Test Blu-ray : Le Mors aux dents

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Le Mors aux dents

France : 1979
Titre original : –
Réalisation : Laurent Heynemann
Scénario : Laurent Heynemann, Claude Veillot, Pierre Fabre
Acteurs : Jacques Dutronc, Michel Piccoli, Michel Galabru
Éditeur : StudioCanal
Durée : 1h39
Genre : Drame, Thriller
Date de sortie cinéma : 12 septembre 1979
Date de sortie DVD/BR : 6 décembre 2023

Charles Dréant, un personnage douteux, possède un fichier compromettant pour les hommes politiques en place. Loïc, un jeune ambitieux, est chargé de le récupérer. Il profite d’une escroquerie sur le tiercé, montée par Dréant, pour faire intervenir la police…

Le film

[4/5]

Si aujourd’hui le PMU semble un peu noyé dans la masse des multiples paris sportifs et autres jeux d’argent en ligne, dans les années 70, le tiercé constituait réellement un des piliers fondamentaux des institutions hexagonales. Renaud, dans sa fameuse chanson « Hexagone » en 1975, le dénonçait d’ailleurs avec véhémence : « La bagnole, la télé, le tiercé, c’est l’opium du peuple de France : lui supprimer, c’est le tuer, c’est une drogue à accoutumance ». Avec son deuxième film Le Mors aux dents en 1979, Laurent Heynemann dressait le même constat.

Grâce à un thriller à la mécanique bien huilée (et développant par ailleurs un réalisme qui fait froid dans le dos), le scénariste / réalisateur utilise Le Mors aux dents pour dénoncer de façon détournée les magouilles liées aux accointances entre le pouvoir politique et les grands groupes industriels. Le PMU – qui laisse ici la place au JMI (Jeux Mutuels Interurbains) – en prend de fait sérieusement pour son grade : les paris mutuels urbains sont de fait désignés comme le terrain d’escroqueries d’ampleur nationale, permettant aux politiques ainsi qu’au « Grand Capital » de tenir les masses sous leur joug tout en s’assurant un enrichissement ayant le couvert de la légalité.

L’intrigue du Mors aux dents est articulée autour d’une course truquée, et des intérêts qu’y portent trois personnages très différents les uns des autres. Il y a tout d’abord Dréant (Michel Galabru), un riche industriel sur le déclin, qui est à l’origine de cette course arrangée. Pour « arroser » les différents intervenants, il impliquera dans sa combine un jeune politicien nommé Le Guenn (Jacques Dutronc), à qui il extorquera une importante somme d’argent en échange d’un fichier très compromettant pour différents membres du gouvernement. Enfin, le film mettra également en scène le personnage de Chazerand (Michel Piccoli), parieur professionnel aux méthodes louches, interdit sur les champs de courses, à la tête d’une organisation de parieurs, et bête noire du patron du JMI.

La grande force de Laurent Heynemann est donc de nous donner à découvrir trois personnages ayant chacun des méthodes et des armes différentes afin d’exploiter la société capitaliste pour leurs propres intérêts. Et finalement, en jouant sur les agissements contradictoires de ces trois hommes, Le Mors aux dents va démontrer de façon assez subtile que quel que soit celui qui parviendra à ses fins, le grand perdant sera toujours, au final, le joueur lambda déposant sa grille au café du coin et qui, dans tous les cas, se verra lésé par ces puissants agissant dans l’ombre du JMI.

Pour autant, et si antipathiques que soient les personnages au cœur du trio mis en avant par Le Mors aux dents, Laurent Heynemann et ses coscénaristes Claude Veillot et Pierre Fabre évitent la tentation de les diaboliser complètement : ils restent avant tout des hommes, auquel le spectateur pourra tour à tour s’identifier selon les séquences. Qu’il s’agisse de Dréant, Le Guenn ou Chazerand, chacun a ses forces mais aussi ses faiblesses, et commettra des erreurs qui sont le signe de leur humanité. Le film leur permet, chacun à leur tour, de disposer d’un ascendant sur les autres, mais au final ce sera bien Le Guenn qui disposera du plus d’atouts grâce à sa position politique et à son machiavélisme, qui lui permettra d’utiliser Chazerand pour atteindre Dréant, selon la fameuse théorie des dominos.

Et si Le Mors aux dents fonctionne aussi bien, c’est sans doute également grâce à ses acteurs, absolument excellents : outre Jacques Dutronc, Michel Piccoli et Michel Galabru, on reconnaîtra également au casting du film une poignée de têtes connues, que l’on est bien content de retrouver au détour d’une séquence ou d’une autre : Roland Blanche, Jean Benguigui, Charles Gérard, Daniel Russo, Philippe Khorsand… A eux tous, ils contribuent à créer une faune humaine des plus réalistes, qui permet au film de Laurent Heynemann de s’imposer comme un des polars les plus singuliers et les plus originaux des années 70.

Le Blu-ray

[4/5]

On termine aujourd’hui notre exploration de la dernière vague de la collection Blu-ray « Nos années 70 » dirigée par Jérôme Wybon avec Le Mors aux dents, et côté Blu-ray, comme d’hab, le boulot a été soigné de la part de StudioCanal : la copie est d’une très belle propreté, le grain argentique est respecté à la lettre, le piqué est d’une finesse et d’une précision vraiment étonnantes, la profondeur de champ est remarquable, bref, c’est du très beau boulot, naturellement proposé en 1080p. Bref, on est en présence d’un très beau Blu-ray. Côté son, c’est la grande classe également : le film nous est proposé dans un mixage DTS-HD Master Audio 2.0 d’origine parfaitement clair et net. Chapeau bas à l’éditeur !

Du côté des suppléments, comme sur les autres films de la collection, on pourra tout d’abord choisir de regarder Le Mors aux dents avec en préambule la traditionnelle présentation du film par Jérôme Wybon (5 minutes), qui s’efforcera de le remettre dans son contexte de tournage. On continuera ensuite avec un entretien avec Michel Galabru (34 minutes), enregistré pour la RTBF en 1990. L’acteur commencera par faire visiter au spectateur la péniche sur laquelle il vivait à l’époque, puis reviendra sur sa carrière, ainsi que sur sa relation avec Louis De Funès, sur les imitations de ce dernier (punaise, chat, poule) ou encore sur ses souvenirs de la Comédie Française. Il terminera en rendant un hommage vibrant aux acteurs de comédie. On terminera enfin par un entretien avec Laurent Heynemann (23 minutes), enregistré pour FilmoTV, dans lequel il reviendra sur ses débuts ainsi que sur ses différents films.

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