My Entire High School sinking into the Sea
États-Unis : 2016
Titre original : –
Réalisation : Dash Shaw
Scénario : Dash Shaw
Acteurs : Jason Schwartzman, Lena Dunham, Reggie Watts
Éditeur : Blaq Out
Durée : 1h15
Genre : Animation
Date de sortie DVD/BR : 21 juin 2018
C’est la panique à Tides High ! Un tremblement de terre fait couler le lycée qui s’enfonce inexorablement dans l’océan. C’est le moment pour Dash, Assaf et Verti, responsables pas vraiment populaires du journal de l’école, de montrer de quoi ils sont capables…
Le film
[4/5]
Si le nom de Dash Shaw ne dira à priori absolument rien à bien des cinéphiles, nos lecteurs passionnés par le Neuvième Art reconnaîtront en revanche en lui une des valeurs montantes de la bande dessinée indépendante américaine. Si son nom n’est certes pas aussi connu et réputé que ceux de Robert Crumb, Charles Burns ou Daniel Clowes, il fait partie, avec Adrian Tomine, David Heatley ou Dave Cooper, d’une nouvelle vague d’auteurs livrant avec régularité de petits chefs d’œuvres de romans graphiques à la fois personnels et absolument uniques, flirtant parfois avec l’expérimental.
My entire high school sinking into the sea s’impose de fait comme un véritable OVNI, un film d’animation hétérogène et branque, qui risque fort de dérouter plus d’un spectateur. Ne serait-ce que visuellement, le film alterne les séquences affichant un crayonné volontairement épais et visible, donnant un étrange « volume » à des dessins pourtant toujours en aplat, et les séquences plus chiadées visuellement, voire même par moments littéralement superbe. Mais paradoxalement, c’est aussi dans ce joyeux « bordel » visuel que le film de Dash Shaw trouve son identité graphique, étonnante, jamais là où on l’attend, proposant par exemple de longues séquences utilisant des méthodes classiques de l’animation, telles que les ombres chinoises « à la Lotte Reiniger », servies cela dit au spectateur sur un mode décalé rappelant fortement Scooby-Doo.
A la fois fascinant et très drôle, le récit navigue à vue entre le film catastrophe et la teen comedy classique, en parsemant ça et là des références qui feront à coup sûr rire ou sourire, telles que ces clins d’yeux à L’aventure du Poséidon ou au classique du jeu vidéo Double Dragon, durant la séquence où Lunchlady Lorraine bastonne à mains nues et en scrolling horizontal une poignée de loubards. Les amoureux de l’œuvre graphique de Dash Shaw seront en terrain connu, et retrouveront même le personnage de Verti, déjà apparu dans le roman graphique Cosplayers. Réussi, rythmé, osant sans détour le mélange de genres et des styles, My entire high school sinking into the sea impose un style et une ambiance véritablement uniques dans le petit monde de l’animation contemporaine. Un grand bravo donc à Dash Shaw.
Le Blu-ray
[5/5]
Éditeur indépendant faisant indéniablement partie des plus intéressants en France en termes de qualité et d’audace, Blaq Out a lancé il y a un peu plus d’un an une collection appelée « Blaq Market », destinée à réunir des œuvres inclassables et déroutantes, signées par des cinéastes singuliers aux thèmes et à l’identité formelle très affirmés. « Blaq Market » est donc une collection qui a su captiver non seulement un public amateur de cinéma de genre au sens très large du terme mais aussi tout cinéphile avide de découverte(s)…
La première vague de la collection « Blaq Market » (décembre 2015) réunissait L’enfant miroir (Philip Ridley, 1990) et Der Samurai (Till Kleinert, 2014).
La deuxième vague de la collection « Blaq Market » réunissait Ruined heart (Khavn de la Cruz, 2014) et Aaaaaaaah! (Steve Oram, 2015)
La troisième vague de la collection « Blaq Market » réunissait Tetsuo 3 : The bullet man (Shinya Tsukamoto, 2009) + Fires on the plain (Shinya Tsukamoto, 2014), ainsi que R100 (Hitoshi Matsumoto, 2013).
Enfin, la quatrième vague de la collection « Blaq Market » comprend We are the flesh ( Emiliano Rocha Minter, 2016), Appel d’urgence / Miracle mile (Steve De Jarnatt, 1988) et Knightriders (George A. Romero, 1981).
My entire high school sinking into the sea est donc le dixième titre à intégrer cette riche collection, et une nouvelle fois, nous ne sommes pas déçus : Blaq Out nous propose pour ce film d’animation complètement barré un master Blu-ray d’une beauté transcendante, encodé en 1080p et proposant un piqué d’une précision époustouflante, agrémenté de couleurs et de contrastes qui permettront au spectateur de se rendre pleinement compte de l’aspect littéralement superbe de certains plans du film. En deux mots, tout est parfait, c’est un travail tout simplement magnifique, et un bel hommage à Dash Shaw que de proposer son film sur support Blu-ray en France. Niveau son, l’éditeur se révèle également fidèle à ses habitudes, en nous offrant uniquement un mixage en version originale, proposé en DTS-HD Master Audio 5.1, et s’avère très rentre-dedans dans la spatialisation de ses effets. Le caisson de basses en rajoute encore une couche dans les ambiances, c’est du très beau boulot.
Du côté des suppléments, l’éditeur nous a tout d’abord réservé un entretien avec Stéphane Beaujean, journaliste et directeur artistique du Festival International de la BD d’Angoulême. Les propos de ce dernier sont très intéressants, dans le sens où ils expliqueront au néophyte le parcours et la carrière de Dash Shaw dans le petit monde de la BD indépendante. Plus important encore : ses propos donneront au spectateur une envie franche et sincère de découvrir l’œuvre graphique de Shaw, qui a l’air absolument grandiose dans son genre. On poursuivra avec un making of qui reviendra rapidement sur la conception du film par Dash Shaw et son équipe, selon un processus artistique très collectif expliquant les différences stylistiques qui interviennent d’une séquence à une autre durant le métrage. Mais Blaq Out ne s’arrête pas là, puisque l’éditeur français nous propose également un commentaire audio du réalisateur Dash Shaw, qui se prête au jeu avec un plaisir communicatif, balançant un grand nombre d’anecdotes et d’infos intéressantes, même si il brode un peu quand il ne sait plus quoi dire et se retrouve par moments à simplement décrire ce qui se passe à l’écran. On continue avec cinq courts-métrages réalisés par Dash Shaw, qui ont la particularité d’être extrêmement courts (moins d’une minute). On notera que certains d’entre eux sont des espèces d’excroissances de ses œuvres graphiques et étaient probablement à l’origine plutôt destinées à la promotion de ses BD sur le Net. Enfin, on terminera avec la traditionnelle bande-annonce du film.