Manhunt
Chine, Hong-Kong : 2017
Titre original : Zhui bu
Réalisation : John Woo
Scénario : John Woo
Acteurs : Zhang Hanyu, Masaharu Fukuyama, Ha Jiwon
Éditeur : HK Vidéo
Durée : 1h49
Genre : Thriller, Action
Date de sortie DVD/BR : 6 février 2019
L’avocat d’une puissante firme pharmaceutique est accusé d’une crime qu’il n’a pas commis. A-t-il été piégé par ses employeurs voulant cacher le développement d’une molécule démultipliant les capacités physiques ? Il doit prendre la fuite espérant trouver les coupables. Un policier borderline se lance à sa poursuite. Une chasse à l’homme de grande envergure est lancée entre fracas de tôle et tonnerre des armes à feu…
Le film
[3,5/5]
En 2017, âgé de 71 ans, John Woo revient aux affaires : vingt ans après son expérience américaine du film d’action avec Volte/face, plus de vingt-cinq ans après ses grands classiques hongkongais (Le syndicat du crime 1 & 2 en 1986/87, The killer en 1989, A toute épreuve en 1992), le cinéaste revient donc au genre qui a fait sa gloire : le polar. La première affiche du film, qui donnait uniquement à voir une colombe, était déjà la promesse d’un retour aux origines pour John Woo – le retour à un genre qu’il avait complètement révolutionné en l’espace de quelques années et quelques films.
Et assurément, on retrouvera dans Manhunt quelques-uns des gimmicks qui faisaient la force de son cinéma dans les années 80/90 : des gunfights dantesques, des personnages vidant leurs flingues bras tendus avec une arme dans chaque main, un rapprochement entre le flic et celui qu’il pourchasse, qui partagent tous deux les mêmes valeurs, des pigeons et colombes en pagaille, des explosions, des tueurs en motos, et par-dessus tout cela une ambiance fleur bleue et romantique. Manhunt joue donc la carte de la nostalgie, et s’adresse avant tout aux fans du cinéaste : malgré un tournage en numérique qui impose au film un style visuel globalement assez laid, John Woo s’arrange tout de même pour nous emballer quelques jolis plans, et les scènes d’action font le reste, surtout dans la deuxième moitié du métrage. Comme à la « grande époque » avec Woo, la forme prime largement sur le fond, et le cinéaste se laisse volontiers aller à quelques excès, multipliant par exemple les effets de montage kitschissimes et en rajoutant dans la personnalité du flic japonais, qui s’impose vraiment comme une caricature du flic jap’ badass de cinéma des années 60/70, qui plus est jamais avare en grandes phrases.
Et si bien sûr Manhunt n’égale en aucun cas les grands films signés John Woo dans les années 80/90 (durant lesquelles il tournait avec des budgets et des timings serrés, mais avec des équipes qui donnaient tout, avec l’énergie du désespoir), on admettra cela dit qu’il est difficile de faire la fine bouche devant l’énergie déployée par le cinéaste dans la deuxième moitié de son film, qui nous offre deux longues séquences d’action très impressionnantes, et très réjouissantes. On notera également que pour la première fois dans un film de John Woo, la violence n’est pas exclusivement réservée à la gent masculine : on y trouvera en effet deux personnages de tueuses impitoyables, incarnées par la sud-coréenne Ji-won Ha et par une certaine Angeles Woo, qui se trouve, bien sûr, être la fille du cinéaste.
Du côté des projets à venir de John Woo, on notera bien sûr le très attendu Eight & a half, qui réunira huit cinéastes emblématiques du cinéma hongkongais autour d’une anthologie sur l’histoire de Hong Kong des années 40 à aujourd’hui. Le film proposera des sketches réalisés par – excusez du peu – Ann Hui, Sammo Hung, Patrick Tam, Johnnie To, Tsui Hark, Yuen Woo-Ping, John Woo bien sûr, ainsi que le regretté Ringo Lam, décédé en décembre 2018. Le projet de remake américain de The killer est également toujours dans les tuyaux, et devrait logiquement être réalisé par John Woo lui-même. Parallèlement, on rêve toujours d’un nouvel épisode de la saga Le syndicat du crime, interprété par Chow Yun-Fat et co-réalisé par Woo et Tsui Hark. Mais pour le coup, celui-ci tient vraiment du simple fantasme de cinéphile, et ne verra probablement jamais le jour…
Le Blu-ray
[4/5]
C’est donc HK Vidéo, grand défenseur en France du cinéma populaire asiatique, qui édite aujourd’hui le Blu-ray de Manhunt, et comme à son habitude, l’éditeur nous livre ici une galette techniquement soignée. Le master est d’une belle précision, malgré un rendu un peu « vidéo » lié aux conditions de tournage du film. Les couleurs montrent une belle pêche, les noirs sont solides et profonds, l’ensemble est donc absolument fidèle aux volontés esthétiques de John Woo et de son directeur photo Takuro Ishizaka. Côté son, HK Vidéo fait également très fort puisque le film bénéficie de deux pistes DTS-HD Master Audio 5.1, d’un dynamisme échevelé, surtout sur les scènes de combats naturellement, et quand la violence commence à se déchainer, tous les canaux y vont de leur puissance et le caisson de basses sollicité à intervalles très réguliers. Le film étant déjà très impressionnant, ce mixage ajoute encore à l’ambiance et participe pleinement à l’immersion du spectateur au cœur du film. La VF est soignée, mais peine à rendre le débit sentencieux et gentiment excessif de Masaharu Fukuyama.
Du côté des suppléments, et outre les traditionnelles bandes-annonces éditeur, HK Vidéo nous propose de découvrir un making of (d’une durée d’environ 12 minutes), revenant sur le tournage du film et les ambitions de Woo et de son équipe. L’ensemble est très orienté « promo » mais demeure intéressant.