Les Guetteurs
États-Unis : 2024
Titre original : The Watchers
Réalisation : Ishana Shyamalan
Scénario : Ishana Shyamalan
Acteurs : Dakota Fanning, Georgina Campbell, Olwen Fouéré
Éditeur : Warner Bros.
Durée : 1h42
Genre : Fantastique
Date de sortie cinéma : 12 juin 2024
Date de sortie DVD/BR : 16 octobre 2024
Perdue dans une forêt, Mina trouve refuge dans une maison déjà occupée par trois personnes. Elle va alors découvrir les règles de ce lieu très secret : chaque nuit, les habitants doivent se laisser observer par les mystérieux occupants de cette forêt. Ils ne peuvent pas les voir, mais eux regardent tout…
Le film
[3,5/5]
2024 sera-t-elle l’année Shyamalan ? Outre bien sûr les sorties 4K de Sixième Sens et de Signes qui se profilent à l’horizon, cet été au cinéma, on a donc eu droit à deux Shyamalan pour le prix d’un : tout d’abord le papa, M. Night Shyamalan, avec Trap, une traque au serial killer prenant place dans une salle de concert, et dans la famille Shyamalan, je demande la fille ? Bonne pioche, on a également découvert Ishana Shyamalan, 25 ans, qui signait son premier long-métrage avec Les Guetteurs.
Au petit jeu de la rentabilité au Box-office international, le père M. Night Shyamalan garde encore largement l’avantage par rapport à sa fille : à budget équivalent, Trap a réalisé 75 millions de dollars de recettes et attiré plus de 915.000 français dans les salles, tandis que Les Guetteurs n’a fait « que » 31 millions de dollars et n’a enregistré qu’un peu plus de 184.000 entrées en France. Pour son premier long-métrage, Ishana Shyamalan signe non seulement la réalisation mais également le scénario de son film – une adaptation pour l’écran d’un roman d’A.M. Shine, auteur irlandais spécialisé dans le fantastique « folklorique », dont les œuvres ont été traduites dans plusieurs pays, mais pas en France. Pour l’essentiel, après nous avoir présenté un personnage incarné à l’écran par Dakota Fanning (une ex-enfant star que l’on avait découverte dans Man on Fire et dans la saga Twilight), le film suivra la trajectoire de quatre personnages piégés dans une situation d’emprisonnement clairement teintée de fantastique.
Les Guetteurs est un film atmosphérique, visuellement assez réussi. Le « Production Design » est très soigné, et son impact est encore renforcé par une photo assez superbe signée Eli Arenson, ainsi que par un travail sur le son, mais les modifications apportées par Ishana Shyamalan à l’histoire d’origine, et principalement celle qui tend à faire de l’héroïne du film Mina une américaine en « exil » forcé en Irlande, est assez problématique en termes d’identification.
Car Mina, qui se veut la porte d’entrée du spectateur sur l’univers des Guetteurs, est un personnage complexe : engourdie par un horrible accident survenu dans son passé, elle s’est installée en Irlande pour échapper à tout ce qui la poursuit, et éviter tout contact avec sa sœur jumelle Lucy. Voulant le plus possible s’éloigner d’elle-même, elle possède une collection de perruques qui lui permettent de changer d’identité à sa guise, notamment lorsqu’elle rencontre des hommes avec qui elle enchaîne les relations sans lendemain. En vérité, il s’agit d’un personnage vivant telle un zombie, donnant l’impression d’être constamment en transe et détaché de toute notion de réalité. Dakota Fanning parvient parfaitement à rendre ce sentiment à l’écran, et étant donné la thématique du film, on comprend bien l’idée de Shyamalan de nous proposer un personnage victime d’un double enfermement : à la fois captive dans la forêt et prisonnière de son propre passé.
