Test Blu-ray : Ne vous retournez pas – Réédition 2021

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Ne vous retournez pas

Royaume-Uni, Italie : 1973
Titre original : Don’t look now
Réalisateur : Nicolas Roeg
Scénario : Allan Scott, Chris Bruyant
Acteurs : Julie Christie, Donald Sutherland, Hilary Mason
Éditeur : Potemkine Films
Durée : 1h50
Genre : Drame, Thriller
Date de sortie cinéma : 18 septembre 1974
Date de sortie DVD/BR : 15 juin 2021

Quelques mois après la mort par noyade de leur petite fille, Laura Baxter et son époux John, appelé sur le chantier de restauration d’une église, se rendent à Venise. Mais la ville est devenue cet hiver-là le théâtre d’événements sordides et une étrange rencontre ravive chez le couple le souvenir douloureux de leur fillette…

Le film

[3,5/5]

Plus de quarante ans après son tournage, l’aura très particulière et tenace autour de Ne vous retournez pas de Nicolas Roeg semble aussi surestimée que le mélange des genres tenté par le film semble improbable. A la croisée des chemins entre les cinémas d’Hitchcock, de Visconti et… d’Argento, le film de 1973 parait aujourd’hui bien en deçà des filmographies des trois cinéastes qu’il convoque de façon détournée, mais demeure tout de même une intéressante plongée dans les affres de la psychanalyse, qui, à l’image d’autres films adaptés des œuvres de Daphné Du Maurier, n’a probablement pas fini d’user les cerveaux et de faire couler de l’encre.

[ATTENTION : SPOILERS]

Comme son titre original Don’t look now l’indique clairement, Ne vous retournez pas a pour thème central la « vision », dans tous les sens du terme. Le film met en effet en scène deux personnages de médiums, dont la clairvoyance ne se répercute pas dans le réel puisque le personnage incarné par Hilary Mason est aveugle, et que celui interprété par Donald Sutherland « refuse » de voir, de croire à ses visions – ce qui mènera dans un premier temps sa fille à un destin tragique, puis dans un second temps le conduira lui-même à sa perte.

Les interprétations quant au refus par trop cartésien de Sutherland de croire à ses visions prémonitoires vont bon train dans la sphère cinéphilico-analytique depuis une quarantaine d’années, les psychanalystes de comptoir se touchant à qui mieux mieux sur diverses théories plus ou moins fumeuses. Le personnage du « père » est clairement désigné comme le responsable de la mort de sa fille, non seulement par la mise en scène de Nicolas Roeg mais également par les propos de sa femme, qui déclare que c’est LUI qui lui a permis de jouer près de l’étang ; aussi convient-il de se poser la question : pourquoi a-t-il laissé sa fille aller à grandes enjambées vers son destin funeste ? L’explication la plus rationnelle est sans doute que le père entretenait une forte jalousie vis-à-vis de sa fille Christine, qui occupait trop de place au niveau affectif auprès de son épouse, et les empêchait de mener une véritable vie de couple. La présence de leur fille réduisait sa femme au simple statut de « mère » et non de « femme », lui ôtant par là même toute dimension sexuelle.

La femme en question, Laura, ayant perdu sa place de mère, elle perd les pédales, son équilibre – dans son analyse du film disponible dans les suppléments du Blu-ray, Jean-Baptiste Thoret évoque d’ailleurs un détail intéressant : la possibilité d’une nouvelle grossesse en fin de métrage, puisque durant l’enterrement de son mari, Laura arbore un léger sourire. La réponse à cette question de la grossesse, nous l’aurons peut-être dans le très attendu Ne vous retournez pas 2, que prépare actuellement Michael Bay avec Will Smith et Melissa McCarthy.

Le Blu-ray

[4,5/5]

Déjà sorti chez Potemkine en 2015, le film de Nicolas Roeg n’avait à l’époque pas pu bénéficier d’une restauration ou d’un master 4K ; voilà une erreur aujourd’hui réparée. Cette nouvelle édition Blu-ray, toujours sous les couleurs de Potemkine, nous propose donc de redécouvrir le film dans des conditions absolument remarquables, enterrant littéralement le Blu-ray de 2015. La restauration a vraiment été soignée, c’est un très beau boulot : si l’on tient compte de l’âge du film, on se dit d’ailleurs qu’on n’aura sans doute jamais mieux. L’ensemble s’avère extrêmement propre, avec de beaux contrastes et un piqué précis malgré un grain scrupuleusement respecté. Le film a retrouvé sa fluidité d’antan et propose une image assez superbe. Côté son, l’éditeur nous propose une seule piste audio, en VOST et DTS-HD Master Audio 2.0, propres, sans souffle, proposant une immersion parfaite au cœur de cet étrange film.

Du côté des suppléments, Potemkine a également revu sa copie, nous proposant tout d’abord une analyse du film par Jean-Baptiste Thoret (31 minutes). Il y revient sur les thématiques développées par le film, ainsi que sur ses influences et la place qu’il occupe dans la carrière de Nicolas Roeg. On continuera ensuite avec un entretien avec Donald Sutherland (24 minutes), dans lequel l’acteur se remémorera un tournage ayant « tout changé » dans sa carriière. Il y reviendra sur son premier contact téléphonique avec Nicolas Roeg, mais également du tournage, pour lequel il a assuré lui-même la cascade de la scène de l’échafaudage malgré son vertige. Il évoquera également, entre autres, le talent de Julie Chrisitie ainsi que le tournage de la scène d’amour. On découvrira ensuite des personnalités un peu moins connues du grand public. On commencera avec un entretien avec Allan Scott, scénariste et producteur (15 minutes), qui permettra à Scott de présenter son parcours professionnel et d’évoquer les différences entre la nouvelle de Daphné du Maurier et le scénario qui en a été adapté. On poursuivra ensuite avec un entretien avec Anthony Richmond, directeur de la photographie (25 minutes), qui reviendra sur sa collaboration avec Nicolas Roeg ainsi que sur les particularités de Ne vous retournez pas (notamment l’utilisation d’objectifs à obturation rapide). On terminera enfin avec les propos éclairés de deux amateurs du film, à travers un entretien avec Danny Boyle (16 minutes), dont il s’agit du film préféré avec Apocalypse Now, et un entretien avec Justine Triet (14 minutes), qui permettra à la réalisatrice de Victoria et Sibyl d’évoquer sa découverte du film il y a 3 ou 4 ans, ainsi que la nature profondément « visuelle » de ce dernier.

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