Test Blu-ray : Les Intrus

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Les Intrus

États-Unis, Espagne : 2024
Titre original : The Stangers – Chapter 1
Réalisation : Renny Harlin
Scénario : Alan R. Cohen, Alan Freedland
Acteurs : Madelaine Petsch, Froy Gutierrez, Ema Horvath
Éditeur : Metropolitan Vidéo
Genre : Horreur
Durée : 1h31
Date de sortie cinéma : 15 mai 2024
Date de sortie DVD/BR : 12 septembre 2024

Lors d’un road-trip en amoureux, un jeune couple tombe en panne et doit s’arrêter dans un village reclus. Ils vont vivre une nuit de terreur en affrontant trois individus masqués, qui sans motif apparent, veulent les tuer…

Le film

[4/5]

Avec une note de 4.6/10 sur le site de référence IMDb (calculée sur plus de 17.000 votes), le moins que l’on puisse dire, c’est que Les Intrus semble aujourd’hui avoir des difficultés à trouver son public. À la lecture des quelques centaines de critiques des cinéphiles inscrits sur IMDb, le principal grief que semblent lui faire les internautes est d’être le remake de The Strangers. Sorti sur les écrans américains en 2008, mais directement en DVD de notre côté de l’Atlantique, le film de Bryan Bertino était un « Home Invasion » s’inscrivant dans la droite lignée de Ils (2006) et de Funny Games U.S. (2007). Il semble qu’il ait tout particulièrement marqué les mémoires en raison des masques utilisés par les tueurs, qui leur valurent les surnoms de Scarecrow, Dollface et Pin-Up Girl. En dépit d’un accueil critique mitigé lors de sa sortie, le film a aujourd’hui acquis un statut de « classique », ce qui explique peut-être en partie l’animosité d’une partie du public à la découverte de ce faux remake qu’est Les Intrus.

Cependant, l’attachement au film original n’explique que très partiellement la façon dont le public a reçu Les Intrus. Parce qu’en toute objectivité, pour ne pas voir à quel point le film de Renny Harlin surpasse EN TOUS POINTS son modèle, il faut soit – première solution : ne pas avoir vu The Strangers depuis très longtemps et n’avoir du film que des souvenirs fantasmés, soit – deuxième solution : vraiment avoir de la merde dans les yeux. Nan parce que Allo quoi, on se réveille les gars ?! À la sortie de The Thing en 1982, il y avait sans doute aussi une poignée de cinéphiles outrés qui poussaient des cries d’orfraie en jurant que La Chose d’un autre monde – c’est l’époque qui leur donne de la visibilité. Mais qu’on se rassure : dans vingt ans, tout le monde les aura oubliés, et on pourra restituer sa vraie place aux Intrus.

En d’autres termes, The Strangers c’était le brouillon, Les Intrus la version finale. Au propre. Plus de quinze ans après le film de Bryan Bertino, Renny Harlin permet enfin au concept du film original de s’offrir une mise en images digne de ce nom, avec une vraie photo qui claque, un sens du cadre absolument remarquable et surtout un remaniement narratif pour le moins singulier. En effet, Renny Harlin et ses deux scénaristes Alan R. Cohen et Alan Freedland ont fait le choix de transformer et d’enrichir le récit en le transformant en une trilogie : les trois films ont été tournés simultanément, et certains personnages apparaissant seulement au détour d’un plan dans ce premier chapitre (Ryan Bown, Richard Brake, Ema Horvath…) prendront assurément toute leur importance dans les deux suites à venir.

Pensée comme une porte d’entrée vers une histoire plus complexe et plus riche, l’intrigue de ce premier volet des Intrus reprend grosso modo l’histoire du premier film, en lui donnant néanmoins déjà un peu plus d’emphase et en enrichissant le background autour des tueurs. Le récit est centré sur un couple séjournant dans une maison isolée, qui n’est plus ici la maison d’enfance du héros mais un AirBnb à Venus, une petite ville de l’Oregon. Le couple est composé de Maya (Madelaine Petsch) et Ryan (Froy Gutierrez). Leur soirée est interrompue par une mystérieuse silhouette qui se frappe à leur porte pour poser la désormais célèbre question : « Est-ce que Tamara est là ? ». Même si le couple central n’a plus grand-chose à voir avec le couple en crise du film de 2008, Les Intrus suivra en partie le même schéma narratif que le film original, avec une poignée de rebondissements similaires.

