur le militantisme. Tandis que l’adversaire des personnages, poussés à bout par leur situation personnelle inextricable, reste essentiellement hors cadre, en guise de chape de plomb de la position dominante des hommes au sein des civilisations patriarcales, la riposte féministe s’organise d’une manière impressionnante.
Or, autour d’un sujet de société pour le moins délicat, voire potentiellement clivant, ce très beau pamphlet cinématographique ne fait guère preuve de zèle tendancieux. A partir du constat que ces femmes dans le pétrin allaient avorter de toute façon, quitte à y laisser leur vie, l’intrigue suit sans le moindre préjugé le parcours sobrement exemplaire d’une mère qui fait rapidement carrière dans son mouvement contre le caractère clandestin de ces pratiques. Sauf que l’investissement d’Annie relève avant tout de l’engagement social. Son chemin ne la mènera donc pas sur les barricades, mais sur les bancs de l’école, histoire de rattraper toutes les opportunités que sa condition modeste de travailleuse lui avait fait louper auparavant.
Avant d’en arriver là, elle devient le témoin privilégié d’un soulèvement de femmes indignées, que le gouvernement ne pourra plus ignorer longtemps. Toute la qualité du film consiste alors à faire largement abstraction de la parole politique pour, au contraire, rester au plus près du quotidien doucement valorisant de ces combattantes de l’ombre.
Une fois que le parti pris en faveur de l’égalité des droits des femmes est évident, Annie Colère avance comme sur des rails vers sa destination galvanisante. Contrairement à un hypothétique pendant américain – peut-être encore plus indispensable de nos jours là-bas, alors que le droit à l’avortement y est sérieusement mis en péril –, le film de Blandine Lenoir évite toute emphase héroïque pour rendre compte du valeureux combat de ces femmes des années ’70. La figure centrale en est certes Annie, un rôle d’une finesse et d’une sincérité comme seule Laure Calamy peut les dégager en toute modestie, elle s’inscrit sans relâche dans un effort de groupe qui ne pourra porter ses fruits que collectivement. »
Extrait de la critique de notre rédacteur Tobias Dunschen. Découvrez-en l’intégralité en cliquant sur ce lien !
« C’est à la suite d’un gros de travail de préparation que Blandine Lenoir s’est lancée dans la réalisation d’Annie Colère. C’est ainsi qu’elle a rencontré Lucile Ruault, une jeune chercheuse qui venait de finir une thèse de 800 pages sur le MLAC, fruit de 5 années de rencontres avec des médecins et des militant.e.s du mouvement. Cette thèse a servi de premier matériau pour l’écriture du scénario, auquel sont venus s’ajouter deux documentaires particulièrement riches, Histoires d’A de Charles Belmont et Marielle Issartel et Regarde, elle a les yeux grands ouverts de Yann Le Masson. (…)
Il n’est pas franchement étonnant de voir surtout des comédiennes à l’affiche de Annie Colère. Depuis plusieurs mois, on voit beaucoup Laure Calamy sur les écrans mais son interprétation de Annie est peut-être ce qu’elle a fait de plus fort depuis le début de sa carrière. Une carrière qui l’avait déjà amenée à travailler avec Blandine Lenoir puisqu’elle était présente sur les deux premiers long-métrages de la réalisatrice, Zouzou et Aurore. A ses côtés, on retrouve Zita Hanrot, India Hair et Rosemary Standley. Cette dernière, bien connue en tant que chanteuse au sein du groupe Moriarty et par ses prestations en solo ou avec Dom La Nena, fait dans le rôle de Monique de très bons débuts devant la caméra.
Annie Colère est le premier film de fiction consacré au MLAC à sortir au cinéma. Quand on voit qu’un peu partout dans le monde, les droits des femmes sont en recul et, en particulier, ce droit à l’avortement qui fut si difficile à obtenir, on se dit qu’un tel film est forcément utile. Mais il n’est pas qu’utile, il est aussi bien mis en scène, bien interprété et passionnant à regarder. »
Extrait de la critique de notre rédacteur Jean-Jacques Corrio. Découvrez-en l’intégralité en cliquant sur ce lien !
Le DVD
[4/5]
Disponible en DVD sous les couleurs de Diaphana, Annie Colère s’offre une galette sobre et efficace, allant à l’essentiel, en composant de façon adroite avec les limites d’un encodage en définition standard. Comme à son habitude, l’éditeur français nous propose un master propre et stable, l’image est lumineuse, le piqué assez précis et les couleurs vives et parfaitement saturées : c’est parfait. Côté son, l’éditeur nous propose de découvrir le film dans un mixage Dolby Digital 5.1, le tout s’avérant dynamique, immersif et parfois bien punchy. On notera par ailleurs que Diaphana n’oublie pas les cinéphiles qui visionnent leurs films à domicile sans utiliser de système de spatialisation sonore : l’éditeur nous propose également un mixage Dolby Digital 2.0 qui s’avérera probablement plus cohérent si vous visionnez Annie Colère sur un « simple » téléviseur.
Du côté des suppléments, on trouvera tout d’abord un commentaire audio de Blandine Lenoir et Lucile Ruault, conseillère historique sur le film. On continuera ensuite avec une large sélection de scènes coupées (15 minutes), qui seront complétées par un entretien avec la réalisatrice Blandine Lenoir, accompagnée de deux anciennes militantes du MLAC, Irène Jouannet et Brigitte Daudu (14 minutes). Très intéressant !