Test Blu-ray : Les damnés

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Les damnés

 
Royaume-Uni : 1962
Titre original : The damned
Réalisation : Joseph Losey
Scénario : Evan Jones
Acteurs : Macdonald Carey, Shirley Anne Field, Viveca Lindfors
Éditeur : ESC Éditions
Durée : 1h35
Genre : Science-Fiction
Date de sortie cinéma : 30 septembre 1964
Date de sortie DVD/BR : 4 février 2020

 

Dans un petit port britannique de la côte sud, l’Américain Simon Wells est dévalisé par une bande de blousons noirs dirigés par King. La soeur de ce dernier, Joan, qui a servi d’appât, prend la défense de Wells et s’enfuit avec lui à bord de son petit yacht. Un peu plus tard, caché dans une maison sur la falaise, refuge de la sculpteur Freya, la maîtresse de Bernard, un agent du gouvernement, le couple est retrouvé par King et sa bande. En fuyant à nouveau, Joan et Simon tombent de la falaise et prennent pied dans une grotte où ils sont bientôt rejoints par King…

 


 

Le film

[4/5]

Réalisé en Europe par un Joseph Losey fuyant la chasse aux sorcières du Maccarthysme, Les damnés (également connu sous le titre The damned ou These are the damned) s’avère une production Hammer Films extrêmement singulière, détonnant avec clairement avec les autres films mis en boite par le studio britannique à la même époque.

Récit de science-fiction pessimiste très sobre dans sa mise en images, le film va en effet tirer ses influences formelles du côté du Village des damnés (Wolf Rilla, 1960) – ce qui est d’autant plus manifeste que des enfants tiennent un rôle capital dans l’intrigue – ou même de la série TV La quatrième dimension (Rod Serling, 1959-1964), dans le sens où le film semble emmener le spectateur dans une réalité qui, si elle ne diffère probablement pas en tous points de la société anglaise de l’époque, n’est pas non plus tout à fait celle du Royaume-Uni au début des années 60. On ajoutera d’ailleurs qu’avec le recul, le film de Losey évoquera également, par certains aspects, quelques éléments visuels et narratifs qui le poseront comme une espère d’étrange précurseur d’Orange mécanique (Stanley Kubrick, 1971) – on pense bien sûr à la présentation et aux personnalités du groupe de jeunes gens menés par Oliver Reed durant le premier quart d’heure du métrage.

Autant dire donc qu’on est loin, très loin de l’ambiance gothique et des personnages de monstres classiques qui ont fait le succès des films estampillés Hammer à la même période : on lorgne ici d’avantage du côté des films de la saga Quatermass (Le monstre / La marque) ou des autres films de science-fiction un brin désuets tournés par la Hammer la décennie précédente, à la nuance près que les films de SF produits par la firme dans les années 50 affichaient tous un côté « sérial » et spectaculaire, que l’on ne retrouvera pas dans Les damnés, beaucoup plus axé sur la violence psychologique. On reconnaitra néanmoins au premier coup d’œil l’élégance so British de la firme, tout autant que le soin apporté aux décors et à l’interprétation de l’ensemble, très carré.

Le scénario est une adaptation du roman « The children of light » de H.L. Lawrence, œuvre non traduite en France et finalement assez difficile à trouver à un prix raisonnable si l’idée vous prenait de vouloir le lire. Les personnages, surtout celui de Simon, ont un background un peu différent de celui du film. Parallèlement, la filiation entre le roman, sorti en 1960, et celui de John Wyndham ayant inspiré Le village des damnés (datant de 1957), est sans doute encore plus évidente que dans le film : les enfants dans le bouquin ont en effet tous les cheveux blond platine. Pour le reste, le roman de Lawrence, bien qu’un peu désuet, s’avère sans doute un peu moins tourné vers « l’humain », et plus politisé que le film de Losey, dans le sens où le complot organisé par le gouvernement britannique et les instances militaires donne l’image d’un pouvoir froid, calculateur et capable de commettre n’importe quel crime contre le peuple dans le but de protéger ses programmes secrets, si insensés soient-ils.

Original, élégant, riche d’un cadre et d’une photographie noir et blanc absolument superbes, Les damnés prend d’autres directions narratives, mais s’avère au final tout aussi intéressant que son modèle littéraire. On notera bien sûr les performances au casting de Macdonald Carey, Shirley Anne Field ou encore Viveca Lindfors, mais aussi et surtout d’Oliver Reed, qui crève littéralement l’écran dans le rôle, ambigu et trouble, de King, le chef du gang de blousons noirs chantants. Une véritable curiosité, à (re)découvrir de toute urgence.

 

 

Le Combo Blu-ray + DVD + Livret

[5/5]

Les films édités par ESC Éditions au sein de sa déjà très riche – et indispensable – collection « British Terrors » se suivent et ne se ressemblent pas : Les damnés a néanmoins tout à fait sa place au sein de cette série d’éditions « Collector » qui s’imposent de plus, on ne le répétera probablement jamais assez, dans un packaging luxueux et vraiment très classe que vous serez fiers d’afficher sur vos étagères.

Comme les autres films de la collection « British Terrors », Les damnés s’offre une très belle présentation vidéo. En effet, le travail de remasterisation effectué sur le film de Joseph Losey s’avère réellement impressionnant : le film et la sublime photo d’Arthur Grant s’impose avec faste et élégance, nous proposant de découvrir ou redécouvrir le film dans des conditions complètement inédites. Le piqué est au final d’une précision étonnante, les contrastes ébouriffants, et l’ensemble présente une stabilité exemplaire, tout en conservant bien sûr le grain argentique du film. Côté son, la bande son encodée en DTS HD Master Audio 1.0 mono d’origine (et VO uniquement, même si le site Encyclociné nous indique bien une date de sortie en France) fait le boulot sans le moindre problème, avec des dialogues toujours parfaitement clairs et distincts.

Du côté des suppléments, on trouvera la traditionnelle présentation de la Hammer par Nicolas Stanzick (13 minutes), disponible sur toutes les galettes de la collection « British Terrors » proposant un film issu du célèbre studio. Plus inhabituel, on trouvera également sur le disque un entretien avec Noël Simsolo (18 minutes) qui reviendra en long, en large et en travers sur la carrière au cinéma de Joseph Losey. Visiblement, ce touche à tout à la fois réalisateur, comédien, scénariste, historien du cinéma et romancier entretient une intense passion pour Losey : il nous résumera son parcours et évoquera ses nombreux chefs d’œuvre, en prenant bien soin d’avoir un mot particulier pour Les damnés et la façon dont le film s’intègre dans sa filmographie.

Last but not least, on ne pourra évoquer l’interactivité de ce Combo Blu-ray + DVD + livret sans évoquer le livret de 16 pages intégré au boitier, intitulé « Les damnés : La raison d’État » et bien sûr signé de la main de Marc Toullec, ancien rédac’ chef de Mad Movies depuis quelques années recyclé à temps plein dans les bonus de Blu-ray / DVD. Il reviendra lui aussi sur une partie de la carrière de Joseph Losey, sur le scénario des Damnés et sa critique du système éducatif britannique, au casting imposé par la production, aux volontés d’improvisation de Viveca Lindfors sur le tournage ou encore aux problèmes de budget rencontrés par le cinéaste sur le film. Intéressant !

 

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