Night Swim
États-Unis : 2024
Titre original : –
Réalisation : Bryce McGuire
Scénario : Bryce McGuire, Rod Blackhurst
Acteurs : Kerry Condon, Wyatt Russell, Nancy Lenehan
Éditeur : Universal Pictures
Durée : 1h38
Genre : Fantastique
Date de sortie cinéma : 3 janvier 2024
Date de sortie BR/DVD : 15 mai 2024
Ray Waller est un ancien joueur de football américain qui a dû abandonner sa carrière en raison d’une maladie dégénérative, lors de son emménagement dans une nouvelle maison, avec sa famille : sa femme Eve, leur fille Izzy et leur plus jeune fils. Ray, contre toute attente, ne désespère pas de reprendre sa carrière et persuade toute la famille que la piscine qui se trouve dans le jardin sera parfaite pour sa rééducation et pour ses enfants. Mais cette maison cache un lourd passé et ils vont sans le vouloir réveiller une force malveillante qui va tous les précipiter aux tréfonds de l’horreur absolue…
Le film
[3/5]
Night Swim s’inscrit dans une certaine tradition dans le cinéma fantastique contemporain qui tend à mettre sur le devant de la scène un objet du quotidien aux vertus maléfiques. L’idée, aussi simple qu’amusante sur le papier, est de prêter vie à des objets inanimés, généralement décrits comme des objets « maudits », ou possédés par une entité maléfique. Les exemples sont nombreux : on recense ainsi pas mal de poupées, mais aussi des livres, jeux de société ou jeux vidéo, VHS, boites à musique, ordinateurs et sites Internet, téléphones, bijoux, meubles, tableaux, instruments de musiques, miroirs, masques, vêtements, ou encore véhicules – voitures, camions… Tous animés de mauvaises intentions ; avides de vengeance ou ouvrant la voie vers l’au-delà. Les époux Warren en ont d’ailleurs une pièce pleine, chaque objet attendant sagement son tour pour être le sujet d’un nouveau film.
La tendance ne date pas d’aujourd’hui, et certains objets au centre de films produits il y a quelques années peuvent prêter à sourire par leur incongruité : on pense par exemple à Death bed : The bed that eats (George Barry, 1977), qui mettait en scène un « lit de la mort », à Killer Sofa (Bernardo Rao, 2019) et à son fauteuil maléfique, à The refrigerator – L’attaque du frigo tueur (Nicholas Jacobs, 1991) ou encore à Pisspot from Hell (Enrico Pallazzo, 1984) et son pot de chambre qui noyait ses victimes dans des hectolitres de pipi.
Dans Night Swim, c’est un nouvel objet du quotidien qui va tenter de faire frissonner le spectateur : une piscine. Le film est produit par James Wan (Atomic Cyborg) et Jason Blum (Blumhouse), deux noms familiers des amateurs de films d’horreur jouant sur ce genre de détournement inattendu de ce qui fait normalement la joie des spectateurs. Une piscine, surtout avec les beaux jours qui approchent, c’est normalement un synonyme de bons moments passés en famille ou entre amis à barboter dans l’eau. Sauf que la piscine de Night Swim, elle en a après ton âme.
Vous en conviendrez, ce pitch est probablement l’un des plus cons du monde ; d’ailleurs, le réalisateur et coscénariste de Night Swim Bryce McGuire l’admet de bonne grâce dans les bonus du Blu-ray. Cela dit, on avouera également qu’il y a de quoi être intrigué par ce point de départ, qui a au moins le mérite de ne pas jouer avec les codes habituels de la maison hantée. On saluera donc l’audace du jeune cinéaste d’avoir tenté d’explorer ce concept jusqu’au bout, surtout si l’on considère que les films d’horreur s’étant jusqu’ici essayés à mettre en avant une piscine l’avaient fait d’une façon un peu détournée : dans The Pool – La piscine du danger (Boris von Sychowski, 2001), les jeunes étudiants n’étaient pas tués par la piscine mais par un classique tueur masqué de slasher, et dans The Pool (Ping Lumpraploeng, 2018), le danger venait en réalité d’un crocodile coincé dans la piscine avec le héros du film.
Comme souvent avec ce genre de film-concept, Night Swim est tiré d’un court-métrage de 2014, coréalisé par Rod Blackhurst et Bryce McGuire. Ce petit film d’horreur de quatre minutes, qui mettait en scène une jeune femme aux prises avec une piscine hantée, a attiré l’attention de Jason Blum, qui a proposé à Bryce McGuire de travailler sur un long-métrage développant le même concept. On y suivra donc Ray, un ancien joueur de baseball professionnel atteint de sclérose en plaques (Wyatt Russell), s’installant dans une nouvelle maison avec sa femme Eve (Kerry Condon) et leurs deux enfants Elliot et Izzy (Gavin Warren et Amélie Hoeferle). La présence de la piscine dans le jardin de la maison est une bonne nouvelle pour Ray, qui doit entamer des séances d’hydrothérapie, qui auront sur lui un effet quasi-miraculeux…
Voilà pour le point de départ, et en dépit de l’absurdité de l’idée sur le papier, Bryce McGuire parvient tout de même tant bien que mal à créer une atmosphère étrange dès le début de son film, notamment grâce à une séquence d’ouverture revenant sur des événements s’étant déroulés en 1992, et qui parviennent à semer le doute dans l’esprit du spectateur quant au fait que la piscine du film ne se limite pas à ce que l’on peut en voir à la surface. Quand on passe au présent, Night Swim prend le temps de nous présenter un petit groupe de personnages solides. Un soin tout particulier est apporté à la caractérisation des deux enfants de la famille : Elliot est un petit garçon qui s’efforce de s’intégrer et de se faire des amis, mais qui semble finalement se retrouver encore plus seul et isolé que son père. Izzy cherche également à attirer l’attention, et finira par jeter son dévolu sur un jeune du coin, membre actif d’une communauté catholique, qu’elle compte bien – même si ce n’est pas clairement affirmé par le film – détourner du droit chemin. Du côté des adultes, Ray est un ancien joueur pro assez égocentrique, et Eve est une épouse délaissée qui, comme beaucoup de femmes, a toujours dû faire passer ses besoins après ceux des autres afin de maintenir l’unité de la famille en dépit des fréquents déménagements que leur a imposé la carrière de son mari.