Malheureusement, cette présentation du personnage marque également les limites du film : en dépit du potentiel dramatique lié à l’histoire de la jeune femme, le spectateur ne parvient jamais à s’identifier à elle, et observera de fait Les Guetteurs avec un recul qui l’empêchera réellement d’entrer pleinement dans le récit. Par conséquent, il faut attendre longtemps pour que quelque chose se passe réellement à l’écran, et bien que le scénario contienne un certain nombre d’idées intéressantes, Ishana Shyamalan peine à les rendre vivantes. Plus investie dans l’aspect visuel de son œuvre que dans son déroulement narratif, la jeune cinéaste en oublie de donner du rythme à l’ensemble : au lieu d’installer au fur et à mesure ses éléments d’horreur folklorique, le film s’éternise sur ses scènes d’exposition, étirées au-delà de toute limite raisonnable.
Ishana Shyamalan nous propose tout de même une poignée de bons moments dans Les Guetteurs, notamment en termes de style, se débrouillant bien avec les images du « Poulailler », un immense bunker de béton au milieu de nulle part, avec un miroir géant sans tain forçant les habitants à se voir eux-mêmes, et n’entendant les créatures appelées « Guetteurs » se rassembler qu’une fois la nuit tombée. Et malgré des effets spéciaux très moyens, Les Guetteurs finira bon gré mal gré par atteindre sa destination, mais la conclusion amenée au récit s’avérera assez plate et peu satisfaisante : dommage, car le concept était prometteur, et que le soin apporté par Ishana Shyamalan à sa mise en forme visuelle est vraiment absolument remarquable.
Le Blu-ray
[4/5]
Le Blu-ray Les Guetteurs édité par Warner Bros. s’avère un exemple époustouflant de l’excellence du support Haute-Définition en matière d’immersion et de confort de visionnage, surtout en ce qui concerne ce type de films visuellement chiadés. Pas la peine de chercher la petite bête, le transfert du film d’Ishana Shyamalan est littéralement sublime et ne pourra être pris en défaut : le Blu-ray nous propose un piqué, des textures et des couleurs d’une richesse impressionnante. Même sur les plans larges, c’est impeccable, irréprochable, avec des noirs profonds et une profondeur de champ exceptionnelle. Côté enceintes, c’est un feu d’artifice sonore ininterrompu et époustouflant avec une VO encodée en Dolby Atmos, qui sera décodée, faute de matériel adéquat, en Dolby TrueHD 7.1 : le mixage en envoie plein les esgourdes et fait littéralement trembler les murs pendant les scènes mettant en scène les Guetteurs. En comparaison, la VF, proposée en Dolby Digital 5.1, est logiquement très en dessous de la version originale. Cependant, le mixage se démène tout de même pour remuer le spectateur dans son fauteuil : le caisson de basses ne connait pas le repos, et les effets multicanaux rivalisent de puissance et de finesse. Un très beau Blu-ray.
Comme souvent avec les Blu-ray édités par Warner, la section suppléments s’avère particulièrement informative et sympathique, avec des bonus très ludiques et agréables. On commencera avec un intéressant making of (9 minutes), qui reviendra sur l’écriture du film, la photo d’Eli Arenson et bien sûr les acteurs. On continuera ensuite avec un focus plus particulièrement centré sur les Guetteurs (5 minutes). Ainsi, si vous n’aviez pas eu le temps de les compter pendant le film, vous apprendrez qu’ils sont au nombre de cinq, et tous très différents dans leurs mouvements. On reviendra ensuite sur la construction du poulailler (6 minutes), qui a nécessité de gros efforts de la part de l’équipe technique, notamment en raison de son immense vitre. On embrayera avec un entretien avec l’auteur du livre A. M. Shine (4 minutes), qui reviendra sur ses recherches dans le folklore irlandais et soulignera l’implication d’Ishana Shyamalan dans le projet, et on terminera avec la version longue des scènes tournées pour l’émission de téléréalité La Tanière de l’amour (10 minutes), qui s’avèrent plus vraies que nature et dénotent indéniablement d’une profonde connaissance de ce type de programmes de la part d’Ishana Shyamalan.
