The Fisher King
États-Unis : 1991
Titre original : –
Réalisation : Terry Gilliam
Scénario : Richard LaGravenese
Acteurs : Jeff Bridges, Robin Williams, Mercedes Ruehl
Éditeur : Wild Side Vidéo
Durée : 2h17
Genre : Fantastique, Drame
Date de sortie cinéma : 2 octobre 1991
Date de sortie DVD/BR : 20 octobre 2021
Jack Lucas anime à New York une émission de radio agressive, suivie par un grand nombre d’auditeurs, parmi lesquels un certain nombre de détraqués. L’un d’eux, Edwin Malnick, prenant au mot une diatribe de Jack contre les « yuppies », s’arme d’une carabine et abat plusieurs clients d’un bar chic, dont l’épouse d’un jeune professeur, Henry Sagan. Bourré de remords, Jack abandonne son émission et sombre dans l’alcoolisme…
Le film
[4/5]
The Fisher King, autrefois sorti en France sous le titre Fisher King – Le roi pêcheur, a incontestablement marqué le début d’une nouvelle ère pour le réalisateur Terry Gilliam. A l’époque, l’ex-membre de la bande des Monty Python était déjà assurément considéré comme un cinéaste de génie, notamment par la poignée d’élus ayant pu découvrir Brazil (1985) dans son montage original, mais son aura demeurait encore relativement confidentielle.
The Fisher King marqua une vraie rupture dans son œuvre, déjà parce qu’il s’agissait du premier film de son auteur qu’il n’avait pas écrit lui-même. Le scénario est en effet signé Richard LaGravenese, qui écrirait par la suite les scénarios de La Petite princesse (1995), Sur la route de Madison (1995) ou, plus récemment, Invincible (2014). Pour autant, pour les cinéphiles les plus familiers avec l’œuvre de Terry Gilliam, on ne pourra s’empêcher de voir dans The Fisher King des points communs avec ses films précédents. On pense bien sûr au Graal et aux légendes Arthuriennes, au centre de son œuvre depuis ses débuts avec les Monty Python, mais également à la façon dont le personnage incarné par Robin Williams se plonge totalement dans un monde imaginaire, trouvant par là même un moyen d’échapper à la réalité, à son individualisme forcené, à sa bureaucratie.
The Fisher King marqua également une rupture dans la carrière de Terry Gilliam dans le sens où il lui permit enfin de se faire un « nom ». En effet, il s’agit du premier film pour lequel il fut quasi-unanimement reconnu de par le monde, non seulement par le public (692.000 entrées en France, 43 millions de dollars de recettes aux Etats-Unis), mais aussi et surtout par ses pairs : The Fisher King lui permit d’obtenir le Lion d’argent du meilleur réalisateur à la Mostra de Venise, et obtint cinq nominations aux Oscars en 1992. Ainsi, et même s’il ne remporta finalement qu’un seul oscar (celui de la meilleure actrice dans un second rôle pour Mercedes Ruehl), ce conte initiatique fut le synonyme pour Terry Gilliam d’une vraie reconnaissance en tant que cinéaste.
Trente ans après, que reste-il de The Fisher King ? Avec le recul, et au regard du reste de la filmographie de Terry Gilliam, The Fisher King nous donnerait finalement presque l’impression d’être un « petit » film, plus intimiste, plus psychologique et moins riche en effets spéciaux. Pour autant, comme les autres films du cinéaste, The Fisher King jette le spectateur au centre d’un monde baroque et foisonnant, grouillant littéralement d’activité, et rempli jusqu’à la gueule de détails saugrenus, étranges, qui forment au final un « tout » remarquablement cohérent, ayant la particularité notable de fustiger le matérialisme et le conformisme qui régissent la société contemporaine.
