Le baron rouge
États-Unis : 1971
Titre original : Von Richthofen and Brown
Réalisation : Roger Corman
Scénario : John William Corrington, Joyce Hooper Corrington
Acteurs : John Phillip Law, Don Stroud, Barry Primus
Éditeur : Movinside
Durée : 1h36
Genre : Guerre
Date de sortie cinéma : 14 juillet 1971
Date de sortie DVD/BR : 23 mai 2017
En 1916, dans la France occupée, une forte rivalité oppose d’un côté le baron von Richthofen, surnommé le « Baron Rouge », qui est à la tête de l’escadrille allemande, et de l’autre l’as canadien Roy Brown…
Le film
[4/5]
En France, on a parfois tendance à résumer Roger Corman à une simple casquette de producteur débrouillard et un brin cynique. C’est un tort : on oublie trop souvent le grand cinéaste qu’il fut avant de prendre sa retraite de réalisateur, au fur et à mesure, au fil des années 70. Touche à tout, aussi à l’aise dans la chronique socio-politique (le formidable The intruder) que dans le formalisme le plus pur (ses sublimes films gothiques adaptés d’Edgar Allan Poe), Corman avait un don indéniable pour capter l’air du temps, et s’avérait un sacré metteur en scène, surtout quand les budgets qui lui étaient alloués lui permettaient de porter à l’écran ses idées les plus folles.
Tourné en 1971, Le baron rouge est d’ailleurs un de ses derniers films en tant que réalisateur. Mis en boite avec un budget de même pas un million de dollars, il s’agit d’une impressionnante carte de visite pour Corman cinéaste, puisque le film donne l’impression d’avoir coûté, au bas mot, cinq à dix fois plus que ce qu’il a coûté en réalité. Imaginatif dans sa mise en scène, impressionnant dans ses scènes d’action aériennes, Le baron rouge surfe certes sur le succès du Crépuscule des aigles (1966), mais le film de Roger Corman s’inscrit surtout dans une veine de cinéma dit « d’exploitation », direct et efficace, et parvient de fait sans peine à se créer une identité propre. Ainsi, la narration du film tournera surtout autour de l’affrontement de deux soldats (Von Richthofen & Brown, qui est d’ailleurs le titre original du film), qui aimeraient s’affronter « à la loyale » mais se retrouvent finalement au cœur d’un immense charnier à cause des hautes instances militaires des deux camps, désireuses de gagner par tous les moyens possibles, et abandonnant de fait toute idée d’honneur ou de guerre « propre » ; les coups bas s’enchaîneront dans la dernière bobine et provoqueront la mort de milliers de civils.
Si l’on met de côté l’aspect purement formel du film, qui s’avère très réjouissant, un des éléments les plus intéressants du scénario du Baron rouge se situe justement dans la description de Von Richthofen et Brown, qui évite brillamment le côté manichéen qu’il aurait pu prendre, et inverse notamment la côte de sympathie d’un camp à l’autre – Von Richthofen l’allemand apparaît en effet comme un personnage bien plus sympathique que Brown, imbu de sa personne, déclarant au journaliste du Toronto Star qu’il aime les françaises « with both their arms and legs » (avec deux bras et deux jambes) suite à sa rencontre avec une éclopée dans les environs de Saint-Omer. Si la grandeur d’âme semble lui faire défaut, ce n’est pas le cas de Von Richthofen, que le spectateur finira naturellement par trouver beaucoup plus « humain ». Un retournement de situation non pas inédit mais suffisamment rare pour être souligné.
Le Blu-ray
[4,5/5]
Movinside inaugure le 23 mai une nouvelle collection de Blu-ray / DVD consacrée au « Film de Guerre ». Les quatre premiers titres de la collection sont Opération Torch (George King, 1944, DVD), La bataille des V-1 (Vernon Wells, 1958, DVD), Le baron rouge (Roger Corman, 1970, Blu-ray & DVD) et L’assaut des jeunes loups (Phil Karlson, 1973, Blu-ray & DVD).
L’éditeur nous propose sur le Blu-ray du Baron rouge une image absolument satisfaisante : le format 1.85 est respecté, de même que la forte granulation d’origine, rendant justice à la belle photo du film signée Michael Reed (Dracula, prince des ténèbres) et à ses cadres soignés. La définition ne pose pas de problème particulier, le piqué est précis, bref c’est du tout bon, la restauration a vraiment porté ses fruits. Côté son, VF et VO sont proposées en DTS-HD Master Audio 2.0. Notre préférence ira à la version originale, en meilleure forme que sa petite sœur francophone un poil étouffée (dont on soulignera cela dit un doublage d’origine).
Pas de bonus, mais chaque nouveau film de Corman édité en vidéo est un cadeau en soi. Parce qu’en France, tout le monde connaît Roger Corman, mais seuls une vingtaine de films sur les cinquante-six qu’il a réalisés sont pour le moment disponibles chez nous en DVD : Le baron rouge est le premier film de Corman à sortir en Blu-ray dans l’hexagone.