Test Blu-ray : Une vie

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Une vie

Royaume-Uni : 2023
Titre original : One Life
Réalisation : James Hawes
Scénario : Lucinda Coxon, Nick Drake
Acteurs : Anthony Hopkins, Johnny Flynn, Lena Olin
Éditeur : M6 Vidéo
Durée : 1h48
Genre : Drame, Biopic
Date de sortie cinéma : 21 février 2024
Date de sortie DVD/BR : 26 juin 2024

Prague, 1938. Alors que la ville est sur le point de tomber aux mains des nazis, un banquier londonien va tout mettre en oeuvre pour sauver des centaines d’enfants promis à une mort certaine dans les camps de concentration. Au péril de sa vie, Nicholas Winton va organiser des convois vers l’Angleterre, où 669 enfants juifs trouveront refuge. Cette histoire vraie, restée méconnue pendant des décennies, est dévoilée au monde entier lorsqu’en 1988, une émission britannique invite Nicholas à témoigner. Celui-ci ne se doute pas que dans le public se trouvent les enfants – désormais adultes – qui ont survécu grâce à lui…

Le film

[3/5]

« Il y a trente ans, grâce à La Liste de Schindler de Steven Spielberg, le monde prenait connaissance d’un destin hors du commun. Celui d’un homme qui avait réussi à sauver d’innombrables hommes, femmes et enfants, alors que la plupart de ses compatriotes avaient préféré suivre la folie idéologique d’Adolf Hitler ou se taire. Une goutte d’eau dans l’océan de la barbarie nazie, certes, mais un combat de héros solitaire qui avait alors ému des dizaines de millions de spectateurs à travers la planète.

A peine cinq ans plus tôt, l’histoire d’un autre résistant dans le cœur et les actes avait refait surface à la télévision britannique. Cette fois-là, il s’agissait d’un citoyen anglais, tellement consterné par ce qui se passait sur le continent pendant les dernières semaines avant l’éclatement de la Seconde Guerre mondiale, qu’il avait tenté l’impossible : sauver autant d’enfants de réfugiés que logistiquement possible, avant que l’étau de l’invasion allemande en Tchécoslovaquie ne se resserre autour d’eux.

Une vie raconte cette aventure incroyable d’une façon agréablement sobre. La mise en scène de James Hawes a beau insister sur l’aspect émotionnel de cette opération de secours en temps de guerre, elle sait aussi rester fidèle au tempérament de son personnage principal. Car avant d’être célébré tardivement comme un héros national, Nicholas Winton se définissait comme un homme ordinaire, hanté par l’aveu de son impuissance de ne pas avoir pu mener l’évacuation des enfants tchèques jusqu’au bout. (…)

Pour la bonne cause

Quel peut bien être l’enjeu d’un film comme Une vie, qui conte en des termes hagiographiques l’exploit d’une personne a priori inconnue des manuels d’Histoire ? De mettre enfin cet homme, si peu enclin à faire sa propre promotion, sous les feux des projecteurs ? Ou bien, d’établir des parallèles plus ou moins directs avec notre monde d’aujourd’hui, dans lequel des millions de réfugiés frappent à la porte d’une Europe de plus en plus fortifiée et qui risque de tanguer dangereusement à l’extrême droite lors des prochaines échéances électorales ?

Sans doute, il y a un peu de tout cela dans la démarche de James Hawes, un habitué de la télévision anglaise depuis trente ans, qui fait enfin le saut sur le grand écran avec son premier long-métrage de cinéma. (…) Visiblement, cette recette de la mise en abîme, par ailleurs dépourvue des dispositifs de l’horreur à l’état pur qui avaient rendu le film de Spielberg si éprouvant, a porté ses fruits, Une vie réunissant près de deux millions de spectateurs en France, au bout de deux mois depuis sa sortie en février. Un plébiscite d’autant plus mérité que l’emphase de la narration s’y résume à la musique de Volker Bertelmann, fraîchement oscarisé l’année dernière pour un film de guerre au ton infiniment plus cru, A l’ouest rien de nouveau de Edward Berger.

