Les sous-doués
France : 1980
Titre original : –
Réalisation : Claude Zidi
Scénario : Claude Zidi, Didier Kaminka, Michel Fabre
Acteurs : Daniel Auteuil, Michel Galabru, Maria Pacôme
Éditeur : Gaumont
Durée : 1h32
Genre : Comédie
Date de sortie cinéma : 30 avril 1980
Date de sortie DVD/BR : 26 février 2020
Bébel et ses petits camarades du Cours Louis XIV, sont réputés pour être des fainéants et d’invétérés farceurs. Leur lycée est même dernier du classement au baccalauréat avec cent pour cent de recalés à l’examen ! Après une plaisanterie qui tourne mal, les trublions se retrouvent obligés d’obtenir leur bac à tout prix, tout en rusant et trichant, s’ils ne veulent pas finir en prison…
Le film
[3,5/5]
La comédie franchouillarde a toujours été un genre très populaire dans l’hexagone, remplissant régulièrement les salles obscures de français enclins à oublier, le temps d’un film, la grisaille du quotidien. Mais c’est aussi un genre cinématographique relativement éphémère, volatile, rempli de films rapidement oubliés, tombant dans les limbes de la mémoire collective sans doute encore plus vite qu’aucun autre. Ainsi, pour une comédie qui trouve son chemin vers le cœur du public et atteint dans une certaine mesure « l’immortalité », ce sont grosso modo dix petites comédies qui rejoignent les strates obscures des bases de données spécialisées dans le cinéma, qui affichent leurs titres parfois pas piqués des hannetons avec une certaine concupiscence. Cette malédiction de la mémoire frappe tellement au hasard qu’elle s’attaque même parfois à des comédies ayant rencontré, au moment de leur sortie en salles, de confortables succès publics. Certaines autres comédies en revanche, portées par la personnalité d’acteurs aimés du public, ou ayant plus que d’autres marqué leur époque, bénéficient de la chance d’être régulièrement rediffusées à la télévision.
Avec environ 265.452 rediffusions TV en l’espace de quarante ans, Les sous-doués fait naturellement partie de cette deuxième catégorie, celle des comédies franchouillardes extrêmement populaires, et dont le succès ne s’est jamais démenti avec les années. S’il avait réuni 4 millions de français dans les salles en 1980, le film de Claude Zidi avait en effet déjà été vu, selon Médiamétrie, par 13,46 millions de français dix ans plus tard. Puisqu’il engrange un nouveau nombre d’adeptes à chacune de ses diffusions télé, on peut supposer qu’en 2020, Les sous-doués a probablement largement dépassé la barre des 20 millions. Ce qui voudrait dire que 30% des français ont déjà vu le film de Zidi. Et à ceux qui se poseraient la question de l’utilité de ressortir aujourd’hui le film en Blu-ray, on répondra que Gaumont peut donc tabler sur une partie de ces 30%, ainsi que, potentiellement, sur les 70% de français qui ne l’auraient encore jamais vu. Ça laisse de la marge, d’autant que l’éditeur joue ici sur la nostalgie autant que sur le fait qu’il s’agit d’un film qui amusera autant – voire plus – les enfants que les adultes.
Les sous-doués donc, avec sa machine à apprendre qui colle des baffes, ses méthodes de triche improbables et ses gags « physiques » qui semblent tout droit sortis d’un cartoon de Chuck Jones. Conçu sur un schéma narratif extrêmement simple, sans la moindre idée de sophistication dans l’humour ou de recherche particulière de l’effet comique, le scénario de Didier Kaminka, Claude Zidi et Michel Fabre est cependant parvenu à traverser les années, peut-être tout simplement parce que le système scolaire n’a pas énormément changé en l’espace de quarante ans, et que le bac demeure toujours un diplôme-charnière dans le cursus scolaire contemporain – et ce même si déjà en 1980, un des personnages du film affirmait « que j’aie le bac ou que je ne l’aie pas, derrière, ça sera le même chômage ». Les enjeux sont donc simples, et l’identification aux personnages fonctionne toujours : en fait, même les 4 / 12 ans se retrouveront sans peine dans cet enchainement de gags bon enfant, qui n’évite cependant pas les longueurs dans ses deux premiers tiers, un peu laborieux dans sa façon de poser les personnalités des différents protagonistes de l’intrigue.
