Le retour des morts vivants 3
États-Unis, Japon : 1993
Titre original : Return of the living dead 3
Réalisation : Brian Yuzna
Scénario : John Penney
Acteurs : Melinda Clarke, J. Trevor Edmond, Kent McCord
Éditeur : Le chat qui fume
Durée : 1h37
Genre : Horreur
Date de sortie cinéma : 10 août 1994
Date de sortie DVD/BR : 3 octobre 2019
Curt Reynolds et Julie Walker mènent le parfait amour lorsqu’un accident de la route s’avère fatal pour la jeune femme. Curt emmène alors le corps de sa fiancée dans une base militaire dirigée par son père. Dans ce lieu hautement secret sont menées des expériences visant à ramener des cadavres à la vie au moyen d’un gaz nommé Trioxine. Si Curt parvient à réanimer sa bien-aimée, celle-ci se transforme peu à peu en zombie avide de chair humaine. Semant la terreur dans la ville, Julie trouve dans l’automutilation le moyen de canaliser ses pulsions cannibales…
Le film
[5/5]
Noël approche à grand pas : les enfants trépignent en attendant le « top départ » pour l’ouverture de leur calendrier de l’Avent, la neige ne tardera pas à étaler son manteau blanc sur la France, on dépoussière les disques de Tino Rossi, et sur critique-film.fr, on enchaîne les tests Blu-ray / DVD évidemment liés à cette période festive. Du Disney bien sûr, avec Toy Story 4 et Le roi lion, un petit dessin animé tout meugnon hier, Elliot le plus petit des rennes, et demain on évoquera Noël blanc, classique du film de Noël signé Michael Curtiz. Bref, on ne pourra pas nous reprocher de ne pas célébrer en grande pompe l’esprit de Noël. Et on en remet encore une couche aujourd’hui dans un genre un peu différent, avec Le retour des morts vivants 3, la plus belle et la plus tragique love-story zombie jamais portée sur un écran. Une héroïne décorée comme un sapin de Noël, de l’arrachage de foie gras et bien craspec, de véritables geysers de sang évoquant bien sûr le rouge de la tenue du Père Noël, et une hystérie formelle qui n’est pas sans rappeler la cohue et le brouhaha régnant dans les grandes enseignes durant les fêtes de fin d’année. En deux mots comme en cent, on tient là le « film de Noël » par excellence, celui qui devrait atterrir dans votre lecteur Blu-ray le 24 décembre au soir, plutôt que de vous taper une énième redif du Robin des bois de Disney sur M6 ou les indécentes soirées de réveillon des grandes chaînes de TV, qui sont de toutes façons tournées en septembre et qui de fait se foutent ouvertement de votre gueule.
Faut-il encore présenter Brian Yuzna, ce génie absolu du Cinéma – avec un grand « C », comme CUL, COUILLES et CHATTE – ayant révolutionné le genre dans les années 90 ? Bon, allez, vite fait, pour les cancres du fond. Dans le petit monde du ciné fantastique, ils sont tous fous, et Brian Yuzna c’est leur chef à tous : le « Sauron » du film de genre, en possession de l’Anneau unique, dont l’Œil dispose d’un grand pouvoir sur l’esprit des autres – il les appelle, il les domine, son génie balaie tout sur son passage. Si vous n’avez jamais vu Brian Yuzna, sachez qu’il possède l’apparence d’un être finalement assez proche du commun des mortels, ce qui lui permet de tromper plus facilement les Hommes – on le reconnaît cependant à sa petite moustache et à sa grande discrétion, doublée d’une douceur et d’une gentillesse que ne laissent pas forcément deviner ses allures de vieil aristocrate. Son statut de chef des fous, il l’a imposé dès son premier film en tant que réalisateur, Society (1989), film barré s’il en est, baignant dans une ambiance complètement surréaliste, branque et très sexuée. Slalomant joyeusement entre le délire assumé et une ambiance outrée et artificielle façon sitcom ringarde (il nous proposait en effet une version dénaturée de shows pour teenagers à la Beverly Hills 90210), Brian Yuzna avait su imposer en un seul film un style unique et une vision originale, qui crachait ouvertement à la gueule de la Jet Set de Beverly Hills, classe bourgeoise qui fait rien qu’à partouzer. A l’issue de ce coup d’essai / coup de maître particulièrement fendard et jouissif, Brian Yuzna reviendrait derrière la caméra l’année suivante avec les excellents Re-Animator 2 et Douce nuit, sanglante nuit 4 : L’initiation, qui confirmeraient et entérineraient définitivement son talent fou et incontestable, reléguant les icones du passé Orson Welles ou Stanley Kubrick au rang de chiffons merdeux, de ringards, de mecs n’ayant définitivement rien compris à l’essence même du médium « Cinéma », dont la portée transcendantale autant que les possibilités narratives infinies étaient enfin révélées à leur pleine puissance par Yuzna. Si le cinéma était une secte, il en serait le grand gourou. Si vous voulez tenter de vous représenter son talent en comparaison à d’autres cinéastes, imaginez une pastèque au milieu de tomates-cerises. Vous pensez bien qu’il peut y avoir des éclaboussures.