La différence vient surtout du fait que Renny Harlin, technicien chevronné, atomise littéralement la mise en scène statique de Bryan Bertino. Les procédés cinématographiques et stylistiques que le cinéaste finlandais utilise pour distiller la peur sont remarquables, et la photo de José David Montero (Hell Fest) est régulièrement magnifique, utilisant les zones d’ombre de façon extrêmement efficace. Le cadre en Scope est somptueux, et certains plans dénotent vraiment d’une « vision » très supérieure à celle de son modèle. Les angles de la caméra jouent très habilement sur la notion de voyeurisme, jouant avec les attentes du spectateur tout en lui donnant régulièrement l’impression d’être dans la peau de ces « Intrus » qui scrutent leurs proies. À moins que Les Intrus du titre ne désignent pas les tueurs, mais ces « gens de la ville », ce couple un peu bobo arrivé en ville au volant de leur voiture électrique ?

Dans son premier acte en effet, Les Intrus s’amuse en effet à mettre en évidence cette éternelle opposition entre l’Amérique rurale et celle des grandes villes, et les différences entre les gens « simples » habitant Venus et ces New-Yorkais qui commandent des hamburgers sans viande sont soulignées tout au long du métrage. Le film de Renny Harlin parvient d’ailleurs assez bien à installer un climat tendu, en prenant le temps de présenter ses personnages de façon satisfaisante, puis en laissant lentement s’installer la menace au cœur des plans. Cela commencera avec des petits détails dans le champ, puis cela se précisera avec des personnages apparaissant dans le champ, un des plans les plus impressionnants – et les plus glaçants – du film nous donnant à voir Maya jouer du piano tandis que le miroir au-dessus d’elle nous renvoie le reflet d’un personnage assis derrière elle… Et que dire de cette forêt de cauchemar et semblant se prolonger à perte de vue, à la façon de celle que l’on aperçoit au début du Suspiria de Dario Argento ?

C’est avec ce genre de petits détails visuels que Les Intrus marquera sans doute le plus les mémoires, tout autant que grâce à une poignée de séquences absolument inédites, telles que celle suivant la traversée d’un vide sanitaire sous la maison, et qui nous propose un sublime plan latéral permettant au spectateur de voir les deux niveaux de la maison sans plan de coupe. On pense aussi à cette scène épatante qui met en scène la fuite et le « camouflage » improvisé de Maya dans la forêt. Deux séquences qui nous montrent non seulement que de nouvelles choses sont encore à découvrir au cœur d’un genre dont on croyait avoir fait le tour, mais également à quel point la « vision » de cinéaste de Renny Harlin était sans aucun doute possible la meilleure chose qui pouvait arriver à la franchise.

Par ailleurs, comme son modèle, Les Intrus ne révèle ni l’identité des trois tueurs, ni les raisons qui les motivent à jouer à ces petit jeux sadiques avec Maya et Ryan, ce qui tend bien entendu à souligner que la violence et la sauvagerie n’ont besoin d’aucune justification, comme le souligne le panneau au début du film, qui pousse même le vice jusqu’à citer le nombre d’agressions mortelles ayant pris place aux États-Unis depuis le début du film. Pour autant, on peut supposer que l’un des enjeux narratifs des deux prochains épisodes sera bel et bien la découverte de l’identité des tueurs – qui parmi la foule de personnages interlopes croisés dans le Carol’s Diner et le garage de Rudy se cache derrière les masques ? S’agit-il de Carol (Janis Ahern), qui n’apprécie pas que l’on modifie son menu ? S’agit-il d’Eden et Neil (Rafaella Biscayn / Pablo Sandstrom), qui les jugent parce qu’ils ne sont pas mariés ? Ou peut-être faut-il chercher du côté du shérif Rotter (Richard Brake) et de son adjoint Walters (Pedro Leandro), qui les surveillent du coin de l’œil, ou des mécaniciens Rudy (Ben Cartwright) et Dougie (Stevee Davies), qui ne semblent pas très enthousiastes à l’idée de réparer la voiture à 70.000 dollars de Ryan ? A moins qu’un des masques ne cache la serveuse Shelly (Ema Horvath), qui a soumis au couple l’idée de passer la nuit dans la maison des bois ?