Nous proposant une quête du Graal décalée dans le New York miteux du début des années 90, The Fisher King n’a pas pris une ride, et s’avère, malgré un manque de rythme certain (qui, du plus loin qu’on s’en rappelle, a toujours été le principal défaut du film), une belle réussite, portée par les performances brillantes et dynamiques de Jeff Bridges et Robin Williams. Tous deux sont parfaits, et même absolument bouleversants dans la peau de ces paumés finissant par trouver leur rédemption en se « guérissant » l’un l’autre. A leurs côté, les deux personnages féminins n’apportent pas grand-chose au récit d’un point de vue dramatique, mais l’interprétation de Mercedes Ruehl et Amanda Plummer parvient néanmoins à les rendre toutes deux attachantes.
Expérience baroque illuminée de véritables moments de grâce poétique (on pense évidemment à la danse dans la gare de Grand Central), The Fisher King permet à Terry Gilliam de transporter le spectateur au cœur d’un univers où la fantaisie et la réalité se chevauchent constamment. Le film est par ailleurs sublimé par la photographie de Roger Pratt, qui transforme à de nombreuses reprises New York en une espèce de royaume gothique dans lequel le fait de croiser tout à la fois des chevaliers et des taxis jaunes semble finalement tout à fait normal. Un beau morceau de cinéma !
Le Blu-ray
[4,5/5]
Si le rythme de ses sorties Blu-ray / DVD a considérablement ralenti ces cinq dernières années, Wild Side Vidéo reste un éditeur ayant su conserver une place de tout premier ordre dans le cœur des cinéphiles français. S’étant fait une spécialité dans l’édition de grands classiques du cinéma international s’imposant comme de véritables références en terme de qualité de transfert et de suppléments, Wild Side fait à nouveau très fort ce mois-ci avec The Fisher King, le film de Terry Gilliam étant très attendu par les fans français de l’ex-Monty Python, d’autant que le master est tiré d’une restauration 2K tout simplement somptueuse.
Comme d’habitude, The Fisher King s’affiche donc dans une superbe édition collector au design soigné et à la finition maniaque, prenant la forme d’un Digibook contenant le Blu-ray du film ainsi que le DVD et un livret inédit de 50 pages intégré au boitier, le tout reprenant la présentation des précédents films de la collection.
Côté image, Wild Side Vidéo nous propose donc une copie de toute beauté, respectueuse du grain d’origine, avec un beau piqué et des couleurs qui en envoient plein les mirettes – la restauration a fait place nette des poussières et autres points blancs, et le résultat s’avère même au-delà de nos espérances les plus folles. Côté son, la VO est proposée en DTS-HD Master Audio 5.1 ; le rendu est très enveloppant, avec une excellente spatialisation d’ambiance et des effets acoustiques surprenants, notamment lors des scènes mettant en scène le « chevalier rouge ». Le mixage de la VF, proposé en DTS-HD Master Audio 2.0, est également parfaitement clair, net et sans bavures – on vous conseillera cela dit de découvrir le film en version originale, cette version étant plus convaincante d’un point de vue artistique.
Du côté des suppléments, et outre le livret inédit de 50 pages rédigé par Frédéric Albert Levy, on trouvera tout d’abord un intéressant entretien entre Terry Gilliam et Albert Dupontel (35 minutes). Si le sujet est relativement décevant du point de vue de la forme (il est réalisé en vidéoconférence), les différents sujets échangés par les deux cinéastes demeurent assez passionnants, et permettent de dresser un intéressant making of rétrospectif concernant la production de The Fisher King. On continuera ensuite avec un entretien avec Robin Williams (14 minutes), enregistré en 2006. Ce dernier y évoquera ses souvenirs du film, ses scènes préférées, la représentation de la ville de New York, ainsi que son travail avec Terry Gilliam et la « stagnation » de sa carrière de cinéaste à l’époque, à cause du manque d’implication et de la « frilosité » des producteurs américains. On terminera avec une poignée de featurettes superficielles mais informatives, consacrées aux costumes (4 minutes), aux maquillages (2 minutes), au Chevalier Rouge (2 minutes) ainsi qu’aux répétitions (2 minutes).