Après ces trois premiers films réalisés en 1989/90, vint finalement l’année 1993, qui marquerait un véritable tournant dans la filmographie de Brian Yuzna, puisque c’est l’année durant laquelle il réaliserait son plus grand chef d’œuvre, Le retour des morts vivants 3. Fausse suite, dont tout indique qu’elle fut rattachée à la saga initiée en 1985 par Le retour des morts vivants de Dan O’Bannon (lire notre article) pour de simples raisons financières, le film de Yuzna tire en effet un trait sur la caractéristique principale des deux premiers films de la franchise : l’humour. Réinjectant au contraire une bonne dose de sérieux et de premier degré dans le genre, Yuzna aborde son scénario comme une tragédie teintée de passion amoureuse, un peu à la manière d’un Roméo et Juliette chez les zomblards, sans avoir recours à l’humour loufoque des deux films précédents. Le seul élément rattachant le film à la saga réside en fait dans l’utilisation du fameux gaz Trioxine 2-4-5 (pour la petite histoire, ce gaz est un dérivé imaginaire du Trioxine 1-3-5, composé de restauration utilisé par les pompes funèbres car il répare les cellules et maintient les contours des corps après la constriction des tissus post-mortem), que le scénariste John Penney intégrera à son intrigue, ici centrée sur deux « adolescents » de 24 ans, Curt et Julie, qui ont découvert l’existence d’un programme gouvernemental top-secret visant à utiliser la Trioxine pour développer une génération de super soldats. Un point de départ qui bien sûr va générer une véritable épidémie de zombies, doublée de la « réanimation » sauvage de notre héroïne Julie (Melinda Clarke), accidentellement décédée. L’amour sera-t-il plus fort que la mort ?
Ce sous-texte mélodramatique, qui dénote d’une tonalité ouvertement passionnée et romantique malgré le côté très rock n’ roll de notre couple de jeunes gens, est au centre du Retour des morts vivants 3. Bien sûr, l’idée de génie de Brian Yuzna – qui sera reprise de nombreuses fois par la suite, dans des films tels que Zombie lover (2009), Warm bodies (2013) ou encore Life after Beth (2014) – est de mettre en parallèle cette idée héritée de La fiancée de Frankenstein avec une intrigue secondaire absolument troublante, suivant les tentatives répétées de Julie afin de se mutiler, de se percer, de se piquer, s’arracher ou se couper la peau dans le but de calmer la faim insatiable de chair humaine qui la tenaille. Ces séquences, qui ont largement contribué à la célébrité ainsi qu’à la pérennité du film de Yuzna, bénéficient de tout le talent des artistes en effets spéciaux que sont Chris Nelson et Steve Johnson, et du choix de l’actrice Mindy Clarke, dont le visage oblong et le front proéminent ont probablement permis aux deux experts de laisser libre cours à leur imagination macabre de façon à proposer le maquillage le plus efficace et le plus spectaculaire qui soit.
