Sherlock Holmes attaque l’Orient-Express
États-Unis, Royaume-Uni : 1976
Titre original : The seven-per-cent solution
Réalisation : Herbert Ross
Scénario : Nicholas Meyer
Acteurs : Nicol Williamson, Robert Duvall, Alan Arkin
Éditeur : BQHL Éditions
Durée : 1h53
Genre : Aventures
Date de sortie cinéma : 16 avril 1980
Date de sortie DVD/BR : 28 janvier 2020
Sherlock Holmes traversant une terrible dépression, son frère Mycroft et le Dr Watson utilisent comme appât son meilleur ennemi, le professeur Moriarty, pour l’amener à consulter Sigmund Freud, à Vienne. Diagnostic au terme de l’exploration du subconscient du détective de Baker Street : des soins s’imposent pour le patient qui, déjà, se lance dans une nouvelle enquête, sur les traces d’une célèbre cantatrice qu’un sultan turc retiendrait dans l’Orient-Express. Pour la retrouver, l’aide du grand psychanalyste ne lui sera pas de trop…
Le film
[3/5]
Contre toute attente, Sherlock Holmes attaque l’Orient-Express n’est pas, comme son titre français le laisse pourtant entendre, une enquête traditionnelle du détective de Baker Street. Du moins pas à proprement parler en tous cas. Aussi, si vous vous attendez à suivre une enquête menée à grands coups de raisonnements imparables et de déductions logiques, vous en serez pour vos frais ; on peut d’ailleurs supposer que le film d’Herbert Ross risque fort de laisser plusieurs spectateurs sur le bas-côté tant il délivre une expérience éloignée de ce qu’on pouvait s’attendre à voir.
Derrière le scénario de Sherlock Holmes attaque l’Orient-Express, on trouvera donc Nicholas Meyer, dont le principal titre de gloire est d’avoir écrit et réalisé C’était demain (1979), film-culte de science-fiction qui mettait en scène la rencontre en H.G. Wells et Jack l’éventreur dans le San Francisco de la fin des années 1970. Sa façon d’aborder le mythe Sherlock Holmes est en fait très voisine, puisqu’il relate ici la rencontre entre le célèbre détective de fiction et… Sigmund Freud. Cette rencontre, il l’avait déjà imaginée au cœur de son roman « La solution à 7 % », premier d’une série d’ouvrages consacrés au personnage de Sherlock Holmes – Meyer signera d’ailleurs lui-même l’adaptation de son roman pour le grand écran.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’idée au cœur du film d’Herbert Ross est fascinante, mais si vous vous attendez, comme le suggère le titre français du film, à une enquête échevelée au cœur de l’Orient-Express, il faudra patienter jusqu’au dernier acte du film, la première heure et demie de métrage s’attachant plutôt à détailler la rencontre entre Holmes et Freud ainsi que la cure de désintoxication du détective. Si l’humour est bien présent, le film ne s’avère pas non plus forcément un adepte de la franche gaudriole ou du gros gag qui tache : l’étrange scénario de Nicholas Meyer s’attache surtout à décrire les personnages tirés de l’œuvre d’Arthur Conan Doyle et leurs interactions avec le père de la psychanalyse, en mettant en parallèle les méthodes d’enquête de Holmes et celles utilisées par Freud dans le domaine de l’inconscient. L’utilisation du personnage de Moriarty et des implications qu’il suggère est très intéressante, mais l’enquête en tant que telle n’occupera finalement dans le récit qu’une part négligeable, qui plus est très (trop) rapidement expédiée.
De fait, Sherlock Holmes attaque l’Orient-Express navigue entre les tonalités, plutôt sombre au début, puis un peu plus léger quand débute l’enquête sur l’enlèvement et la disparition de la cantatrice incarnée par Vanessa Redgrave. Il y a donc de quoi être surpris devant ce changement dans l’atmosphère du film, qui passe de la noirceur de la cure de désintox et de l’obsession morbide de Holmes pour Moriarty à une enquête d’une simplicité déconcertante, qui multipliera qui plus est les passages humoristiques, comme par exemple cette longue séquence au bordel, ayant la particularité notable de mettre en scène l’actrice française Régine en mère-maquerelle poussant la chansonnette. Au final, le film d’Herbert Ross s’avère donc une œuvre assez étonnante et assez unique dans son genre, trop noire et sérieuse pour être considérée comme une parodie, mais trop fantaisiste pour véritablement attirer les amateurs de mystères à la Sherlock Holmes.
Reste donc une ambiance étrange, évoluant en équilibre entre la noirceur et la fantaisie, et une série d’acteurs absolument brillants dans les rôles d’Holmes (Nicol Williamson), mais aussi et surtout de Watson (Robert Duvall), Freud (Alan Arkin) ou même Moriarty (Laurence Olivier). Une curiosité.
Le Blu-ray
[4/5]
On salue et on applaudit l’initiative de BQHL Éditions, qui nous permet aujourd’hui de (re)découvrir Sherlock Holmes attaque l’Orient-Express, curiosité oubliée qui devrait ravir les amoureux de l’œuvre de Sir Arthur Conan Doyle. Et côté Blu-ray, l’éditeur a fait du très beau boulot : le film est proposé au format, l’encodage est proposé en 1080p, et le master affiche une belle pêche, avec un grain cinéma conservé, doublé d’une définition et un piqué d’une très belle précision, fluctuant cela dit très légèrement, époque oblige, d’une séquence à une autre. Les plans nocturnes ou en basse lumière sont admirablement gérés, on applaudit des deux mains, c’est du très beau travail éditorial. Côté son, la version française d’origine côtoie donc la V.O, toutes deux en Dolby Digital 2.0 mono d’origine : les deux mixages nous proposent des dialogues clairs et on ne dénotera aucun souffle parasite disgracieux ; on préférera néanmoins la version originale, qui fait preuve de plus de pep’s et remplit mieux le spectre sonore.
Du côté de la section suppléments, l’éditeur nous propose un entretien avec le scénariste Nicholas Meyer (19 minutes), déjà disponible sur l’édition Blu-ray américaine du film chez Shout Factory sortie en 2013. Le romancier / scénariste / réalisateur reviendra sans langue de bois sur les qualités et les défauts de Sherlock Holmes attaque l’Orient-Express, sur la mise en scène d’Herbert Ross, le casting et surtout les erreurs qu’il aurait voulu éviter à l’époque. Il terminera son intervention sur l’idée qui lui trottait dans la tête de revenir au personnage de Sherlock Holmes : ce serait finalement chose faite en 2019, année de sortie de « The adventure of the peculiar protocols », son premier roman consacré au détective depuis « Sherlock Holmes et le Fantôme de l’Opéra » en 1993 (sorti en France en 1995).