Le Loup-garou de Londres
États-Unis, Royaume-Uni : 1981
Titre original : An American Werewolf in London
Réalisation : John Landis
Scénario : John Landis
Acteurs : David Naughton, Griffin Dunne, Jenny Agutter
Éditeur : L’Atelier d’Images
Durée : 1h38
Genre : Fantastique
Date de sortie cinéma : 4 novembre 1981
Date de sortie DVD/BR : 24 août 2021
Deux jeunes routards américains David et Jack, se lancent dans un voyage en Europe de plusieurs mois. Mais, alors qu’ils se trouvent au beau milieu d’une campagne anglaise désolée, les gens du pays les mettent en garde : « Restez sur la route, ne vous aventurez pas dans la lande » et « Attention à la Lune ». Les deux garçons s’enfoncent pourtant dans l’obscurité, lorsqu’ils sont surpris par un hurlement terrifiant… Ils ne savent pas encore qu’ils sont traqués par une créature mythique et assoiffée de sang. Ceux qui succombent à ses blessures se transforment en morts-vivants, condamnés à errer sur la Terre pour l’éternité, mais un tout autre sort attend ceux qui survivent…
Le film
[3/5]
Sorti sur les écrans du monde entier en 1981, Le Loup-garou de Londres a quasi-immédiatement été considéré comme un classique instantané du genre horrifique. Acclamé tout à la fois par la critique et le public, le film a contribué à faire de John Landis un des Masters of Horror de sa génération, alors que rien dans sa carrière jusque-là ne le prédisposait particulièrement à endosser ce costume, et qu’il ne signerait finalement après coup que très peu de films flirtant avec le fantastique.
De ce fait, le talent de John Landis s’est régulièrement vu dénigré au fil de sa carrière, surtout d’ailleurs sa capacité à faire naître et maintenir une réelle tension dramatique au cœur de ses œuvres. On se souvient tout particulièrement de l’équipe éditoriale du magazine Starfix qui, dans les années 80, arguait que le cinéaste ne pouvait pas être, à proprement parler, considéré comme un véritable metteur en scène. Les raisons avancées par Christophe Gans et son équipe à l’époque étaient que Landis se reposait quasi-entièrement sur ses acteurs, sans réellement apporter de plus-value en termes de réalisation.
Ainsi, selon les petits gars de Starfix, ce sont les acteurs qui donnaient leur énergie aux films les plus réussis de John Landis. Pour le reste, le bonhomme se contenterait de poser sa caméra et de laisser les acteurs faire le job. Par certains aspects, on ne peut tout à fait leur donner tort, tant le cinéma de Landis semble à priori dénué de tout artifice. Dans l’idée que l’on peut se faire de son cinéma, tout ce qui dénote de la grammaire du cinéma lui est presque totalement étranger – à tel point qu’il semble même incroyable qu’on ait pu un moment le comparer à un formaliste de génie tel que Steven Spielberg, tant leurs conceptions respectives du cinéma semblaient opposées, et ce dès leur premier long métrage – Schlock d’un côté, Duel de l’autre… Y’a-t-il vraiment débat ?
Il découle souvent – pour ne pas dire toujours – de ce triste état de fait un flagrant manque de rythme dans le cinéma de John Landis. Et quarante ans après sa sortie, Le Loup-garou de Londres s’impose plus que jamais comme l’exemple-type des carences de Landis en termes de rythme et de mise en scène. A notre découverte du film en VHS dans les années 80, on affirmait même, avec la morgue d’une jeunesse venant tout juste de découvrir Evil Dead, que Le Loup-garou de Londres représentait grosso-merdo le niveau zéro de la mise en scène horrifique. A force de revoir le film cela dit, environ tous les dix ans et à chaque fois sur un support différent, on a pu redonner sa chance au film de Landis, et la maturité aidant, on a fini par lui trouver des qualités, de mise en scène notamment, ce qui va clairement à l’encontre de ce que pensaient les journalistes de Starfix.