De fait, Le retour des morts vivants 3 offrira au spectateur médusé les délires visuels les plus imaginatifs et les plus fous qu’on ait vu sur un écran dans les années 90, ce qui l’a imposé dès sa sortie comme une œuvre importante, rare et précieuse, de celles qui traverseront le temps sans problème et qu’on regardera probablement encore dans cinquante ans en se demandant ce que prenait Brian Yuzna pour nous pondre des films aussi dégénérés et déviants. On notera également que l’immense réussite du film ne serait complète sans un final apocalyptique très éloigné du « happy end » généralement de rigueur dans ce genre de production, et sans la prestation intense du couple composé à l’écran par Mindy Clarke et J. Trevor Edmond, qui ne trouveraient jamais par la suite de rôles suffisamment emblématiques pour se démarquer durablement.
« Et que sont-ils devenus ? » me demanderez-vous. Si Mindy Clarke n’a jamais réellement arrêté de tourner, on ne la reverra au cinéma qu’en 1996 dans Killer tongue, puis en 1997 dans Spawn. Elle s’est depuis largement recyclée dans la série TV. J. Trevor Edmond quant à lui abandonnera sa carrière d’acteur au tournant des années 2000 après avoir tenu un petit rôle dans Le maître des illusions (lire notre article). Quant à Brian Yuzna, il n’a plus tourné de long-métrage depuis Deep water, également connu sous le titre d’Amphibious 3D, en 2010. Une société rejetant de la sorte ses génies créatifs les plus révolutionnaires ne mérite de toute façon probablement pas que ces derniers daignent encore tourner pour elle. Quoi qu’il en soit, il semblerait qu’il développe depuis quelques années avec son ami Corbin Bernsen un projet intitulé The plastic surgeon (« Le chirurgien »), dont on ne sait réellement s’il s’agit d’une suite ou d’un reboot des deux opus de la saga Le dentiste, tournés en 1996 et 1998. Espérons que ce projet aussi dingue que doucement anachronique aboutisse…
Le Combo Blu-ray + DVD
[5/5]
C’est bien sûr à nouveau Le chat qui fume que l’on retrouve derrière cette belle édition Combo Blu-ray + DVD du Retour des morts vivants 3, qui débarque chez nous rien de moins que 18 ans après une première édition DVD qui naturellement avait bien besoin d’un petit rafraîchissement technique. Et à ceux qui ronchonnaient déjà d’entrée de jeu en avançant que le DVD de 2001 nous proposait une version « open matte » du film et qu’il faudrait par conséquent la garder pour posséder les deux versions du film, remettons tout de suite les choses au clair : cette édition estampillée Le chat qui fume nous propose à la fois la version au format cinéma 1.85 et la version open matte 1.33 (en qualité DVD). Le tout est comme d’habitude proposé dans un packaging de toute beauté : un digipack trois volets aux couleurs du film surmonté d’un fourreau cartonné au visuel reprenant les visuels promotionnels du film. La conception graphique de l’ensemble est assurée par le talentueux Fred Domont, et il s’agit d’une édition limitée à 1000 exemplaires. Donc dépêchez-vous.
Cette nouvelle et somptueuse édition du Retour des morts vivants 3 constitue donc l’occasion idéale pour découvrir ou redécouvrir au plus vite ce grand chef d’œuvre du cinéma horrifique, d’autant que le film de Yuzna est proposé ici dans des conditions techniques extraordinaires : l’encodage est soigné, la définition sans souci, et les couleurs vives et éclatantes. La copie est de très bonne tenue, avec un grain cinéma respecté aux petits oignons, et des contrastes finement travaillés. La restauration a fait place nette des tâches, rayures et autres griffes disgracieuses, et propose une image extrêmement stable, avec néanmoins quelques fourmillements discrets sur certaines séquences. Côté son, l’éditeur nous propose une version originale en DTS-HD Master Audio 2.0, sans souffle ni bruits parasites. Les dialogues sont parfaitement clairs et proposent un confort acoustique optimal les sous-titres ne souffrent d’aucun problème particulier. On notera néanmoins un petit problème technique sur la VF d’époque, la piste française sortant uniquement sur l’enceinte gauche. L’éditeur procède à un échange gratuit si vous l’avez déjà acheté, en envoyant un mail à l’adresse echange@lechatquifume.com et en précisant votre numéro de commande.
