Les grandes manœuvres
France, Italie : 1955
Titre original : –
Réalisation : René Clair
Scénario : Jérôme Géronimi, Jean Marsan
Acteurs : Gérard Philipe, Michèle Morgan, Brigitte Bardot
Éditeur : Coin de mire Cinéma
Durée : 1h48
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie cinéma : 26 octobre 1955
Date de sortie DVD/BR : 9 avril 2021
Armand de La Verne, jeune et beau lieutenant au 33ème Dragons et Don Juan invétéré, a fait le pari devant tout son régiment de séduire à coup sûr la première femme venue… Il tombe sur Marie-Louise à qui il fait une cour empressée. Mais sa proie a appris le pacte grossier dont elle fait l’objet. Elle ferme sa porte, n’ouvre pas ses lettres, refuse ses fleurs. Pour la première fois de sa carrière, Armand est déconcerté par la résistance d’une femme qui semble voir clair dans son jeu. Il tombe amoureux pour la première fois..
Le film
[4,5/5]
Le romantisme et les histoires d’Amour tiennent une place de choix dans la filmographie de René Clair, cinéaste poétique par excellence. Avec Les grandes manœuvres, son premier film en couleurs, il signe en 1955 ce qui s’imposera peut-être comme le plus beau film romantique de toute sa carrière. Réunissant à l’écran un duo d’acteurs en passe de figurer parmi les plus grandes légendes du cinéma français : Gérard Philipe et Michèle Morgan.
A la fois extrêmement drôle et développant un lyrisme passionné dans sa description du sentiment amoureux, Les grandes manœuvres s’impose, par sa construction narrative et par sa remarquable modernité, comme un brillant ancêtre de la comédie romantique contemporaine. René Clair parvient en effet avec un talent étonnant à rendre les personnages attachants par le biais de l’humour, et ce malgré leurs défauts. L’alternance de scènes romantiques et de discussions entre hommes d’une part, entre femmes de l’autre, permettra au récit de dessiner à merveille les personnalités de chacun des protagonistes.
De ce fait, les personnages principaux, de même que les seconds rôles (Jean Desailly, Yves Robert, Brigitte Bardot…), parviendront sans peine à exister bien au-delà du simple « livre d’images » – par ailleurs somptueux – proposé par René Clair, et Les grandes manœuvres de se montrer véritablement déchirant dans son dernier acte.
A ce titre, la prestation de Michèle Morgan est comme d’habitude très émouvante – l’actrice n’avait en effet pas son pareil pour exprimer à l’écran la douleur d’un amour condamné, comme elle le montrerait également à travers des films tels que Le miroir à deux faces d’André Cayatte ou dans le très beau Maxime d’Henri Verneuil, tous deux tournés en 1958.
Les grandes manœuvres est d’autant plus remarquable que formellement, la direction artistique ainsi que la mise en scène de René Clair s’avèrent littéralement irréprochables. La photographie du film, signée Robert Le Febvre, Robert Juillard et Daniel Diot, contribue à lui donner cachet et caractère, de même que la fluidité générale de la mise en scène, qui lui confère une énergie et une fougue étonnantes. Afin de ne pas plonger à pieds joints dans un pathos trop appuyé, René Clair fait le choix de mettre en parallèle l’intensité de la relation se nouant entre Armand et Marie-Louise (Gérard Philipe et Michèle Morgan) avec celle, plus légère, entre Leroy et Lucie (Yves Robert et Brigitte Bardot).
L’équilibre entre les éléments comiques et l’intensité de la passion est parfait, et ce même si le jeu de Gérard Philipe s’avère sans doute par moments un poil trop théâtral – cela dit, on pourra arguer que le lieutenant De la Verne est lui-même un « cabotin », en particulier dans les relations qu’il entretient avec le beau sexe. Un bien maigre petit défaut pour un véritable petit joyau du film romantique.
La collection « La séance »
Depuis l’automne 2018, l’éditeur Coin de mire Cinéma propose avec régularité au public de se replonger dans de véritables classiques du cinéma populaire français, tous disponibles au cœur de sa riche collection « La séance ». En l’espace de ces deux années de passion, le soin maniaque apporté par l’éditeur à sa sélection de films du patrimoine français a clairement porté ses fruits. Ainsi, Coin de mire est parvenu à se faire, en peu de temps, une place de tout premier ordre dans le cœur des cinéphiles français. L’éditeur s’impose en effet comme une véritable référence en termes de qualité de transfert et de suppléments, les titres de la collection se suivent et ne se ressemblent pas, prouvant à ceux qui en douteraient encore la richesse infinie du catalogue hexagonal en matière de cinéma populaire. Une telle initiative est forcément à soutenir, surtout à une époque où le marché de la vidéo « physique » se réduit comme peau de chagrin d’année en année.
