La Main qui tue
États-Unis : 1999
Titre original : Idle hands
Réalisation : Rodman Flender
Scénario : Terri Hughes, Ron Milbauer
Acteurs : Devon Sawa, Seth Green, Jessica Alba
Éditeur : ESC Éditions
Durée : 1h32
Genre : Horreur, Comédie
Date de sortie cinéma : 28 juillet 1999
Date de sortie DVD/BR : 20 octobre 2021
Un matin d’Halloween, alors qu’il s’apprêtait à regarder la télévision après avoir pris soin de dévaliser le frigo, Anton découvre ses parents sauvagement assassinés. Il court chercher ses amis Mick et Pnub. Ensemble, ils vont tenter de faire face à la situation. Mais ils découvrent, terrifiés, qu’Anton pourrait bien être, contre sa volonté et sans même en avoir conscience, l’auteur de la vague de meurtres atroces qui frappe les environs. En effet, sa main droite a des comportements pour le moins étranges et n’obéit plus à son propriétaire…
Le film
[3,5/5]
Le fait d’aborder La Main qui tue, sorti sur les écrans en 1999, nous impose un petit retour en arrière destiné à nos plus jeunes lecteurs. Si cela peut paraître étonnant vingt ans plus tard, alors que les films fantastiques trustent régulièrement les écrans des multiplexes aux côtés des films de super-héros, il n’en était pas forcément de même dans la deuxième moitié des années 90. On vous rappelle qu’à l’époque, même le magazine Mad Movies était un bimestriel – il ne deviendrait mensuel qu’en 2001…
Pour autant, le genre fantastique commençait clairement à sortir du ghetto dans lequel il était enfermé, notamment grâce au succès à la TV de la série X-Files – Aux frontières du réel à partir de 1994. Au cinéma, le néo-slasher initié par Scream confirmerait cette tendance : les deux premiers films de la saga, respectivement sortis en France à l’été 1997 et 1998, réuniraient tous deux plus de deux millions de français dans les salles, et réaliseraient chacun plus de 170 millions de dollars de recettes à l’international.
La sortie de La Main qui tue arrive donc à une époque largement dominée par le néo-slasher, et donc par une vision quelque peu référentielle du genre, plus jeune, plus branchée, destinée à un public adolescent. Le film de Rodman Flender s’inscrit donc dans cette lignée, tout en la pervertissant quelque peu, et en cherchant à apporter au genre quelque-chose de nouveau et d’imprévisible. Pour ce faire, il optera pour le recours à un humour potache, voire même clairement graveleux, et à une violence inattendue, surtout étant donné la tonalité de l’ensemble.
Avec sa main possédée bien décidée à prendre son indépendance, l’intrigue de La Main qui tue évoquera bien entendu d’autres films d’horreur ayant marqué les mémoires, tels que Evil Dead II ou Le Retour des morts-vivants II – on pense aussi à la nouvelle de Clive Barker « Le corps politique » (dans le quatrième volume des « Livres de Sang »), qui avait été adaptée à l’écran pour le téléfilm à sketches Quicksilver Highway (Mick Garris, 1997). Bref, pas forcément le point de départ le plus original qui soit, mais Rodman Flender et ses scénaristes Terri Hughes et Ron Milbauer y apportent suffisamment de cœur et d’énergie pour retenir l’attention.
Une fois n’est pas coutume, et si vous me permettez un aparté personnel, une partie de la suite de cette critique sera ici rédigée à la première personne, car il m’a semblé intéressant de partager avec vous un ressenti un peu plus « personnel » concernant le film de Rodman Flender. Il me faut donc préciser qu’à sa sortie il y a un peu plus de vingt ans, La Main qui tue m’avait fait l’impression d’un « film pour jeunes fait par des vieux ». J’avais trouvé l’humour du film extrêmement poussif, les personnages assez mal dessinés et le tout n’avait provoqué chez moi que quelques sourires, même si d’un autre côté je saluais certains effets gore très bien torchés. Dans l’ensemble cela dit, l’impression générale était un sentiment de gâchis, essentiellement lié au fait que l’humour et les préoccupations des personnages principaux semblait émaner de vieux cons n’ayant que bien peu d’idées de ce qui motivait la jeunesse de l’époque.
Il faut dire qu’en 1999, j’étais moi-même encore jeune ; 22 ans plus tard, je suis largement passé de l’autre côté, et je suis le premier à ne plus rien comprendre à la jeunesse : Michou, Aya Nakamura, Bilal Hassani, TikTok, tout cela me dépasse. Et comme on aurait peut-être pu s’y attendre, La Main qui tue a d’avantage fonctionné sur moi avec vingt et quelques années de décalage. Pourquoi ? Hé bien probablement parce que je suis moi-même devenu un vieux con, pardi ! Et que la façon dont Flender et son équipe percevaient les « jeunes » à l’époque correspond sans doute beaucoup mieux à la façon dont je les perçois aujourd’hui. Ainsi, et malgré son cœur de cible adolescent, il semble bien que La Main qui tue marche mieux sur les spectateurs un peu – voire nettement – plus âgés. Allez comprendre…
Le fait est que Rodman Flender joue clairement la carte du décalage et de la générosité, surtout en ce qui concerne les effets gore, qui mélangent efficacement les images de synthèse et les effets « pratiques » réalisés sur le plateau. La Main qui tue est placé sous le signe du grotesque et des effets cartoonesques. Les scènes de comédie fonctionnent mieux lorsque tous les personnages se comportent sérieusement ; la deuxième partie du film est par conséquent plus réussie, notamment grâce au personnage incarné par Vivica Fox. On notera néanmoins que la prestation de Devon Sawa est solide, surtout lorsqu’il s’agit d’incarner un personnage luttant contre son propre corps, à la façon de Steve Martin dans Solo pour deux (Carl Reiner, 1984) ou de Martin Short dans L’aventure intérieure (Joe Dante, 1987).
Sorti en France la même semaine que Le Projet Blair Witch, qui totaliserait 860.000 entrées, La Main qui tue n’a attiré chez nous qu’un peu moins de 45.000 curieux dans les salles en 1999. A l’international, le film se vautrerait tout autant, récoltant cinq millions de dollars de recettes pour un budget estimé à vingt-cinq. Pour autant, le film de Rodman Flender se rattraperait en VHS et DVD, en devenant rapidement un des derniers hits de vidéo-clubs, peut-être grâce à la présence au casting de Devon Sawa, premier-rôle de Destination finale l’année suivante.
Le Blu-ray
[4/5]
C’est ESC Éditions qui nous offre aujourd’hui le grand plaisir de (re)découvrir La Main qui tue sur support Blu-ray : une excellente nouvelle pour tous les fans du film puisque ce dernier était jusqu’ici inédit en Haute-Définition en France. Ces derniers peuvent d’ailleurs se réjouir, puisque le master proposé ici par l’éditeur est de toute beauté, rendant un bel hommage à la sublime photo du film signée Christopher Baffa (Suicide Kings), et nous offrant un piqué satisfaisant ; le grain argentique d’origine est tout à fait respecté, les couleurs vives et franches à base d’éclairages vifs (rouge, vert) affichent une belle pêche, et les contrastes sont satisfaisants, ne bouchant jamais les noirs par excès de zèle. Côté son, le film nous est proposé à la fois en VF et en VO en DTS-HD Master Audio 5.1 : les deux mixages nous proposent une spatialisation solide, et un ensemble acoustique clair et sans souffle : du très beau travail. Dans la section suppléments, on trouvera la traditionnelle bande-annonce.