Non content de nous proposer une édition techniquement irréprochable, l’éditeur nous offre également une bonne grosse fournée de suppléments : on commencera avec les suppléments nécessitant de revisionner le film dans sa totalité. Outre la présence de la piste musicale isolée avec les effets sonores, qui s’avère en fait une véritable redécouverte de la musique du film, on continuera ensuite avec un commentaire audio du réalisateur Brian Yuzna, puis avec un commentaire audio de Melinda « Mindy » Clarke et de Tom Rainone, superviseur des effets spéciaux et réalisateur de seconde équipe. Le premier commentaire, très informatif et passionnant, permettra surtout au maestro Brian Yuzna de revenir sur l’histoire de la production ainsi que sur son implication dans le projet. Melinda Clarke et Tom Rainone quant à eux évoqueront d’avantage leurs souvenirs et quelques anecdotes sur le tournage du film, notamment sur les effets spéciaux, en particulier en ce qui concerne ceux directement liés au personnage de Melinda Clarke. Les deux commentaires sont néanmoins uniquement disponibles en VO sans sous-titres français, et seront donc à réserver aux anglophones confirmés.
On continuera ensuite avec des entretiens avec les deux acteurs principaux. On retrouvera Julie la zombie dans un entretien avec Melinda Clarke (« Mlle Morte-vivante », 19 minutes), qui reviendra longuement sur les débuts de sa carrière à la TV et au cinéma (notamment dans la série Des jours et des vies), qui lui auront permis de décrocher ce rôle majeur à seulement 24 ans ; elle se remémorera son expérience d’actrice débutante, du casting pour Le retour des morts-vivants 3 à sa préparation pour le rôle. Elle reviendra sur les nombreuses heures de maquillage qui furent nécessaires pour la réalisation des effets spéciaux, ainsi que sur l’alchimie avec son partenaire de jeu. Ce dernier prendra la parole dans un entretien avec J. Trevor Edmond (« Roméo est blessé », 17 minutes) qui lui permettra de partager ses souvenirs du tournage ainsi que quelques anecdotes – on apprend ainsi qu’il n’était pas vraiment « dépaysé » par l’intrigue du film, dans le sens où il avait joué plusieurs centaines de fois « Roméo et Juliette » sur scène.
Avec les suppléments suivants, on passera de devant à derrière la caméra, histoire d’aborder plus dans le détail la conception du Retour des morts vivants 3. On commence avec un entretien avec Steve Johnson et Chris Nelson, artistes en charge des effets spéciaux (« Le mort ressuscité », 19 min). Il y évoqueront en détail les effets de maquillage, leurs propos étant entrecoupés d’images du tournage. Le comédien et réalisateur Anthony Hickox – qui incarne le Docteur Hickox dans le film – évoquera également ses souvenirs du tournage, pour notre plus grand plaisir. On enchaînera ensuite avec un amusant entretien avec David Tripet, directeur de la production, et Chris Roth, monteur et superviseur de la post-production (« Trimark et Trioxine », 14 minutes). Ils y reviendront sur le contexte de production du film et dresseront un bref historique du marché de la vidéo domestique à l’époque. Ils y loueront largement – et à raison – le génie de Brian Yuzna ainsi que sa « note d’intention » sur le film, même s’il est évident que les partis pris du cinéaste étaient de toute façon clairs comme de l’eau de roche et s’avèrent véritablement transcendés par le produit fini.
Last but not least, on terminera avec un passionnant entretien avec Brian Yuzna et le scénariste John Penney (« De la poussière à la poussière », 27 minutes), le plus long et le plus formidable des suppléments de cette édition. Il s’agit d’une conversation entrecoupée d’images du tournage, qui reviendra de façon vraiment captivante sur l’écriture et la genèse du Retour des morts-vivants 3. Ils évoqueront par exemple l’existence d’une autre fin, et reviendront plus généralement sur les incroyables effets spéciaux du film ainsi que la sortie et la « vie » du film au fil des années.
Pour terminer, l’éditeur nous propose également une poignée de bandes-annonces de films déjà sortis ou à venir chez Le chat qui fume. Une édition indispensable pour un film qui l’est tout autant.