Leatherface
États-Unis : 2017
Titre original : –
Réalisation : Alexandre Bustillo, Julien Maury
Scénario : Seth M. Sherwood
Acteurs : Stephen Dorff, Lili Taylor, Sam Strike
Éditeur : Metropolitan Vidéo
Durée : 1h27
Genre : Horreur
Date de sortie DVD/BR : 2 janvier 2018
La famille Sawyer sème la terreur au Texas. Leur plus jeune enfant est envoyé en hôpital psychiatrique après avoir reçu comme cadeau d’anniversaire une tronçonneuse qu’il essaya dès l’ouverture du paquet sur une des proies de la famille. Des années plus tard, le garçon s’échappe de l’hôpital psychiatrique où il était interné avec quelques patients déviants et une infirmière prise en otage. Semant la terreur sur les routes, ils sont poursuivis par un shérif dont la fille a été victime de la famille tronçonneuse. Qui parmi les criminels deviendra le terrifiant « Leatherface » ?
Le film
[3,5/5]
Sur critique-film.fr, on aime être transparents avec nos lecteurs. Ainsi, on ne vous cachera pas qu’à l’occasion de la sortie de Leatherface en Blu-ray et DVD le 2 janvier 2018, on prépare actuellement un dossier sur la période « reboot » de la saga Massacre à la tronçonneuse (2003-2017), et que par conséquent, on reviendra d’ici quelques jours de façon beaucoup plus précise sur la place de Leatherface dans la continuité de la franchise initiée, à l’origine, en 1974 par le chef d’œuvre de Tobe Hooper. On évoquera également dans le détail les qualités et les défauts du nouveau film des duettistes Julien Maury / Alexandre Bustillo.
Mais histoire de ne pas vous gaver avec deux fois le même article, on a fait le choix pour aujourd’hui de n’évoquer, dans un premier temps donc, que très superficiellement ce Leatherface cuvée 2017, en s’attardant ici d’avantage sur la carrière des deux cinéastes français, leur approche du projet et en tentant surtout de découvrir pour quelles raisons le film, si réussi soit-il, n’est pas sorti dans les salles françaises courant 2017.
Revenons tout d’abord sur le parcours du duo Julien Maury / Alexandre Bustillo. En 2007, À l’intérieur, leur première incursion dans le petit monde du film d’horreur, avait reçu un bon accueil, en particulier de la presse spécialisée (et de leurs camarades de Mad Movies), et était parvenu à un petit succès d’estime, le film n’ayant finalement réuni que 70.500 fans de gore qui tâche dans 110 salles en France. Suite au rachat des droits du film par les américains de Dimension Films, les deux cinéastes sont ensuite rattachés à un projet de reboot de la franchise Hellraiser.
« On part à Los Angeles rencontrer Clive Barker, qui nous a reçus dans sa maison secondaire de L.A., qui lui sert d’atelier. » se souvenait Julien Maury dans un entretien donné à l’auteur de ses lignes en 2011. « On était comme des fous, c’est un endroit où il y a toutes ses peintures, ses sculptures de Cabal, on était comme des gamins… Bref, lui super sympa, avait lu notre traitement et trouvait ça très intéressant. On était aux anges, car il était hors de question de bosser sur un Hellraiser sans le feu vert de Clive Barker. Putain, le kif… On était heureux, on discute avec lui, on a plein d’idées et on se dit qu’on va faire un truc de malade. On rentre à Paris, on commence à écrire, on termine un scénar, on l’envoie aux Weinstein, et là, les mecs nous arrêtent tout de suite : « Bon les gars, maintenant que vous avez signé, on va arrêter les conneries. » Ils nous expliquent gentiment qu’il faudrait que cela soit un peu plus mainstream. On a essayé, on a réécrit, et rien ne leur convenait. Notre héroïne avait quarante balais, et une gamine dans le coma parce qu’elle avait fait une tentative de suicide, et on nous a fait comprendre que cela serait mieux si