Le Survivant d’un Monde Parallèle
Australie : 1981
Titre original : The Survivor
Réalisateur : David Hemmings
Scénario : David Ambrose
Acteurs : Robert Powell, Jenny Agutter, Joseph Cotten
Éditeur : Rimini Éditions
Durée : 1h39
Genre : Fantastique
Date de sortie cinéma : 2 décembre 1981
Date de sortie Blu-ray : 20 septembre 2021
Unique survivant d’une catastrophe aérienne, dont il est sorti étrangement indemne, le commandant Keller décide de mener sa propre enquête sur les circonstances de l’accident. Hanté par les esprits des victimes du crash, devenu totalement amnésique, il aura besoin de l’aide d’une jeune femme pour élucider les nombreux mystères qui entourent le drame…
Le film
[3,5/5]
Le cinéma d’exploitation australien – ou « Ozploitation » – est un sous-genre qui, en France, peine un peu à percer et à être reconnu à sa juste valeur. Cependant, bien avant le fameux documentaire Not quite Hollywood : The wild, untold story of Ozploitation ! (2008), le cinéma populaire australien avait déjà bénéficié d’un coup de projecteur tout particulier en France, sous l’impulsion du magazine Mad Movies. En effet, à partir de 2002, la revue dédiée au cinéma fantastique s’était vue accompagnée d’un DVD dans les kiosques, et des films australiens un peu oubliés et jusqu’alors inédits en DVD avaient de ce fait pu être redécouverts par un large public. Le Survivant d’un Monde Parallèle fut l’un de ceux-là, mais fut à l’époque exploité dans son montage raccourci de presque un quart d’heure – grâce à Rimini Éditions, nous avons enfin l’opportunité de découvrir le film en version intégrale et en Haute-Définition…
Le Survivant d’un Monde Parallèle commence par une scène de crash aérien extrêmement bien mis en scène et assez éprouvant, ce qui est particulièrement remarquable, surtout à une époque où les images de synthèse étaient encore du domaine de la science-fiction. Le pilote de l’avion, Keller (Robert Powell), s’en est sorti miraculeusement indemne, et cherche à reconstituer le fil des événements, tout en tentant de faire taire les voix dans sa tête. Ces dernières sont-elles le fruit de sa culpabilité ou la manifestation de forces surnaturelles ? Hobbs (Jenny Agutter), qui possède des dons médiumniques, va l’aider à tenter d’y voir plus clair…
Comme vous aurez pu le comprendre à la lecture des enjeux du film de David Hemmings, Le Survivant d’un Monde Parallèle est un film bicéphale, qui dès ses premières séquences fait le choix de ne pas se plonger à corps perdu dans le fantastique, mais s’engage bel et bien dans deux directions radicalement opposées, qui finiront naturellement par se rejoindre. D’un côté, il y a donc l’enquête autour du crash, avec les autorités ainsi que la compagnie aérienne qui tentent de déterminer ce qui s’est passé à bord. De l’autre côté, le film enchaîne les séquences baignant dans le fantastique pur, et développe tout du long une ambiance surnaturelle, propre à faire perdre au spectateur tous ses repères rationnels.
Et plutôt que de donner l’impression d’un film ayant un peu le cul entre deux chaises, cette ambiance pour le moins étrange contribue à installer une atmosphère d’étrangeté, de rêve éveillé, qui sera, au final, un des points forts du Survivant d’un Monde Parallèle. D’ailleurs, et à moins peut-être d’avoir lu « Celui qui survit », le roman de James Herbert dont est adapté le film, le fait est que quand arrive le générique de fin du film, beaucoup de questions restent encore sans réponse. Quelle est la nature de ce petit groupe d’enfants jouant à « Un, deux, trois, soleil » que l’on voit à plusieurs reprises au cours du récit ? Et d’une façon un peu plus large, quel est le rôle de Hobbs dans les différentes prises de conscience successives de Keller ?
