Test Blu-ray : L’internat

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L’internat

États-Unis : 2018
Titre original : Boarding school
Réalisation : Boaz Yakin
Scénario : Boaz Yakin
Acteurs : Luke Prael, Samantha Mathis, Will Patton
Éditeur : Metropolitan Vidéo
Durée : 1h51
Genre : Drame, Horreur
Date de sortie DVD/BR : 18 février 2019

Jacob est un enfant de 12 ans qui souffre de cauchemars et de troubles du comportement lorsque sa grand-mère meurt. Alors qu’il ne l’avait jamais vue, il devient hanté par sa présence et son passé tragique. Il est alors envoyé par sa mère et son beau-père dans un mystérieux internat perdu au milieu de la forêt. Le directeur est aussi docteur et l’unique professeur de l’école. Obsédé par la religion, il promet aux sept élèves qu’ils seront bientôt purifiés. Tous ses camarades de classe ont chacun des pathologies diverses. Entre un enfant défiguré et une jeune fille sociopathe, Jacob va devoir affronter ses peurs et combattre le mal…

Le film

[5/5]

Carrie, Créatures célestes, Ginger snaps, Mysterious skin, Mean creek, Donnie Darko… Le cinéma fantastique et les récits de « coming of age » font souvent bon ménage. Le fameux passage à l’âge adulte, la découverte de la sexualité et la notion d’acceptation de soi demeurent, pour tout un chacun, forcément toujours un peu nimbés de mystères en tous genres, et le fait de les illustrer au cinéma en ayant recours à des symboles allant chercher du côté du surnaturel est une idée non seulement habile, mais également pleine de poésie.

Et si l’on ne s’attendait pas forcément à trouver Boaz Yakin aux commandes d’une de ces histoires de « coming of age » baignant dans le sang, la surprise liée à la découverte de L’internat n’en est que plus grande, intense, extraordinaire. Autant être clair d’entrée de jeu : s’imposant comme un film d’horreur important, à la fois viscéral et personnel, L’internat fera rapidement figure de classique immédiat, de ceux dont on sait assurément dès qu’on les voit qu’ils feront indéniablement partie des meilleurs films que l’on aura le loisir de découvrir en 2019. Ainsi, le film de Boaz Yakin pourra à sa manière relancer le fameux débat sur les « DTV » (Direct to Video) en France : les meilleurs films bénéficient-ils systématiquement d’une sortie dans les salles obscures ? La réponse est non.

Bien sûr, on pourra comprendre la frilosité des distributeurs à sortir dans les salles un film aussi radical et âpre, jonglant avec des thématiques aussi délicates que l’identité sexuelle, l’héritage de la violence ou même la Shoah – on suppose que le film aurait automatiquement écopé d’une interdiction aux moins de 16 ans, ce qui aurait probablement considérablement réduit son exploitation. Néanmoins, on ne pourra s’empêcher de penser que L’internat aurait cent fois plus mérité de sortir dans les salles que de nombreux autres films, suivez mon regard… Toutefois, l’honneur est sauf dans le sens où le public français va quand même avoir l’opportunité de découvrir le film dans une belle édition Blu-ray sous les couleurs de Metropolitan Vidéo.

Suivant la trajectoire d’un jeune garçon sujet aux terreurs nocturnes, L’internat choisit donc de mettre en parallèle la découverte de son homosexualité par l’adolescent avec une certaine idée de « transmission du mal », un fil ténu le liant à sa grand-mère disparue. Cette dernière, Feiga, lui apparaît en rêve, et le spectateur découvrira son histoire sanglante au fil du déroulement du récit, qui navigue entre une présentation / caractérisation des personnages naturaliste et une fantasmagorie de plus en plus appuyée au fur et à mesure que l’on avance dans l’intrigue et bascule dans la folie. Cette ambiance de folie furieuse qui nimbe le dernier acte et les vingt dernières minutes du film s’inscrira d’ailleurs également dans la patine visuelle du film, baignée d’éclairages vifs surréalistes (rouge, rose, vert, bleu…). On notera que ce basculement dans une atmosphère de folie était annoncé au début du film, alors que le jeune héros Jacob (Luke Prael) regardait sur sa télévision le dernier sketch des Trois visages de la peur (Mario Bava, 1963), intitulé « La goutte d’eau », récit d’ambiance à l’atmosphère étouffante mettant en scène le retour d’une vieille dame récemment décédée…

Bien sûr, le retour de la grand-mère de Jacob se fera [ATTENTION SPOILERS] de façon un peu plus « symbolique » dans L’internat : en assumant sa féminité et en endossant les vêtements de la vieille dame, toujours tachés du sang de l’officier SS qu’elle a égorgé de ses crocs acérés, Jacob « s’accepte » totalement, tournant le dos à ses peurs. Ainsi, il accepte aussi son « héritage », la violence qui coule dans son sang, et deviendra à l’image de son aïeule à la fois un combattant et… un monstre. Semant la mort autour de lui, en condamnant Christine puis en employant les méthodes de ce tueur aux allures de père de substitution pour se débarrasser de Davis, son beau-père, Jacob trouve enfin qui il est vraiment. Autant dire que le plan final, montrant le visage du jeune homme les lèvres souillées de sang, risque bien de vous hanter pour un moment… [FIN DES SPOILERS] [Fin de l’article, aussi]

Le Blu-ray

[4,5/5]

Se déroulant essentiellement dans le noir – ou du moins dans une obscurité importante – L’internat nécessitait un encodage Haute-Définition particulièrement soigné. Bien sûr, les habitués des galettes éditées par Metropolitan Vidéo ne s’en faisaient pas trop quant à la qualité du transfert que leur proposerait l’éditeur, et ils avaient bien raison : le Blu-ray se révèle une nouvelle fois absolument parfait. Les noirs sont denses et profonds, les couleurs explosent, et le piqué ainsi que la profondeur de champ sont d’une redoutable précision. Côté son, c’est l’immersion totale au cœur de cette inquiétante école, avec deux pistes son, VO et VF, mixées en DTS-HD Master Audio 5.1. Dans les deux cas, l’ambiance oppressante du film s’avère rendue de façon époustouflante, dynamique et riche en petits détails sonores étonnants, notamment en ce qui concerne les effets d’ambiance et la restitution des échos. En deux mots comme en cent, c’est du très lourd, les deux pistes s’avèrent bluffantes et littéralement tonitruantes dans le dernier acte du film. Extraordinaire.

Du côté des suppléments, on ne trouvera rien sur le Blu-ray à proprement parler, mais Metropolitan Vidéo nous propose un passionnant livret de 28 pages contenant un ensemble de photos d’exploitation, une fine analyse du film, une bio/filmographie de Boaz Yakin très intéressante (dans le sens où il ne s’agit pas d’une simple resucée de la page Wikipédia du cinéaste mais où elle propose une véritable mise en perspective de son œuvre) et LAST BUT NOT LEAST un formidable entretien avec le cinéaste au cœur duquel ce dernier reviendra sur les aspects narratifs et techniques les plus passionnants de L’internat. En bref, des livrets comme celui-ci, ça vaut honnêtement cent fois plus que toutes les featurettes formatées du monde : à lire impérativement !

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