On ne peut par exemple nier une certaine inspiration de la part de Landis en ce qui concerne certains axes de prise de vue, tout autant que certains plans, qui demeurent encore aujourd’hui admirablement pensés et efficaces – on pense tout particulièrement à la chute du loup-garou sous les balles des villageois, que l’on découvre à travers les yeux de David au début du film, ou encore à l’apparition du loup-garou en plongée durant la séquence du métro. Ainsi, on n’ira pas aujourd’hui, comme on l’a fait par le passé, nier l’œil du cinéaste, qui existe bel et bien, et permet sans doute encore aujourd’hui à ce Loup-garou de Londres d’impressionner la rétine.
Le film est par ailleurs plutôt bien écrit et interprété ; si David Naughton fait certes un héros un peu falot (l’acteur n’a jamais vraiment réussi à transformer l’essai par la suite), on se régalera en revanche de la présence à l’écran du très énergique Griffin Dunne, futur héros de After Hours et de Who’s That Girl, ainsi que de l’actrice britannique Jenny Agutter, révélée quelques années plus tôt par L’Âge de cristal. Pour autant, en termes de rythme à proprement parler, le spectateur n’aura pas grand-chose à se mettre sous la prunelle mis à part les quelques séquences à effets spéciaux signés Rick Baker : les maquillages de Griffin Dunne en zombie sont encore extrêmement bien foutus aujourd’hui, et si la métamorphose de David a pris un méchant coup dans la gueule, elle s’imposait il y a quarante ans comme tout simplement révolutionnaire. Pour autant, passée la première moitié du Loup-garou de Londres, on sent l’ennui pointer le bout de son nez, et John Landis ne parviendra jamais réellement à faire « remonter » la sauce.
Ainsi, à partir du moment où David commence ses virées nocturnes, Le Loup-garou de Londres se fait plutôt amalgame et référentiel (l’idée du « film dans le film », la visite de tous les lieux les plus représentatifs de Londres…) quand on l’aurait souhaité innovant, et le rythme s’en ressent clairement, devenant peu à peu soporifique. D’ailleurs, vous ne vous êtes jamais endormi devant Le Loup-garou de Londres ? Bref, on avouera qu’en dépit des nombreuses chances qu’on a laissé et relaissé au film de Landis au fil des années, son Loup-garou de Londres nous apparaît toujours aujourd’hui comme une occasion ratée, surtout quand on considère qu’en 1981, Joe Dante et Sam Raimi réinventaient de leur côté quasi-totalement le cinéma d’horreur avec Hurlements et Evil Dead.
Le Blu-ray
[5/5]
Déjà sorti il y a une dizaine d’années chez Universal, Le Loup-garou de Londres a ressorti les griffes cet été avec une superbe édition Blu-ray 4K Ultra HD de-la-mort-qui-tue chez L’Atelier d’Images. Fort de ce nouveau transfert 4K, l’éditeur nous propose donc parallèlement une nouvelle édition Blu-ray du film de John Landis qui, il va sans dire, explose littéralement la précédente à tous les niveaux. La restauration a gommé tous les défauts de l’édition précédente, et le film est bien entendu présenté en version intégrale, au format 1.85:1 respecté. Restituant parfaitement l’ambiance du film, le transfert du Blu-ray du Loup-garou de Londres est littéralement superbe. Précis, avec un beau piqué, malgré des couleurs très saturées et de multiples effets de fumée, le film s’impose comme une totale redécouverte. Côté son, le film de Landis s’offre un puissant mixage DTS-HD Master Audio 5.1, offrant une spatialisation intéressante et pleine de petites surprises acoustiques. La version française est uniquement proposée en DTS-HD Master Audio 2.0, mais assure une immersion parfaite au cœur du film, avec un bon petit dynamisme acoustique. On notera à destination des puristes qu’un mixage DTS-HD Master Audio 2.0 est également disponible en VO : sans souffle et parfaitement équilibré, naturel, respectant parfaitement la dynamique acoustique d’origine. Les sous-titres français ne posent pas de souci particulier.
