Test Blu-ray : Les Maîtres de l’Univers

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Les Maîtres de l’Univers

États-Unis : 1987
Titre original : Masters of the Universe
Réalisation : Gary Goddard
Scénario : Stephen Tolkin, David Odell
Acteurs : Dolph Lundgren, Frank Langella, Meg Foster
Éditeur : Sidonis Calysta
Durée : 1h46
Genre : Fantastique
Date de sortie cinéma : 9 décembre 1987
Date de sortie DVD/BR : 5 juillet 2024

Durant des millénaires, le monde sauvage et magique d’Eternia a connu la paix. La sorcière du Château du Crâne Gris, Evil-Lyn, fut chargée de maintenir l’équilibre entre les forces du bien et les forces du mal. Mais la soif de pouvoir de l’infâme Skeletor eut bientôt raison de l’ensorceleuse. Le peuple d’Eternia refusa de se soumettre à ce tyran…

Le film

[3,5/5]

On l’a évoqué récemment à l’occasion de la sortie en 4K de Bloodsport – Tous les coups sont permis : petit à petit, les films produits par Yoram Globus et Menahem Golan pour le compte de la Cannon commencent à faire l’objet d’éditions Blu-ray sur le marché français. Les spectateurs nostalgiques des frissons ressentis durant les films de leur enfance seront donc aux anges à la redécouverte du film de Gary Goddard Les Maîtres de l’Univers. Distribué en France à la fin de l’année 1987, le film adapté des dessins animés mettant en scène le fameux « Musclor » avait attiré environ 510.000 petits et grands gamins dans les salles obscures : un score honorable pour un film qui, l’été précédent, s’était copieusement ramassé la gueule au box-office américain, ne récoltant que 17 millions de dollars pour un budget de 20 millions.

Pour autant, et en dépit des critiques assassines de l’époque, avec le temps, Les Maîtres de l’Univers a fini par se voir – au moins en partie – réhabilité. Avec le recul, on admettra que l’inverse eut été étonnant : à une époque où le cinéma adapté de comic-books est devenu une véritable institution, on voit mal comment les décors, le production design et même les compositions de plans que nous propose le film Gary Goddard n’auraient pu éveiller l’intérêt des amateurs de comics. Le cinéaste s’était en effet inspiré des créations de Jack Kirby : les Quatre Fantastiques, le Quatrième monde, les univers colorés de Thor… Même le visage de Skeletor évoque furieusement celui de Crâne Rouge, le fameux ennemi de Captain America. La légende autour du film affirme même que Goddard avait essayé – sans succès – de convaincre la Cannon d’engager Jack Kirby comme concepteur artistique.

Bien sûr, on sent d’autres influences planer au-dessus de cette version cinéma des Maîtres de l’Univers ; il y a pas mal de Star Wars là-dessous, période « Ewoks » (Le Retour du Jedi, La Caravane du Courage, La Bataille d’Endor), un peu de Conan le destructeur, un peu de Flash… Bref vous l’aurez compris, beaucoup de kitsch, et paradoxalement, très peu de Maîtres de l’Univers tels que le jeune public de l’époque les connaissait. En effet, l’histoire du film n’a plus rien à voir avec celle des dessins animés produits par Filmation pour Mattel en 1983/84 : l’univers a complètement été modifié, l’intrigue déplacée sur Terre, la plupart des personnages emblématiques de la série ont disparu, et d’autres ont spécialement été créés pour le film, dans un souci global de réduction des coûts pour la Cannon, qui était en fâcheuse posture financière à l’époque.

Exit donc l’univers fantasy haut en couleurs de la série, adieu Cringer et Panthor, et on ne trouvera non plus aucune trace d’Orko, le petit magicien volant et sidekick comique de la série, qui sera remplacé par le nain Gwyldor, inconnu au bataillon. Si le monstre, Tila, le maître d’armes ou Démonia font tous une apparition (parfois sous un nom différent) au fil de l’intrigue des Maîtres de l’Univers, les scénaristes ont ainsi préféré recréer de toutes pièces de nouveaux personnages que d’aller chercher parmi la riche galerie de ceux qui existaient déjà (Dentos, Bélios, Stratos, Triclops…). Avec le recul, la raison de cet anti-fan service apparaît clairement : les équipes de Gary Goddard et de la Cannon ne disposaient ni du budget ni des technologies nécessaires pour réaliser une adaptation en prises de vue réelles qui soit fidèle à la série d’origine.

Mais on le sait : toute adaptation est, par nature, une trahison, et puis, bon, n’oublions pas que l’on parle d’une série pour enfants, créée dans le but de faire de la pub pour une gamme de jouets Mattel. Bien entendu, tous ceux qui ont grandi au début des années 80 entretiennent probablement une certaine nostalgie autour des Maîtres de l’Univers, comme ils peuvent également en entretenir vis à vis de L’Inspecteur Gadget (1983-1986), MASK (1985-86), Robo Story (1985), Boumbo (1985-86) ou La Bande à Ovide (1987). Une nostalgie de l’enfance, doublée d’une douce impression que c’était mieux avant. Si vous êtes né aux alentours de l’année 1980 et que vous avez découvert Les Maîtres de l’Univers en salle, il y a même de grandes chances pour que vous ayez été très déçu, que vous vous soyez senti trahi, ou vaguement blousé par cette adaptation qui vous avait pris pour un con en retirant quasiment tous les meilleurs personnages pour son passage au cinéma. Il s’agit en effet une des explications ayant été avancées pour tenter d’expliquer l’échec public du film, mais avec quarante ans de recul, on sait maintenant que dès le début Mattel avait pris le jeune public devant sa télé pour un con avec sa publicité détournée prenant la forme de 130 épisodes de 21 minutes. De là à considérer toute la franchise Les Maîtres de l’Univers comme un immense piège à cons, il n’y a qu’un pas… Que l’on ne franchira pas.

