Les Envahisseurs de la planète rouge
États-Unis : 1953
Titre original : Invaders from Mars
Réalisation : William Cameron Menzies
Scénario : Richard Blake
Acteurs : Helena Carter, Arthur Franz, Jimmy Hunt
Éditeur : Sidonis Calysta
Durée : 1h19
Genre : Science-fiction
Date de sortie cinéma : 4 janvier 1963
Date de sortie BR/DVD : 21 novembre 2023
Une nuit, alors qu’il est à la fenêtre de sa chambre, le jeune David McLean, passionné d’astronomie, aperçoit un engin spatial qui se pose près de sa maison. Il prévient son père George McLean, un scientifique, qui part investiguer les lieux. Revenu du site suspect, celui-ci n’est désormais plus tout à fait le même. David soupçonne une emprise extraterrestre. Et, très vite, celle-ci s’étend, transformant les habitants de la localité en marionnettes humaines…
Le film
[4/5]
Réalisé et sorti sur les écrans en 1953, soit la même année que La Guerre des Mondes version Byron Haskin, Les Envahisseurs de la planète rouge n’a pas forcément eu le même impact immédiat que le film adapté du célèbre roman de H.G. Wells. En France, le film de William Cameron Menzies n’a par exemple été exploité que dans le Nord de la France en 1963, grâce à des copies venues de Belgique où le film avait été distribué sous le titre L’Attaque des martiens.
Cependant, si Les Envahisseurs de la planète rouge ne possède pas tout à fait la même aura de prestige que le chef d’œuvre de Byron Haskin, il n’en demeure pas moins un film de science-fiction solide et attachant, qui possède en dépit de ses défauts tout le charme désuet de ces productions SF d’antan. Avec ses martiens qui « possèdent » le corps de pauvres humains, le film de William Cameron Menzies préfigure même, avec quelques années d’avance, un autre chef d’œuvre : on pense bien sûr à L’Invasion des profanateurs de sépultures, réalisé par Don Siegel en 1956 d’après le roman de Jack Finney.
L’autre habileté des Envahisseurs de la planète rouge, c’est de nous donner à voir un héros très différent des militaires et autres scientifiques bravaches mis en scène par les récits de science-fiction de l’époque : David, incarné à l’écran par Jimmy Hunt, n’est en effet qu’un petit garçon, que les adultes sont en général peu enclins à prendre au sérieux – que peut faire un petit garçon face à l’invasion extraterrestre ? Heureusement, le tcho père trouvera une oreille attentive auprès du docteur Patricia Blake (Helena Carter) et du professeur Kelston (Arthur Franz), qui deviendront au fil de l’intrigue de gentils parents de substitution pour David, puisque ses parents naturels sont devenus d’infâmes pantins dominés par l’âme collective et proto-communiste des méchants martiens.
Doté d’un budget que l’on imagine relativement modeste, Les Envahisseurs de la planète rouge s’impose néanmoins comme une belle réussite. Derrière la caméra, William Cameron Menzies, décorateur de formation (Autant en emporte le vent), mettait à profit ses années d’expérience en matière de décors : l’architecture de certains décors et l’utilisation des couleurs sont absolument remarquables, à la manière de ce poste de police à la hauteur de plafond surréaliste, qui contribue à apporter une touche d’étrangeté à l’ensemble tout en rappelant que le héros n’est qu’un enfant évoluant dans un monde d’adultes où tout semble trop grand pour lui.
Cette maestria formelle contribue à transcender le scénario du film, souvent naïf et parfois maladroit – on pense par exemple à la facilité avec laquelle David parvient à convaincre Kelston de l’invasion rouge. Ainsi, grâce à son production design soigné et à ses acteurs globalement convaincants, mais aussi grâce à la représentation haute en couleurs de ses martiens, Les Envahisseurs de la planète rouge parvient néanmoins à imposer son propre style, et la classe vaguement surannée développée par le film mérite vraiment le détour. Une curiosité à réhabiliter au plus vite !
Le coffret Blu-ray + DVD + Livret
[4/5]
C’est donc à Sidonis Calysta que l’on doit l’heureuse initiative d’éditer Les Envahisseurs de la planète rouge au format Blu-ray. Le film nous est par ailleurs proposé dans un prestigieux Combo Blu-ray + DVD + Livret prenant la forme d’un superbe Mediabook, disponible depuis novembre dernier dans une édition limitée à 1000 exemplaires. Et côté image, c’est du tout bon : l’éditeur a en effet bénéficié de la magnifique restauration 4K du film effectuée par Ignite Fims en 2023. La préservation maniaque du grain argentique ne gâche en rien une définition exemplaire, riche d’un niveau de détail souvent surprenant. Bien sûr, le master accuse de petites baisses de forme par ci par là, notamment sur les plans à effets, tels que les fondus enchaînés, qui permettent néanmoins aussi de mesurer la qualité impressionnante de la restauration. Les sublimes décors du film nous apparaissent avec une belle netteté générale, les couleurs sont naturelles, les contrastes solides, bref, c’est du tout bon. Côté son, Sidonis Calysta nous propose un mixage DTS-HD Master Audio 2.0, en mono d’origine et VOST uniquement. L’équilibre acoustique est excellent, et l’ensemble se révèle clair et globalement précis. Du très beau travail.
Dans la section suppléments, on trouvera tout d’abord au sein du boitier le livret de 24 pages écrit par Marc Toullec et intitulé « La Science des rêves ». Comme à son habitude, l’ex rédac chef de Mad Movies nous livrera un travail d’archives assez impressionnant, et retracera le parcours du film de sa production jusqu’à sa sortie sur les écrans. Sur la galette à proprement parler, on commencera avec une présentation de la bande-annonce de la restauration 4K par Ernest Dickerson (5 minutes), tirée de la chaine YouTube Trailers from Hell. Le réalisateur des excellents Que la chasse commence (1994) et Le Cavalier du Diable (1995) y reviendra sur son amour pour le film. On continuera ensuite par un portrait de William Cameron Menzies (16 minutes) signé James Curtis, auteur d’un bouquin de référence sur le cinéaste. Il y reviendra sur l’œuvre atypique de Menzies, de son passage à la réalisation et bien sûr du film en lui-même. En fin de sujet, la petite-fille du réalisateur se joindra au critique pour évoquer l’œuvre de son grand-père. On aura également droit à un entretien avec Jimmy Hunt (11 minutes), qui jouait le petit David dans le film. Devenu un adulte assez exubérant, il reviendra avec humour sur ses souvenirs du tournage, sur le travail sur le plateau avec le réalisateur et les autres acteurs, et terminera en évoquant le reste de sa carrière. Enfin, en complément de la traditionnelle bande-annonce, on terminera avec un intéressant sujet sur la restauration du film (7 minutes), qui permettra au responsable de la restauration du film Scott MacQueen d’évoquer les difficultés ayant dû être surmontées afin de nous permettre de redécouvrir le film dans ces conditions assez superbes.