Mais en plus de tout défoncer côté master, cette nouvelle édition Blu-ray du Loup-garou de Londres en rajoute encore une louche du côté des suppléments, que l’on qualifiera, pour utiliser un terme dont Les Années Laser aiment user et abuser, de littéralement pléthoriques. Carrément cinq heures de bonus, dont trois heures inédites. On commencera donc avec les suppléments recyclés des éditions précédentes, proposés en définition standard et VOST : les amoureux du film pourront donc réécouter le commentaire audio des acteurs David Naughton et Griffin Dunne, ainsi que se plonger dans un long making of rétrospectif (1h38). Réalisé par Paul Davis en 2007, ce documentaire revisite les lieux de tournage (Pays de Galles, Londres) vingt-cinq ans après, et nous propose des entretiens avec, entre autres, John Landis et Rick Baker, qui évoquera la conception des effets spéciaux. On découvrira également de petits extraits du storyboard ainsi que de nombreuses anecdotes de production. Représentant un gros travail d’archives et d’entretiens, ce document divisé en treize parties est remarquable, et s’avérera tout particulièrement passionnant dans les passages abordant les transformations respectives des deux acteurs principaux.
On continuera ensuite avec un entretien avec Rick Baker (8 minutes), qui évoquera une époque où les effets spéciaux n’étaient pas assistés par ordinateur. On passera rapidement sur la courte featurette d’époque (5 minutes) pour se concentrer d’avantage sur un entretien avec John Landis (18 minutes), qui s’exprime vraiment sans la moindre langue de bois, et confesse que son film était sans doute « trop drôle pour faire peur et trop effrayant pour faire rire ». On enchaînera ensuite avec un autre entretien avec Rick Baker (11 minutes) qui sera complété d’une featurette consacrée aux effets spéciaux et l’habile dispositif technique permettant de modifier les mains et les pieds de David Naughton (11 minutes). On terminera le tour des suppléments avec un bêtisier muet et pas drôle (3 minutes), une poignée de storyboards comparés avec les images du film (2 minutes), une galerie de photos (4 minutes) et la traditionnelle bande-annonce.
Mais ce n’est pas tout, puisque L’Atelier d’Images nous propose carrément un Blu-ray de bonus supplémentaires, cette fois tous proposés en Haute-Définition et VOST. On commencera donc avec un entretien avec John Landis (21 minutes) mené par deux journalistes fondateurs de Studio Magazine recyclés dans le documentaire ciné : Jean-Pierre Lavoignat et Christophe d’Yvoire. Comme à son habitude, Landis s’y montre assez amusant et plein d’autodérision. On continuera ensuite avec un entretien avec l’illustrateur Gil Jouin (9 minutes), qui reviendra sur son travail et celui de son père tout en déplorant les mutations de son métier ces dernières années. L’éditeur nous propose également une présentation du film par Philippe Guedj (31 minutes), au cœur de laquelle le journaliste (Point Pop) reviendra de façon très complète sur la genèse du Loup-garou de Londres, son tournage et son « héritage » dans la culture populaire.
On continuera ensuite avec plusieurs sujets inédits en France, mais produits à l’origine pour l’édition du film sortie chez les britanniques de Arrow Films. On commencera avec un nouveau et passionnant documentaire qui reviendra longuement sur le mythe du loup-garou à Hollywood (1h14). On y trouvera des entretiens avec John Landis, Joe Dante, Mick Garris, David Naughton ou divers historiens du cinéma, scénaristes ou techniciens en effets spéciaux. Le sujet suivant, intrigant mais solidement argumenté, évoquera « l’identité juive » du Loup-garou de Londres (11 minutes), déjà présente dans le scénario du Loup-garou de chez Universal en 1941, mais que John Landis a actualisé et développé dans son propre film. On aura également droit à un autre entretien avec John Landis (11 minutes), au cœur de laquelle il se remémorera l’écriture du scénario à la fin des années 60, ainsi qu’un entretien avec Corin Hardy (11 minutes), qui permettra au réalisateur du Sanctuaire et de La Nonne d’évoquer l’impact et l’influence que Le Loup-garou de Londres a pu avoir sur lui et sur son travail en tant que cinéaste. Film-culte oblige, une featurette abordera également les « Movie props » récupérés par les collectionneurs (8 minutes), tels qu’on en voit en vitrine dans les restaurants Planet Hollywood : l’anorak North Face de David, un masque de loup-garou nazi, etc.