Lucky day
Canada, France : 2019
Titre original : –
Réalisation : Roger Avary
Scénario : Roger Avary
Acteurs : Luke Bracey, Nina Dobrev, Crispin Glover
Éditeur : Metropolitan Vidéo
Durée : 1h39
Genre : Policier, Thriller
Date de sortie cinéma : 18 septembre 2019
Date de sortie DVD/BR : 5 décembre 2020
C’est le grand jour, Red sort de prison, après avoir purgé deux ans pour un braquage de banque qui s’est soldé par la mort de son complice. Il retrouve sa femme Chloé qui l’a attendu tout en élevant seule leur fille Beatrice. Le même jour, Luc, le frère de son ancien complice, tueur à gages et psychopathe notoire, débarque assoiffé de vengeance et avec la ferme intention de l’éliminer…
Le film
[3,5/5]
Dans les années 90, en partie à cause de sa contribution au scénario de Pulp fiction, Roger Avary a parfois été considéré comme un alter ego de Quentin Tarantino – en tous cas un de ces cinéastes avec lesquels les années 2000 devraient définitivement compter. Que l’on ait aimé ou détesté son premier long-métrage Killing Zoé (1993), le cinéaste était par la suite parvenu à mettre tout le monde d’accord en 2002 avec Les lois de l’attraction, brillante adaptation du roman de Bret Easton Ellis. Par la suite, et malgré sa participation active aux scenarii de Silent Hill (2006) et de La légende de Beowulf (2007), le nom de Roger Avary a quasiment disparu de la circulation, la faute au destin dirons-nous, qui l’avait vu prendre le volant en état d’ébriété et provoquer un accident qui coûterait la vie à l’un de ses amis, et lui vaudrait d’être condamné à une peine d’un an de prison.
Libéré en juillet 2010 après 8 mois de détention, Roger Avary mettrait du temps à réussir à retrouver le chemin des studios, l’usine à rêves Hollywoodienne se montrant toujours extrêmement réticente à donner du boulot aux repris de justice. De notre côté de l’Atlantique en revanche – et sans vouloir remettre deux sous à la polémique Roman Polanski – on est d’avantage enclins à séparer « l’homme » de « l’artiste », et EuropaCorp a proposé à Roger Avary un poste de « showrunner » sur la deuxième saison de la série XIII. C’est également un français – le regretté Samuel Hadida en l’occurrence – qui lui permettrait, quelques années plus tard et par le biais d’une coproduction avec le Canada, de revenir derrière la caméra avec Lucky day, polar décalé ô combien typique de son écriture des années 90. On aurait d’ailleurs tendance à qualifier son histoire de « Tarantinesque », dans le sens où les contributions de Roger Avary aux scripts de Reservoir dogs, Pulp fiction et True romance ont, de nos jours, complètement été vampirisées par la personnalité de Quentin Tarantino.
Conçu à l’origine comme une suite de Killing Zoé, Lucky day devait suivre la cavale de Zed et Zoé (Eric Stoltz et Julie Delpy) à travers la France et Monaco, les deux tourtereaux étant poursuivis par le frère d’Eric (Jean-Hugues Anglade), assoiffé de vengeance. Lorsque Samuel Hadida parvient finalement à lancer le projet, Roger Avary décide de le réécrire en prenant en compte son expérience personnelle. Le personnage principal devient alors un ancien détenu, et le duo composé de Zed et Zoé devient Red et Chloé.
Il y a d’ailleurs fort à parier que s’il avait vu le jour il y a vingt ou vingt-cinq ans, Lucky day eut sans doute connu le destin d’un véritable film-culte. Le film de Roger Avary développe en effet un état d’esprit, une coolitude, des dialogues et une mise en scène qui l’auraient immédiatement placé aux côtés des plus grands polars déjantés de la deuxième moitié des années 90. Interrogé par nos confrères de Variety en 2017, Avary décrivait d’ailleurs son film comme un hommage à Tony Scott : « Avec ce film, nous sommes restés fidèles à son esprit et nous nous sommes replongés dans ce qu’il faisait durant les années 90 ».
En 2020 en revanche, il nous faut avouer que Lucky day fait un peu figure d’anachronisme, de comédie noire aux allures un poil artificielles, se reposant sur des dialogues – certes brillants et finement ciselés – et sur un recours systématique à la violence qui, de nos jours, se sont vus tellement repris et déclinés sous toutes les formes que l’on peine un peu à s’enthousiasmer à 100% de ce qu’Avary nous donne à voir. Pourtant, et en dépit de ces quelques réserves, il nous faut avouer que Lucky day a vraiment de beaux restes, et demeure un film étrangement attachant.
Si Luke Bracey et Nina Dobrev, qui incarnent les Clarence et Alabama de ce nouveau conte de fées tordu, s’en sortent clairement avec les honneurs, le film est essentiellement porté par ses seconds-rôles, et en particulier par la prestation absolument cinglée de Crispin Glover, qui retrouve ici un rôle similaire à celui de « Sac d’os » qu’il incarnait dans le chef d’œuvre Charlie’s Angels – en plus bavard néanmoins. Sa présence magnétique, son charisme, sa folie furieuse emmènent le film vers des cimes inattendues de violence mais aussi d’humour, avec notamment une incroyable séquence de gunfight dans une galerie d’Art moderne qui vaut, à elle-seule, le visionnage de Lucky day. Ajoutez à cela une poignée de séquences folles, un Tomer Sisley avec mèche et moustache en mode Hitler, un personnage d’agent de probation haut en couleurs incarné par l’excellent Clifton Collins Jr. (Triple 9), et un caméo amusant de Samuel Hadida, et vous avez assez de bonnes raisons pour vous laisser tenter par ce retour de Roger Avary au polar qui a fait sa gloire dans les années 90.
Le Blu-ray
[4/5]
Lucky day arrive sur galette Blu-ray sous les couleurs de Metropolitan Vidéo. Et comme d’habitude avec l’éditeur, la fidélité au matériau d’origine est au rendez-vous : le piqué est précis, les couleurs explosent, les contrastes sont magnifiques et l’encodage s’en sort haut la main. Le résultat est superbe : du très beau travail technique ! Niveau son, Metro nous propose à la fois la version française et la version originale mixées en DTS-HD Master Audio 5.1. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le spectacle et l’immersion seront totaux : dynamique générale, basses, scène arrière, précision… Tout est au taquet, c’est une véritable merveille acoustique, en particulier sur les scènes d’action ainsi que les quelques scènes musicales. Pas de suppléments.