elle n’avait pas quarante ans mais dix-huit, et qu’elle ait de gros nichons. « Les films d’horreur, c’est pour les adolescents, ils faut qu’ils s’identifient… » Nous on voulait pousser le truc à un niveau plus adulte, que ça s’adresse à tout le monde, alors on renégocie, on finit par convenir du fait que la femme de quarante ans deviendrait un personnage secondaire et que l’héroïne serait sa fille, mais ils ne voulaient pas entendre parler de suicide… Au final, c’est un ensemble de petites choses insidieuses qui font qu’à la fin, notre scénar ne ressemblait plus à rien, et on nous a conseillé de commencer à travailler avec les scénaristes de Saw IV, V, VI, Marcus Dunstan et Patrick Melton. (…) Au bout de plusieurs essais, on a donc préféré se barrer, et on a demandé à notre agent de casser le contrat, plutôt que de se faire violer et de rentrer la queue entre les jambes en France. »
Avant de s’atteler à leur deuxième film Livide, et avant de s’attaquer à l’épisode de Massacre à la tronçonneuse que Metropolitan nous propose aujourd’hui en DVD et Blu-ray, Maury et Bustillo ont également côtoyé de près une autre grande icône de l’horreur, puisqu’ils ont bossé quelques mois sur un projet de suite au reboot d’Halloween réalisé par Rob Zombie en 2007. « Comment résister ? On est des geeks, rien que l’idée de filmer cet enfoiré de Myers une fois dans notre vie, forcément, on a accepté. Et pour le coup, on a rédigé un script qui a mis tout le monde d’accord, parce que le slasher, c’est sur des rails très balisés, avec ses codes, la bande de jeunes, etc. On connait cette mythologie sur le bout des doigts, donc on s’amusait clairement avec et au final, tout le monde s’y retrouvait, tout le monde était content. On part à L.A. rencontrer Malek Akkad, propriétaire de la franchise à 50%, tout se passait bien, on était trop excités… Sauf que pendant ce temps-là Rob Zombie essayait de monter T-Rex, son très attendu film de catcheurs, pour Dimension, avec qui il était lié par contrat pour deux films. Dimension a laissé tomber T-Rex, donc Rob est revenu sur le projet. Forcément, on était dégoutés parce que tout se passait bien et qu’on aurait vraiment adoré le faire, mais tout s’est bien passé avec Rob, qui a été super cool, nous a envoyé des mails de soutien, etc. Et à l’arrivée, on adore Halloween II, le film super vénère, super fuck you attitude. Enfin, par la suite, on a bossé pendant deux mois sur Halloween 3D, on y est retournés, et on a du bosser avec un autre scénariste, très cool mais qui ne connaissait pas du tout la franchise, et qui a proposé de rebooter à nouveau la saga. Pour tout dire, on trouvait l’idée débile, et l’entrain n’y était plus, même du côté du studio ; finalement, tout a capoté. »
C’est donc en France qu’ils reviennent tourner Livide, qui sortira sur les écrans français fin 2011. Mais du côté de la presse, la réception fut beaucoup plus mitigée ; mal distribué par SND, le film ne s’offrait déjà plus que 17 salles dans l’hexagone, et stopperait par conséquent sa carrière à 5.100 entrées. Leur troisième film, Aux yeux des vivants, est devenu la cible d’un véritable acharnement de la part de la critique française « mainstream » : la bienveillance n’est pas toujours de mise et malgré ses immenses qualités, le film a été purement et simplement assassiné, se prenant des scuds de toutes parts. Au final, le film serait distribué courant 2014 sur seulement neuf copies en France, et n’attirerait que 1.800 curieux dans les salles obscures. Un coup dur pour les deux réals français, mais aussi pour les producteurs, Caroline Piras, Fabrice Lambot et Jean-Pierre Putters, qui défendaient le film sous les couleurs de Metaluna Productions.