En effet, on se rassurera plutôt en se disant que derrière la pub et l’opération mercantile détournée se cachaient une poignée d’artisans chevronnés (Paul Dini, Bruce Timm, J. M. Straczynski…), officiant à la fois sur la série animée et sur les mini-comics inclus dans les boites des figurines Mattel. De plus, au-delà de l’aspect ouvertement commercial du projet, les scénaristes et animateurs ayant chapeauté la série animée Les Maîtres de l’Univers bénéficiaient tout de même d’une certaine liberté créative : s’ils avaient été chargés par Mattel de créer une histoire et de donner une personnalité attachante à la ligne de figurines, ils ont en effet dépassé ce simple cadre en développant des personnages inédits, qui seraient seulement transposés par la suite en figurines : c’est le cas pour Adam, Orko, le roi Randor ou la sorcière.

De fait, les scénaristes du film Les Maîtres de l’Univers David Odell et Stephen Tolkin n’ont finalement fait que perpétuer la tradition en créant des personnages inédits et en emmenant l’intrigue générale dans une autre direction. Le résultat est un mélange unique d’esprit « bandes dessinées » et de film d’action, prenant comme point d’ancrage un affrontement entre Musclor (Dolph Lundgren) et Skeletor (Frank Langella), symboles de l’éternelle lutte du Bien contre le Mal. Pour d’évidentes raisons de contraintes budgétaires, l’intrigue du film quittera assez rapidement la planète Eternia pour débouler sur la Terre, où Musclor et sa clique rencontreront Courteney Cox, qui avait été révélée en 1984 dans le clip de la chanson « Dancing in the Dark » de Bruce Springsteen, réalisé par Brian De Palma.

Côté casting, Les Maîtres de l’Univers nous donne également à voir quelques autres têtes connues des cinéphiles : on commencera bien sûr par l’incontournable Meg Foster, présentée par les dialogues du film comme une femme « aux yeux bizarres », que l’on connait pour avoir joué dans le classique de John Carpenter Invasion Los Angeles, mais également dans Le Beau-père 2, Leviathan et plus récemment dans les films de Rob Zombie 31 ou Lords of Salem. On reconnaîtra également Robert Duncan McNeill, futur interprète du lieutenant Tom Paris dans Star Trek : Voyager, Chelsea Field, vue dans Prison, L’amour est une grande aventure, Harley Davidson et l’Homme aux santiags ou Le Dernier Samaritain, et Christina Pickles, qui, d’une façon amusante, incarnerait quelques années plus tard la mère de Courteney Cox dans la série Friends. Enfin, on ne pourra pas louper la prestation haute en couleurs de James Tolkan, inoubliable interprète du principal Strickland dans la trilogie Retour vers le futur (qui obtenait le titre de « Marshall » dans le troisième film de la saga).

Le Blu-ray

[4/5]

Après des années et des années d’attente, c’est donc aujourd’hui sous les couleurs de Sidonis Calysta que débarque enfin la première édition Haute-Définition française des Maîtres de l’Univers. Et côté Blu-ray, le résultat est globalement à la hauteur de nos attentes : l’image a été débarrassée de toute tache ou poussière, le tout s’avère d’une stabilité impeccable, et la définition / le piqué sont très solides. Le transfert respecte par ailleurs à la lettre le grain argentique du film, qui a été soigneusement préservé, et l’encodage ne nous réserve aucune mauvaise surprise. Côté son, les deux mixages (VF/VO) encodés en DTS-HD Master Audio 2.0 proposent des dialogues dynamiques et bien équilibrés. Du beau travail, même si on a un peu de mal à comprendre pour quelle raison l’éditeur n’a pas offert au film de Gary Goddard les joies d’un packaging en Mediabook, comme il l’a fait récemment pour des films tels que From Beyond – Aux portes de l’au-delà ou L’Homme qui voulait savoir.

Côté bonus, on commencera par un intéressant entretien avec Jerry Chamand (37 minutes), grand collectionneur de figurines liées à la Pop Culture en général, et aux Maîtres de l’Univers en particulier. Il y évoquera bien entendu la ligne de jouets des années 80, mais également les mini-comics, le dessin animé et le film de Gary Goddard, qu’il a découvert à l’âge de seize ans – ce qui lui permit d’aborder l’expérience avec le recul nécessaire pour l’apprécier pleinement, en dépit des trahisons et autres différences flagrantes qui l’opposaient à la série animée. Il reviendra également sur les personnages, et plus précisément sur celui de Musclor, ainsi que sur les crossovers dans l’univers des comics, ayant notamment permis à Musclor d’affronter – et de vaincre – Superman. On continuera ensuite avec une featurette d’époque (4 minutes), qui reviendra sur l’adaptation cinématographique des Maîtres de l’Univers et, notamment, sur les nouveaux personnages spécialement créés à l’occasion du film. Enfin, en plus des traditionnelles bandes-annonces, on terminera le tour des suppléments avec un passionnant making of rétrospectif (12 minutes). Produit à l’occasion des vingt-cinq ans du film, le documentaire donnera la parole à une partie de l’équipe et sera l’occasion pour Gary Goddard de revenir sur les nombreux problèmes rencontrés sur le tournage.

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