La tension et à l’atmosphère de Night Swim augmente au fur et à mesure que le film avance, et alors que les incidents inquiétants liés à la piscine augmentent en fréquence et en intensité. D’une façon assez amusante, vers la moitié du film, alors que le spectateur commence sérieusement à se demander pourquoi les personnages du film n’envisagent pas de déménager, ou pour quelle raison ils s’entêtent à continuer à aller se baigner dans leur piscine seuls et à trois heures du mat’, le scénariste / réalisateur Bryce McGuire répondra à chacune des questions que peut se poser le public, d’une façon directe ou détournée.
Formellement, les scènes de flippe de Night Swim sont intéressantes, l’eau déformant la perception visuelle et auditive du spectateur ; les mouvement sont ralentis, la localisation précise des personnages est parfois rendue difficile, et les sentiments d’étouffement et de désorientation sont encore renforcés par un étirement volontaire des distances, Bryce McGuire filmant les choses comme si la piscine avait quinze mètres de fond. C’est d’ailleurs durant ces séquences que Night Swim s’avère le plus saisissant d’un point de vue visuel, avec des nageurs entourés par des dizaines de cadavres et de monstres, la surface de la piscine n’étant plus représentée que par un petit rectangle de lumière loin au-dessus d’eux. Même si beaucoup des effets spéciaux utilisés au fil du film sont numériques, l’utilisation fréquente d’effets « pratiques » renforce l’impact global de l’ensemble, notamment en ce qui concerne deux des entités qui peuplent l’eau de la piscine, à savoir une femme squelettique et un homme boursouflé.
Le Blu-ray
[4/5]
Avec la sortie de Night Swim sur support Blu-ray, Universal Pictures nous propose une démonstration éclatante de son extraordinaire savoir-faire technique, et nous livre une véritable galette de démonstration, à la définition et au piqué d’une précision excellente, offrant également des couleurs littéralement explosives et des contrastes soignés. Le niveau de détail est époustouflant, la superbe photo signée Charlie Sarroff ressort parfaitement en Haute-Définition, avec une précision hallucinante. La gestion des noirs est également imparable : on est vraiment en présence d’une galette et d’un master d’exception. Côté son, la version originale nous est proposée dans un impressionnant mixage DTS-HD Master Audio 7.1, au rendu ample et dynamique, voire même carrément explosif au niveau des basses ; il vous sera absolument impossible de ne pas sursauter aux nombreux « jump-scares » qui émaillent le film. La version française quant à elle est proposée dans un mixage DTS-HD High Resolution Audio 7.1. L’ampleur et le dynamisme sont au rendez-vous : ce mixage de la VF nous propose une spatialisation littéralement renversante.
Au rayon des suppléments, Universal nous propose comme à son habitude une généreuse sélection de featurettes informatives, mais on commencera par remater le film avec le commentaire audio du réalisateur Bryce McGuire, proposé en VOST, et qui permettra au cinéaste de rendre hommage aux cinéastes qui l’ont influencé, et notamment – entre autres – à Steven Spielberg et Les Dents de la mer. Il reviendra également sur les origines du projet Night Swim, sur les acteurs et leurs qualités de nageurs, sur les défis techniques liés à un tournage en grande partie « aquatique », etc. On continuera ensuite par une featurette consacrée aux producteurs du film James Wan et Jason Blum (7 minutes), qui reviendront sur les particularités du projet tout autant que sur leur implication dans ce dernier. On reviendra ensuite sur les maquillages du film (7 minutes) et les monstres des profondeurs créés par Justin Raleigh, et on enchaînera avec une réflexion sur le concept de terreur aquatique (6 minutes), au cœur de laquelle Bryce McGuire partage son enthousiasme à l’idée de transformer une activité typiquement associée à l’amusement et à la famille en quelque chose de terrifiant. James Wan se félicitera de la réussite du film à détourner les codes du genre, en jouant avec l’eau plutôt qu’avec les traditionnelles rocking-chairs, portes qui grincent et autres poupées vivantes. On terminera enfin avec un retour sur la scène dite du « Marco Polo » (4 minutes), dans laquelle le réalisateur et co-scénariste Bryce McGuire et le producteur James Wan évoqueront les astuces cinématographiques utilisées pour filmer la scène.