Le Président et Miss Wade
États-Unis : 1995
Titre original : The American President
Réalisateur : Rob Reiner
Scénario : Aaron Sorkin
Acteurs : Michael Douglas, Annette Bening, Martin Sheen
Éditeur : Rimini Éditions
Durée : 1h53
Genre : Comédie, Romance
Date de sortie cinéma : 13 décembre 1995
Date de sortie DVD/BR : 5 janvier 2022
Andrew Shepherd est un président des États-Unis jeune, dynamique, populaire. Veuf, il élève seul sa fille. Candidat à un second mandat, il veut faire voter une loi sur la diminution de la pollution due aux carburants. Lorsqu’il tombe amoureux d’une avocat…
Le film
[3,5/5]
25 ans après sa sortie dans les salles du monde entier, Le Président et Miss Wade apparaît clairement comme le produit d’une époque révolue. Flashback : on est ici en 1995, et moins de deux ans après l’élection de Bill Clinton, le président des États-Unis avait plutôt la côte à Hollywood. Même si le nom de Clinton n’était jamais cité, la figure du président américain fut en effet au centre de plusieurs films à l’époque, le présentant tantôt comme « LE » super-héros du monde libre, tantôt comme un personnage plus trouble. De Président d’un jour (1993) à Independence Day (1996) en passant par Président ? Vous avez dit président ? (1996), Les pleins pouvoirs (1997) ou Air Force One (1997), de nombreux films de studios mirent en scène le président des États-Unis sans passer par le prisme de la biographie ou du film purement « politique ».
Le Président et Miss Wade fait évidemment partie de cette vague de films, imaginant pour l’occasion une romance entre un président veuf et une lobbyiste environnementale. Typique d’une époque où les maîtres-mots à Hollywood n’étaient pas « jeunesse et diversité », le film permettait à Rob Reiner de mettre en scène une histoire d’amour entre deux personnages d’âge mûr. Même s’il s’agit là d’une idée qui provoque un dégoût certain chez tous les ados, on ne peut que remarquer que c’était dans l’air du temps à l’époque, puisqu’une relation entre « séniors » était également au centre de Sur la route de Madison la même année. Rob Reiner reviendrait d’ailleurs sur le sujet quelques années plus tard, et de façon un peu plus « intime », avec Une vie à deux (1999).
De la même façon, si le milieu des années 90 n’est certes pas si éloigné de nous, Le Président et Miss Wade transporte néanmoins le spectateur au cœur d’un autre siècle, et le contexte du film ne cesse de nous le rappeler : l’économie américaine était florissante, les préoccupations politiques n’étaient pas centrées sur le terrorisme, et les médias étaient encore dominés par la presse et la télévision : Internet et les réseaux sociaux n’étaient à l’époque pas encore devenus les puissants leviers d’opinion qu’ils deviendraient quelques années plus tard. Tous ces éléments confèrent un caractère un peu désuet au film de Rob Reiner, même si dans l’absolu, les deux grandes questions politiques abordées au cœur de l’intrigue du film – à savoir le réchauffement climatique et le contrôle des armes à feu dans le pays de l’oncle Sam – sont toujours aujourd’hui des sujets sensibles et préoccupants.
25 ans de recul ont également considérablement changé le regard que pourra porter le cinéphile sur Le Président et Miss Wade : si le nom du réalisateur Rob Reiner est malheureusement un peu retombé dans l’oubli de nos jours, il semble en revanche difficile d’ignorer la présence au générique du scénariste-star Aaron Sorkin, ici crédité en tant qu’unique scénariste en dépit d’accusations de plagiat de la part de Kyle Morris et William Richert. Ainsi, si Le Président et Miss Wade n’est assurément pas un film « politique », mais une fable assumant et revendiquant l’héritage de Frank Capra, on ne pourra s’empêcher d’y voir aujourd’hui une espèce de « brouillon » pour la série TV À la Maison Blanche (1999-2006) – cette impression sera d’ailleurs renforcée par le fait qu’une douzaine d’acteurs du film réapparaîtraient par la suite au casting de la série.
