Test Blu-ray : Kuso

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Kuso

États-Unis : 2017
Titre original : –
Réalisation : Steven Ellison
Scénario : Steven Ellison, David Firth, Zack Fox
Acteurs : Hannibal Buress, George Clinton, David Firth
Éditeur : Potemkine Films
Durée : 1h33
Genre : Comédie, Film à sketches, Horreur
Date de sortie DVD/BR : 3 mars 2021

Un tremblement de terre a anéanti Los Angeles, laissant les survivants tels des mutants…

Le film

[WTF/5]

Kuso, Kezaco ?

Film étrange venu de nulle-part et débarquant en vidéo sous les couleurs de Potemkine Films, Kuso est un OVNI complètement inclassable, et un sacré pari de la part de l’éditeur. Un film à ne pas mettre devant tous les yeux, unique, et au moins aussi schizophrène que son réalisateur / scénariste / producteur Steven Ellison, alias Steve, mais également connu sous les sobriquets de Flying Lotus, FlyLo ou Captain Murphy.

Présenté pour la première fois à Sundance en 2017 (la légende raconte d’ailleurs que beaucoup de spectateurs auraient quitté la salle pendant la projection), Kuso est un film à sketches mélangeant le body horror bien dégueu à la David Cronenberg 70’s et la comédie surréaliste et très portée sur la provocation et l’humour trash.

Kuso nous proposera donc de suivre quatre petites histoires distinctes ayant pour personnages principaux une poignée de survivants à moitié mutants rescapés d’un tremblement de terre ayant détruit Los Angeles. Les différentes histoires sont entrecoupées tout au long du film par des passages en animation, des publicités, des extraits de journaux TV ou encore par des performances de « Spoken Word » signées Busdriver, figure incontournable du rap progressif aux États-Unis.

Eschatologique et scatologique

Film de fin du monde mettant en scène une humanité décadente en proie à l’extinction, Kuso s’avère sans la moindre contestation possible une œuvre d’Art totale, presque expérimentale, portée par la conviction et le talent de Steven Ellison. Mais attention, il s’agit aussi d’un film complètement barré, très spécial, qui risque fort d’en choquer plus d’un. Repoussant les limites du bon goût, Kuso multiplie en effet les outrances grotesques ainsi que les images à la fois extrêmement soignées et dérangeantes. Les idées sont folles et vont à cent à l’heure, mais le tout baigne littéralement dans le sperme, la merde, les glaires et autres fluides corporels.

Cafard géant sortant du cul d’un personnage (incarné par la légende du funk George Clinton !), pénis poignardé à l’aide d’un cintre, créature de la forêt se nourrissant de caca, furoncle parlant et taillant des pipes, on en passe et des meilleures : l’objectif de Steven Ellison et de ses deux coscénaristes David Firth and Zack Fox semble être de produire le film le plus trash et le plus scato jamais vu. Et force est de constater que d’excès en excès, ils y parviennent globalement.

L’Art, c’est de la merde

Kuso n’est certainement pas aussi bête qu’il en a l’air, mais le fait est que le film de Steven Ellison défie l’analyse critique. Il ne s’agit clairement pas d’un film d’exploitation, mais au contraire d’une œuvre d’Art brute : le recours constant de ses auteurs à la provocation la plus outrancière marque d’ailleurs sans doute une volonté claire d’évoluer dans une espèce de happening sauvage, et de nous signifier qu’il est vain de chercher à créer du sens là où il n’y en a pas.

Kuso développe pourtant, et contre toute attente, une certaine poésie dans le grotesque. On pourra également souligner que le spoken word assuré par Busdriver au début et à la fin du film fait clairement, sous couvert de slam surréaliste, allusion à les troubles sociaux et politiques qui sévissent aux Etats-Unis depuis des décennies. De toute façon, comme le dit l’un des personnages du film – avant de se mettre fumer un fœtus durant la séquence suivante – « L’Art, c’est de la merde ».

Dans le cas de Kuso, l’Art, c’est en effet de la merde. Littéralement parlant. Une grosse fontaine de diarrhée qui pulvérise tout sur son passage et permet au spectateur de vivre une des expériences cinématographiques les plus uniques – et les plus inoubliables – de toute sa vie de cinéphile.

Le Blu-ray

[4,5/5]

C’est Potemkine Films qui a aujourd’hui l’audace éditoriale de sortir Kuso au format Blu-ray, et le moins que l’on puisse dire, c’est que malgré la modestie de la production, le résultat s’avère absolument superbe d’un point de vue technique. La définition est au taquet, le piqué d’une précision redoutable, les couleurs éclatantes… En trois mots, on tient là un excellent boulot. Même constat pour la piste son, qui nous est proposée dans un mixage DTS-HD Master Audio 5.1 dynamique, proposant des effets de spatialisation parfois surprenants, ces derniers étant soutenus par un caisson de basse qui ne faiblit jamais. On déplorera juste que la piste soit mixée un peu bas : préparez-vous à augmenter le volume de votre ampli.

Côté suppléments, Potemkine Films fait dans l’originalité avec une présentation du film par Maxime Lachaud, programmateur, auteur, journaliste (38 minutes). Ce grand amateur de cinéma bis et de bizarreries en général reviendra sur la carrière de Steven Ellison / Flying Lotus, puis sur le contexte lui ayant permis de se lancer dans le cinéma, le « déclic » lui ayant été amené par Quentin Dupieux, qui lui a conseillé de faire un film de la façon dont il faisait de la musique. Maxime Lachaud reviendra également sur les diverses influences que l’on peut repérer au cœur de Kuso : David Cronenberg et David Lynch bien sûr, mais il notera également l’importance de Katsuhito Ishii, Hajime Ishimine et Shunichiro Miki, co-réalisateurs du film japonais Funky forest (2005), dont l’esprit loufoque semble avoir tout particulièrement marqué le cinéaste. On terminera le tour des suppléments avec la traditionnelle bande-annonce.

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