Si vous pensiez que la version intégrale répondrait à toutes ces questions sans réponses, ou si vous pensiez qu’elle remplirait les trous dans la narration que nous connaissions jusqu’ici, vous en serez pour vos frais : envers et contre tous, Le Survivant d’un Monde Parallèle reste un objet cinématographique mystérieux, un film de « sensations », à l’occasion duquel on sent que David Hemmings a eu le loisir d’observer les grands noms du bis à l’italienne des années 70, tant il laisse l’intrigue se porter par elle-même, flotter au fil de visions étranges et souvent fascinantes. Le cinéaste fait par ailleurs preuve d’un sens du cadre – et plus largement de l’image – assez bluffant, ce qui s’avère d’autant plus impressionnant que la photo signée John Seale est régulièrement très belle.
Pour terminer, et sans en révéler trop sur les tenants et aboutissants de l’intrigue, on ne pourra s’empêcher, avec quarante ans de recul, de penser que M. Night Shyamalan a assurément vu et apprécié Le Survivant d’un Monde Parallèle ; certains éléments de ses premiers films, Sixième sens (1999) et Incassable (2000), ne permettent en effet pas d’avoir le moindre doute à ce sujet. Dans l’absolu, et même si le film de David Hemmings a déjà fait l’objet d’un remake américain en 1983 (L’unique survivante, réalisé par Thom Eberhardt juste avant son film-culte La Nuit de la Comète), on serait curieux de voir Shyamalan assumer ses influences en en signant un nouveau remake.
Le Blu-ray
[5/5]
Il n’y a pas à en douter : avec sa collection de Combos Blu-ray + DVD + Livret dédiés aux classiques oubliés du cinéma fantastique, Rimini Éditions s’est, en l’espace de quelques années, créé une place assez incontournable dans le cœur des amateurs de frissons surannés. La « Ozploitation » est d’ailleurs plutôt bien représentée au sein de la collection : après Patrick et Harlequin, voici donc Le Survivant d’un Monde Parallèle, qui débarque de plus pour la toute première fois dans sa version intégrale. On notera par ailleurs le soin apporté à son packaging, qui s’impose d’entrée de jeu comme un objet classieux que vous serez fiers d’afficher sur vos étagères : le film est présenté dans un joli digipack trois volets, surmonté d’un fourreau aux couleurs du film.
Cette édition Blu-ray du Survivant d’un Monde Parallèle permettra donc aux cinéphiles de (re)découvrir le film de David Hemmings dans des conditions tout à fait recommandables. Le grain cinéma a été préservé, et l’ensemble propose une belle mise à niveau si l’on tient compte de l’âge et de la rareté du film. La profondeur de champ et les couleurs ont été soignées, le tout conserve un parfait charme rétro. Côté son, seule la VO est proposée, en DTS-HD Master Audio 2.0, sur la version longue du film : tout est parfaitement clair et net, sans souffle parasite ni aucune pétouille audio notable. On notera également que le film est également disponible en « version courte », VF et VO et définition standard. Les sous-titres s’avèrent dans la bonne moyenne ; quelques fautes sont certainement de la partie, mais leur rythme fait que l’on n’a pas le temps de s’y attarder. Il y a juste « UNE » énorme faute, du genre qui fait saigner les yeux et permettra sans doute à Rimini de négocier une grosse remise sur ses prochains sous-titrages. Ainsi, durant la séquence de l’enterrement, le personnage incarné par Robert Powell s’emporte, et les sous-titres indiquent « Je me fiche de ce que Slater et toi disez » – On est comment, au niveau de la conjugaison ? Vous faisez souvent ce genre de fautes ?
Du côté des suppléments, en plus du traditionnel livret inédit signé Marc Toullec revenant sur toutes les étapes de la production du film, on trouvera une émission de TV australienne intitulée Clapper Board (30 minutes). Celle-ci révélera les coulisses du tournage de la scène du crash aérien, et proposera une série d’entretiens avec quelques-uns des acteurs (Joseph Cotten, Jenny Agutter, Peter Sumner, Ralph Cotterill, Angela Punch McGregor). On terminera enfin avec un entretien avec le producteur Antony I. Ginnane et le directeur photo John Seale (22 minutes), qui évoqueront leurs souvenirs du film, sans langue de bois et de façon assez vivante. Ces entretiens sont tires des “rushes” de Mark Hartley pour son documentaire Not quite Hollywood : The wild, untold story of Ozploitation ! (2008).