Dans son dernier tiers cependant, le film de Claude Zidi s’envole, redoublant de fantaisie afin de provoquer, enfin, les rires attendus. Les gags cartoonesques s’enchainent, de même que les séquences « from outer space » typiques des années 80, au point que l’on finisse par se dire qu’aucun producteur n’oserait jamais les reproduire à l’identique aujourd’hui. Ainsi, et pour citer deux exemples précis, avec la séquence de la bombe dans la couscoussière, le film se moque ouvertement du terrorisme et des conflits au Moyen-Orient ; idem pour le gag durant lequel le personnage de Togo, l’africain, se fait souffler les réponses de l’épreuve orale de philosophie par son père, qui joue du tam-tam sous la fenêtre… Autre temps, autres mœurs : ces gags seraient aujourd’hui probablement considérés comme ouvertement racistes, et à l’ère des réseaux sociaux, auraient probablement valu des menaces de mort à Claude Zidi et son équipe. En revanche, le film s’avérera étonnamment moderne vis-à-vis de ses personnages féminins, qui disposent de leur corps comme bon leur semble sans que le moindre jugement ne soit jamais émis de la part des personnages ou du film en général. On peut donc supposer que Marlène Schiappa n’en demandera pas l’interdiction lors de sa prochaine diffusion TV !
Le Blu-ray
[4,5/5]
Alors qu’Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre reste toujours tristement inédit en France en Haute-Définition (malgré ses 14,5 millions d’entrées dans les salles en 2002), voici déjà une deuxième édition Blu-ray pour Les sous-doués, auquel Gaumont rend son titre original : l’édition précédente du film nous étaient proposée sous le titre Les sous-doués passent le bac, appellation « allongée » généralement utilisée pour éviter toute confusion avec le deuxième opus en 1982, et intitulé Les sous-doués en vacances. Intégrant à cette occasion la trentième-et-unième vague de la collection Blu-ray Découverte de chez Gaumont (aussi appelée Gaumont découverte en Blu-ray), le film de Zidi s’offre ici un nouveau transfert Haute-Définition, très supérieur à celui utilisé par EuropaCorp sur son édition de 2014. Le grain argentique est parfaitement respecté, les couleurs reprennent une patine nettement plus naturelle que sur le Blu-ray précédent : qu’il s’agisse de la définition, du piqué, des couleurs ou de la gestion des contrastes et la tenue des noirs, tout est indéniablement soigné, même si bien sûr les quelques séquences en basse lumière affichent un peu plus de grain que celles tournées de jour. En deux mots, c’est du très joli boulot technique. Côté son, le film nous est proposé dans un mixage DTS-HD Master Audio 2.0 d’origine, clair et sans souffle : c’est parfait !
Du côté des suppléments, on trouvera, en plus de la traditionnelle bande-annonce, un passionnant entretien croisé entre Didier Kaminka, dialoguiste du film, et Thibault Decoster, auteur du livre « Le cinéma de Claude Zidi » (27 minutes). Ils y reviendront sans trop de redondances sur la genèse du film, sur la façon dont Zidi a du produire le film lui-même, mais également sur le casting et l’ambiance détendue de l’entreprise, non seulement sur le tournage mais également durant les sessions d’écriture pour Didier Kaminka. Ce dernier révélera quelques anecdotes croustillantes, comme celle selon laquelle Zidi et lui surnommaient Michel Galabru « Galabrique », pour la simple et bonne raison qu’il était le seul acteur connu du film et demandait un salaire d’une « brique » par jour de tournage. De son côté, Thibault Decoster élargira en quelques mots sa réflexion sur le film au reste de l’œuvre de Claude Zidi, tout en se remémorant sa découverte, en VHS, des Sous-doués, en doublé avec Les bronzés. Et comme on soutiendra toujours les critiques ouverts d’esprit ne méprisant pas la comédie populaire française, on vous encourage vivement à découvrir son ouvrage intitulé « Le cinéma de Claude Zidi », disponible aux Editions Lettmotif : on en fera assurément de même !