Mais si les faibles scores des films précédents de Maury et Bustillo au box-office expliquent en partie la frilosité des distributeurs à sortir leur dernier long-métrage sur grand écran, ils ne sont probablement pas les seuls responsables du fait que Leatherface ne soit pas sorti dans les salles françaises ; il faut avouer qu’il s’agit d’un film assez malsain, qui écoperait à coup sûr d’une interdiction aux moins de 16 ans, et dont la distribution aurait été par conséquent beaucoup plus compliquée. En effet, suite aux retombées de « l’affaire Annabelle » il y a quelques années, qui pointait largement du doigt les amateurs de bandes horrifiques, beaucoup de multiplexes refusent aujourd’hui tout simplement de projeter le moindre film interdit aux moins de 16 ans. Et si l’on ajoute dans la balance les faibles résultats enregistrés en 2013 par Texas chainsaw 3D, dernier film en date de la franchise (47.000 entrées sur un circuit de 127 salles), il y avait fort à parier pour qu’aucun distributeur ne prenne le risque de le sortir sur grand écran.
Le Blu-ray
[5/5]
Néanmoins, si Metropolitan n’a pas pu sortir Leatherface dans les salles, il se rattrape en vidéo, en lui offrant une très belle édition Blu-ray, pétrie de bonus inédits. Une façon pour Metro de prouver aux fans qu’ils croyaient vraiment dans le potentiel de leur poulain…
De fait, ce Blu-ray de Leatherface édité par Metropolitan Vidéo s’imposera presque naturellement comme le parfait candidat en 2018 pour une soirée Home Cinema entre amateurs de cinéma d’horreur. Et quitte à organiser une soirée pizza entre potes, autant flamber en leur montrant un peu le matos de ouf dont vous disposez côté « Cinéma chez soi ». Et pour se lancer dans une démo technique censée démontrer l’écrasante supériorité du support Blu-ray sur son petit frère le séculaire DVD, le Blu-ray de Leatherface se montrera un allié sans faille. Le transfert, proposé en 1080p, est tout simplement époustouflant, proposant une image toujours maitrisée malgré les nombreuses scènes nocturnes, et un piqué d’une précision chirurgicale, comme ils disent dans Les années Laser. Bref, ça dépouille carrément la schnek à la harissa (comme on ne le dit pas trop dans Les années Laser), et les fans de gros gore qui tache autant que les amateurs de road movies déviants et tendus seront assurément aux anges. Côté son, VF et VO sont proposées dans de flamboyants mixages DTS-HD Master Audio 5.1, agressifs et dynamiques comme il le faut, et déployant des basses absolument tonitruantes, surtout lors des passages les plus hystériques du film.
Niveau suppléments, le gros morceau de l’interactivité du Blu-ray dénote de la belle implication de Julien Maury et Alexandre Bustillo dans la conception de la galette. On y découvrira tout d’abord un long entretien avec les deux réalisateurs, qui s’expriment en français et sans la moindre langue de bois sur leur film, sur le tournage, ainsi que sur l’ingérence des producteurs américains vis-à-vis du produit terminé. Ils reviennent dans la bonne humeur sur tous les couacs et autres problèmes survenus pendant et après le tournage. On poursuivra ensuite avec presque une demi-heure de scènes coupées (dont un début et une fin alternative), parfois assez poétiques et assez formidables ; les duettistes de l’horreur made in France se sont également prêtés au jeu du commentaire sur certaines d’entre elles, expliquant pour quelles raisons elles ont été écartées du montage final par la production. Enfin, on terminera avec un mini-making of à l’américaine, beaucoup plus consensuel mais ayant le mérite de nous donner à voir beaucoup d’images du tournage, par une galerie de plus de 100 croquis préparatoires et par la traditionnelle bande-annonce du film, proposée en Green et en Red Band. Le tout est proposé en HD et VOST. En deux mots comme en cent, une galette Blu-ray d’exception (image et son au top, interactivité géniale) pour un film à voir à tout prix, non seulement pour s’en faire sa propre idée mais aussi et surtout pour soutenir comme il se doit deux cinéastes décidément à part dans le cinéma français.