Les aspects les plus intéressants et les plus réussis du Président et Miss Wade sont d’ailleurs ceux qui préfigurent la série À la Maison Blanche : Aaron Sorkin prend en effet un malin plaisir à dépeindre la Maison Blanche comme un défilé ininterrompu de collaborateurs suivant le Président à la trace et lui demandant un peu de son attention. Rob Reiner met en scène ces allées et venues avec un sens du rythme assez remarquable, et parvient régulièrement à atteindre un certain effet comique, notamment lorsque la romance du Président devient le centre de l’histoire, et que se mettent en place les traditionnels conflits entre amour et aspirations professionnelles.
Le tout est soutenu par une série d’acteurs solides : Michael Douglas et Annette Bening sont au centre du récit, mais on notera également la présence d’acteurs de renom tels que Martin Sheen (qui serait promu au rang de président dans la série de 1999), Michael J. Fox (qui parvient, au détour d’une séquence, à s’amuser du contrat qui le liait à la marque Pepsi jusqu’au début des années 90 – on vous laisse repérer à quel moment), Anna Deavere Smith, David Paymer, Samantha Mathis ou encore la regrettée Anne Haney. Et en tant que spectateurs hexagonaux, on ne peut s’empêcher également de saluer la prestation des deux acteurs incarnant le Président français et la première dame, décrits à l’écran comme deux hurluberlus obsédés par Louis XVI. Ils sont interprétés par l’acteur anglais Clément von Franckenstein (de son vrai nom Clement George Freiherr von und zu Franckenstein) et l’actrice israélienne Efrat Lavie.
Le Blu-ray
[4/5]
C’est Rimini Éditions qui nous propose aujourd’hui Le Président et Miss Wade en Blu-ray, ce qui permettra aux cinéphiles de revoir leur jugement sur le film vingt-cinq ans après sa sortie. Pour ce faire, l’éditeur a tout particulièrement soigné sa galette Haute-Définition, qui propose une image précise, avec des couleurs chaudes et des contrastes au taquet. Le grain cinéma est pleinement respecté, même s’il est peut-être un poil trop accentué sur les scènes les plus sombres. Néanmoins, le film de Rob Reiner s’offre sans conteste un très beau rendu HD. Côté son, le mixage de la version originale est proposé en DTS-HD Master Audio 5.1 et s’avère bien enveloppant, dynamique et vraiment punchy. La version française (avec notamment Patrick Floersheim assurant le doublage de Michael Douglas), s’impose quant à elle dans un solide mixage DTS-HD Master Audio 2.0.
Dans la section suppléments, l’éditeur nous propose, outre la traditionnelle bande-annonce d’époque, une riche présentation du film par Mathieu Demaure (32 minutes). Auteur d’un bouquin consacré à Aaron Sorkin, le bonhomme connaît son affaire et nous livre une mise en contexte très complète, revenant sur la façon dont le scénariste est arrivé sur le projet, sur ses influences, sur ses obsessions ancrées depuis l’enfance… Il élargira naturellement son analyse à la série À la Maison Blanche ainsi qu’au reste de son œuvre. Malgré un débit haché doublé d’un léger bégaiement, Mathieu Demaure parvient à capter notre attention, et nous livre au final une présentation passionnante, qui nous en apprendra autant sur Le Président et Miss Wade que sur le reste de la carrière du scénariste / réalisateur. Mais ce n’est pas tout, puisque Rimini Éditions nous propose également de nous plonger dans un épisode de la série Les grands réalisateurs d’Hollywood consacré à Rob Reiner (26 minutes). Régulièrement diffusé sur les chaînes « cinéma » du câble et du satellite depuis 2009, ce sujet prend la forme d’un entretien avec le cinéaste, qui évoquera son parcours et les plus grands films de sa carrière, parmi lesquels Le Président et Miss Wade. Il va sans dire cependant que si sympathique qu’il soit, son film de 1995 fait bien pâle figure si on le compare à des films tels que This is Spinal Tap, Quand Harry rencontre Sally ou encore Stand by me. Pour autant, il abordera ses souvenirs du tournage et de sa collaboration avec Aaron Sorkin avec autant d’enthousiasme que pour les autres films de sa riche carrière.