En effet, le sentiment d’urgence naît ici surtout de la course contre la montre du côté de l’histoire tchèque, le récit cadre demeurant joliment figé dans une posture d’introspection personnelle et de déblayage matériel. Le va-et-vient entre les deux est rarement opportuniste et encore moins accompagné d’effets de narration clinquants. Plutôt s’emploie-t-il à asseoir la philosophie de vie du protagoniste : faire de son mieux à un moment donné, au lieu de se morfondre en réflexions stériles sur le pourquoi du comment et toutes les raisons qui devraient pousser à la lâcheté de l’inaction.

Jamais assez

Bref, Une vie est un film de qualité. Une qualité qui se mesure autant dans le respect qu’il accorde à tous les personnages, sans exception, qu’à l’absence d’un quelconque antagoniste clairement identifié. Nul besoin d’un manichéisme caricatural pour faire comprendre que la situation intenable des enfants dans les camps de réfugiés se transformera très prochainement en quelque chose de proprement létale. Et c’est peut-être justement cette menace sans visage qui la rend d’autant plus inquiétante et insaisissable. A l’image de l’incertitude du héros sur ses vieux jours, qui ignore comment se séparer convenablement de son trésor d’archives. Ce dernier retrace avec une précision de comptable tout ce que Nicholas avait réussi à faire autrefois, sans pour autant occulter les zones d’ombres d’un combat à première vue perdu d’avance.

Ce qui soulève une question probablement encore plus essentielle que celle des vénérables sursauts de courage dont l’humanité a invariablement besoin dans ses heures les plus sombres : comment faire pour faire perdurer cet héritage altruiste, sans qu’il ne prenne de la poussière sur les étagères d’une bibliothèque, mais sans qu’il ne devienne un spectacle de foire non plus ? (…)

Conclusion

Comparer Une vie à La Liste de Schindler ne rend justice ni à l’un, ni à l’autre. Sur un sujet tout de même proche, la maestria assommante de Spielberg dans le film de 1993 est remplacée dans le cas présent par un raisonnement à distance. Car dans le film de James Hawes, ce qui importe au moins autant que la mise en place laborieuse des convois par train des jeunes réfugiés accueillis au Royaume-Uni, c’est le regard que notre société porte rétrospectivement sur un tel acte de bravoure, passé inaperçu au moment des événements tragiques de la guerre. Sur le visage grave et pensif de Anthony Hopkins, cette quête impossible de la conclusion d’un chapitre douloureux de son histoire intime et de notre mémoire collective à tous se lit avec une douceur intense, à laquelle il est impossible de se soustraire. »

Extrait de la critique de notre chroniqueur Tobias Dunschen. Découvrez-en l’intégralité en cliquant sur ce lien !

Le Blu-ray

[4/5]

Comme c’est quasiment toujours le cas avec les galettes Haute Définition éditées par M6 Vidéo, le Blu-ray d’Une vie se révélera rapidement assez superbe. Restituant parfaitement la patine visuelle et la jolie photo du film signée Zac Nicholson, le master affiche une forme insolente, le niveau de détail est d’une précision à couper le souffle. Tout au long du film, le transfert s’avérera de toute beauté, proposant un piqué précis, accompagné de textures et de couleurs vraiment saisissants. Les noirs sont profonds, l’encodage ne nous réserve quasiment aucune mauvaise surprise, bref c’est une galette HD très soignée. Côté son, VF et VO nous sont proposées en DTS-HD Master Audio 5.1 : dans les deux cas, le mixage est solide et assure une immersion parfaite, sans la moindre fausse note, même si bien entendu le film de James Hawes n’appelle pas non plus à la démonstration de gros son.

Dans la section suppléments, on trouvera une série d’entretiens avec Anthony Hopkins et Helena Bonham Carter (18 minutes), proposés dans un montage brut de décoffrage uniquement entrecoupé de cartons nous indiquant de quoi tel ou tel intervenant est en train de parler. Les deux acteurs y reviendront sur le film et la personnalité de Nicholas Winton. En réalité, ces entretiens réalisés par la production sont destinés à être découpés et montés de façon à produire des featurettes de bonus pour la promo du film sur le Net ou pour la sortie vidéo, mais M6 Vidéo prend le parti de nous les balancer tels quels, sans avoir préalablement pris le soin de les mettre en forme. On terminera ensuite avec une poignée de témoignages d’anciens réfugiés (12 minutes) qui réagiront à la projection du film.

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