Test Blu-ray : Les forbans de la nuit

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Les forbans de la nuit

 
 
Royaume-Uni : 1950
Titre original : Night and the city
Réalisation : Jules Dassin
Scénario : Jo Eisinger
Acteurs : Richard Widmark, Gene Tierney, Googie Withers
Éditeur : Wild Side Vidéo
Durée : 1h36
Genre : Policier, Thriller
Date de sortie cinéma : 29 décembre 1950
Date de sortie DVD/BR : 27 mars 2019

 

Harry Fabian rêve de devenir une personnalité du monde de la nuit. Avec Gregorius, un ancien champion de lutte, il décide d’organiser des spectacles nocturnes, malgré la désapprobation de Kristo, le fils de ce dernier. Ne pouvant payer la somme escomptée, Harry fait appel à Helen qui l’aime secrètement. Mais le premier combat tourne au drame et Gregorius succombe à une attaque cardiaque. Fou de rage, Kristo accuse Harry d’être le responsable de la mort de son père et lance ses hommes à sa poursuite…

 


 

Le film

[5/5]

Troisième film de la « trilogie urbaine » de Jules Dassin (après La cité sans voiles en 1948 et Les bas-fonds de Frisco en 1949), Les forbans de la nuit s’impose comme un flamboyant archétype des qualités esthétiques et thématiques du « Film Noir » dans son ensemble. Tout d’abord le film nous propose un récit d’arnaque et de gangsters bien ficelé, tournant autour d’un escroc ambitieux mais poissard, dont les plans tournent de plus en plus mal et l’envoient au cœur d’une vertigineuse spirale d’échec. Les personnages sont d’ailleurs aussi sombres que le décor dans lequel ils évoluent : vénaux, veules, revanchards, aucun d’entre eux ne s’attirera réellement la sympathie du spectateur, d’autant que le film de Jules Dassin, sans concession, n’hésite pas à proposer une représentation très sombre de Londres et de ses bas-fonds, où les gangsters font leur propre loi en toute impunité, sans jamais être inquiétés par la police. Bien sûr, il y a aussi ce personnage de « Femme Fatale » (Gene Tierney), qui provoquera en partie la chute du personnage principal, incarné par un Richard Widmark fiévreux et halluciné.

Noir c’est noir… Nous sommes donc en plein Film Noir. L’atmosphère est lourde, le climat sordide, et la vision de Londres proposée par Jules Dassin n’a absolument rien du guide touristique : les bas-fonds de la ville nous sont présentées de la manière la plus crue possible. On navigue en effet ici dans le Londres interlope, capitale du vice où règnent les petites frappes, les arnaques et les trafics en tous genres, au point même que certains y organisent leur « petite entreprise » de mendiants, avec des faux mutilés de guerre. Le cynisme et la caricature sont certes un peu de la partie, mais cette façon qu’a Jules Dassin de forcer légèrement le trait contribue à donner au film ce sentiment de ville dangereuse, où chaque recoin peut être potentiellement mortel, et au cœur de laquelle on ne fait finalement que fuir les menaces, dans un constant sentiment d’urgence. D’ailleurs, Les forbans de la nuit s’ouvre sur une séquence dans laquelle Harry (Richard Widmark) est poursuivi par un mystérieux agresseur, et se terminera également sur la traque du même personnage, dans les ruelles labyrinthiques de cette ville aussi mortelle qu’étouffante. Tout le film d’ailleurs pourra se résumer à ces deux séquences, le personnage d’Harry courant tout au long du film pour sauver sa peau de minable en quête d’un peu reconnaissance et de respect.

Unanimement reconnu comme un des plus grands Films Noirs jamais tournés (il affiche tout de même la note de 8/10 sur le site de référence IMDb), Les forbans de la nuit n’a pas pris une ride, malgré les 70 années qui nous séparent de sa sortie dans les salles : une œuvre intense, mélangeant le naturalisme et le baroque, et s’imposant sans peine grâce à un découpage nerveux et un sens du cadre vraiment remarquable. Un chef-d’œuvre du genre !

 

 

Le coffret Blu-ray

[5/5]

Wild Side Vidéo nous gâte à nouveau aujourd’hui avec la sortie « événement » des Forbans de la nuit dans un nouveau coffret exceptionnel venant grossir les rangs de sa déjà riche collection de coffrets « luxe » dédiés à différents films et réalisateurs – il semblerait que peu à peu, Wild Side soit en train de créer une collection que l’on pourrait comparer à la prestigieuse collection « CRITERION » aux États-Unis.

Cette nouvelle livraison comportera donc comme d’habitude à la fois le film sur support DVD et Blu-ray. Le film bénéficie d’ailleurs d’un superbe upgrade HD. La restauration a fait place nette de toutes les tâches et autres imperfections liées au temps, et le Blu-ray nous propose aujourd’hui un piqué précis tout en conservant le grain d’origine et une stabilité exemplaire. La photo nocturne et très urbaine de Max Greene est littéralement sublimée, la profondeur de champ ne pose pas de souci, bref, le boulot a été fait -et bien fait- pour que nous puissions (re)découvrir Les forbans de la nuit dans les meilleures conditions possibles. Du côté des enceintes, VF d’époque et VO anglaise nous sont proposées, en DTS-HD Master Audio 2.0, en mono d’origine évidemment. Les dialogues sont clairs, les ambiances plutôt bien préservées, sans souffle. Si l’on a une préférence la version originale, plus naturelle et plus ample, la version française contient néanmoins quelques expressions typiques des années 50 qui dégagent un charme suranné assez irrésistible.

 

 

En plus d’être un bel objet, le coffret édité par Wild Side n’est d’ailleurs pas avare en suppléments et autres contenus inédits : outre un livre grand format de 220 pages signé Philippe Garnier (que nous n’avons malheureusement pas eu le plaisir d’avoir entre les mains), on trouvera donc sur la galette un long entretien avec Glenn Erickson, spécialiste du film noir, qui reviendra en un peu plus de quarante minutes sur le contexte de tournage d’un film qu’il apprécie visiblement beaucoup. Enfin, en plus de la traditionnelle bande-annonce, Wild Side nous propose également de voir ou revoir une émission de TV anciennement diffusée sur Ciné Classics, Le Club, présentée par Jean-Jacques Bernard. Dans cette agréable émission de 1999 Bernard et sa bande de chroniqueurs (Denis Parent, Christine Haas et Jean Ollé-Laprune) avaient l’honneur de recevoir Jules Dassin, qui s’exprimait sur sa carrière.

Last but not least : on notera que Wild Side nous propose également dans cette édition de découvrir la version britannique du film, qui durait cinq minutes de plus, avec une fin plus optimiste et une partition complètement différente. Jules Dassin avait approuvé la version américaine comme étant plus proche de « sa » vision de cinéaste.

 

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