Chaque titre de la collection « La séance » édité par Coin de mire s’affiche donc dans une superbe édition Combo Blu-ray + DVD + Livret prenant la forme d’un Mediabook au design soigné et à la finition maniaque. Chaque coffret Digibook prestige est numéroté et limité à 3.000 exemplaires. Un livret inédit comportant de nombreux documents d’archive est cousu au boîtier. Les coffrets comprennent également la reproduction de 10 photos d’exploitation sur papier glacé (format 12×15 cm), glissés dans deux étuis cartonnés aux côtés de la reproduction de l’affiche originale (format 21×29 cm). Chaque nouveau titre de la collection « La séance » s’intègre de plus dans la charte graphique de la collection depuis ses débuts à l’automne 2018 : fond noir, composition d’une nouvelle affiche à partir des photos Noir et Blanc, lettres dorées. Le packaging et le soin apporté aux finitions de ces éditions en font de véritables références en termes de qualité. Chaque coffret Digibook prestige estampillé « La séance » s’impose donc comme un superbe objet de collection que vous serez fier de voir trôner sur vos étagères.
L’autre originalité de cette collection est de proposer au cinéphile une « séance » de cinéma complète, avec les actualités Pathé de la semaine de la sortie du film, les publicités d’époque (qu’on appelait encore « réclames ») qui seront bien sûr suivies du film, restauré en Haute-Définition, 2K ou 4K selon les cas. Dans le cas des Grandes manœuvres, il s’agit d’une restauration 4K réalisée par TF1 Studio avec la participation du CNC, de Coin de mire Cinéma et d’OCS.
La septième vague de la collection « La séance » sera disponible à partir du 9 avril 2021 chez tous vos dealers de culture habituels. Les six nouveaux films intégrant la collection la portent aujourd’hui à un total de 43 titres. Les six films de cette « nouvelle vague » sont donc Souvenirs perdus (Christian-Jaque, 1950), Fanfan la tulipe (Christian-Jaque, 1952), Brelan d’as (Henri Verneuil, 1952), Les grandes manœuvres (René Clair, 1955), La poudre d’escampette (Philippe De Broca, 1971) et Les granges brûlées (Jean Chapot, 1973). Pour connaître et commander les joyaux issus de cette magnifique collection, on vous invite à vous rendre au plus vite sur le site de l’éditeur.
Le coffret Digibook prestige
[5/5]
Coin de mire Cinéma propose donc aujourd’hui aux cinéphiles français de redécouvrir Les grandes manœuvres sur support Blu-ray, et dans un nouveau master 4K absolument superbe. Le piqué est d’une belle précision, le grain cinéma est parfaitement préservé, et couleurs et contrastes semblent avoir été tout particulièrement soignés, que même que les noirs, qui affichent une tenue remarquable. L’ensemble est donc plus que recommandable, surtout étant donné la force du film. Rien à redire non plus sur le mixage audio, proposé en DTS-HD Master Audio 2.0 mono d’origine, clair et sans souffle. Un superbe travail technique.
Dans la section suppléments, l’éditeur nous propose, outre la traditionnelle et inévitable bande-annonce du film, la possibilité de faire un bond dans le passé en reconstituant dans son salon l’intégralité d’une séance de cinéma d’époque – sans l’ouvreuse cela dit. On commencera donc la séance avec les Actualités Pathé de la 43ème semaine de l’année 1955 (8 minutes). Au menu du journal, démonstration sportive sur la place Saint-Pierre de Rome, championnat de monde de pêche sous-marine, congrès international des clubs de publicité, premier tirage du quotidien L’express, nouvel avion chasseur avec aide à la visée, et retour au pays de 600 prisonniers allemands détenus en Russie depuis la fin de la guerre – ce qui nous vaudra une belle leçon de morale humaniste. On continuera ensuite avec, entre autres, un retour sur les inondations de Tampico au Mexique ou la remise de la Légion d’Honneur à Jean Mineur. On terminera par une une visite de René Coty à Dunkerque, avec un passage par Douai pour voir le géant Gayant, à Waziers puis à Lille.
Après la bande-annonce des Évadés (lire notre article), l’éditeur nous propose de continuer notre immersion dans le passé avec une page de réclames publicitaires de cette année 1955 (9 minutes). On commencera avec les chocolats glacés Miko, les caramels z’et bonbons de chez Dupont D’Isigny, Martial, Menier et Krema pour enchainer avec un sympathique dessin animé faisant la promotion des bonbons Mint’Ho de Krema. Cela sera ensuite au tour des serviettes Jalla, avec lesquelles se frotter le dos, puis aux gaines Tourbillon, qui « affinent les formes et maintiennent sans contrainte », et on passera au pantalon Nec plus ultra, avec ceinture intégrée (!!). Place ensuite à la cuisine, avec la bouffe pour chats Felix, la bouffe pour chiens Bonzo, un bon cocktail Gordon Gin’s et Vermouth et les réfrigérateurs Sigma. On terminera enfin avec un autre dessin animé mettant en scène Saint-Antoine de Padoue et… Saint-Yorre.
On notera également la présence en supplément d’une fin alternative inédite (1 minute). Encore plus dramatique que celle pour laquelle a opté René Clair, cette fin prend également place pendant le défilé des Grandes Manœuvres, sous la fenêtre Marie-Louise. Alors qu’Armand scrute une fenêtre désespérément vide, la caméra s’avance lentement… nous permettant de découvrir que le personnage incarné par Michèle Morgan s’est suicidé ! A découvrir.