Du côté du casting, si on regrette forcément un peu de ne pas avoir pu suffisamment profiter du jeu enfiévré de l’excellent Richard Brake, les deux acteurs principaux s’en sortent de façon assez remarquable, avec une mention particulière à Madelaine Petsch, qui est fantastique. S’étant fait connaître grâce à la série Riverdale, elle s’impose ici comme une excellente Scream Queen, s’engageant dans chaque cri et dans chaque frémissement de lèvres. Dans le rôle de Ryan, Froy Gutierrez (Teen Wolf) nous livre également une prestation solide, et ce même si son personnage est un peu plus difficile à défendre. Bien que la dynamique de leur couple ne soit pas suffisamment explorée pour que le spectateur puisse se créer un lien émotionnel étroit avec les personnages, on éprouvera suffisamment d’empathie pour eux pour que ces derniers parviennent à nous transmettre leur terreur, même si, comme dans beaucoup de films d’horreur, la rationalité des personnages est sujette à débat (pourquoi aller se planquer à l’étage plutôt que de sortir de la maison, pourquoi hurler plutôt que de descendre de voiture, etc, etc), mais leurs mauvaises décisions peuvent toujours être mises sur le compte de l’émotion.

Peu importe ce que nous réserve le futur de la franchise, Les Intrus a su trouver l’équilibre parfait entre les éléments recyclés du film de 2008 et les nouveautés, au cœur d’un film d’horreur imaginatif, tendu et très soigné formellement. De plus, le scénario d’Alan R. Cohen et Alan Freedland pose les bases d’une histoire étonnante et ambitieuse dont on est vraiment impatient de découvrir les ramifications dans les deux prochains épisodes de la franchise, qui devraient logiquement sortir d’ici quelques mois. Étant donné que les trois films de la trilogie ont été tournés simultanément par Renny Harlin et son équipe, on peut raisonnablement penser que l’on passera à nouveau un très bon moment…

Le Blu-ray

[4/5]

Les Intrus vient de sortir au format Blu-ray sous les couleurs de Metropolitan Vidéo. Comme à son habitude, l’éditeur nous offre un master Haute-Définition quasiment irréprochable : les séquences de jour affichent un piqué redoutable, des couleurs naturelles et un niveau de détail assez époustouflant. Les passages nocturnes s’avèrent également convaincants en diable : le niveau de détail est excellent, et la précision est toujours de mise. Du grand Art ! Coté enceintes, comme toujours chez l’éditeur, VF et VO sont toutes deux encodées en DTS-HD Master Audio 5.1, dans des mixages fins et habilement spatialisés. L’ensemble est naturellement riche en basses, en gros surrounds et effets multi-directionnels à gogo. L’ensemble est très spectaculaire et immersif, quelle que soit la langue choisie.

Dans la section suppléments, Metro nous permettra tout d’abord de découvrir un commentaire audio du film par le producteur Courtney Solomon et l’actrice Madelaine Petsch – malgré l’absence de sous-titres, il faut noter que les deux intervenants nous révéleront quelques éléments intéressants : on aura notamment la confirmation que Jeff Morrell (Ryan Bown) et Debbie (Rachel Shenton), qui n’apparaît dans Les Intrus qu’à l’occasion d’une brève scène d’appel téléphonique en « visio », auront un rôle beaucoup plus important dans les deux prochains films. Quelques petites anecdotes de tournage seront également de la partie, nous apprenant que c’est vraiment Madelaine Petsch qui joue du piano à l’écran, que les rats que l’on voit durant la scène du vide sanitaire sont bien réels, de même que la réaction de surprise de l’actrice lorsque le tueur surnommé Scarecrow casse la fenêtre pour l’attraper, et pour cause : Madelaine Petsch n’avait pas été mise au courant que l’acteur allait débarquer par la fenêtre…

On continuera ensuite avec un intéressant making of (17 minutes), qui permettra à l’équipe d’évoquer la philosophie de ce remake/reboot/réimagination de The Strangers, qui pour l’occasion est présenté comme un véritable « classique ». Ce sujet sera complété par un focus sur le design visuel du film, et donnera largement la parole à Renny Harlin et à son directeur photo José David Montero. On terminera enfin par une galerie de photos (6 minutes), une note d’intention écrite du réalisateur, et la traditionnelle bande-annonce. On notera également la présence, en avant-programme, de la bande-annonce de l’excellent Hell Fest.

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