Test Blu-ray : Jusqu’au bout du monde

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Jusqu’au bout du monde

États-Unis, Mexique, Royaume-Uni : 2023
Titre original : The Dead don’t hurt
Réalisation : Viggo Mortensen
Scénario : Viggo Mortensen
Acteurs : Vicky Krieps, Viggo Mortensen, Garret Dillahunt
Éditeur : Metropolitan Vidéo
Genre : Western
Durée : 2h10
Date de sortie cinéma : 1 mai 2024
Date de sortie DVD/BR : 12 septembre 2024

L’Ouest américain, dans les années 1860. Après avoir fait la rencontre de Holger Olsen, immigré d’origine danoise, Vivienne Le Coudy, jeune femme résolument indépendante, accepte de le suivre dans le Nevada, pour vivre avec lui. Mais lorsque la guerre de Sécession éclate, Olsen décide de s’engager et Vivienne se retrouve seule. Elle doit désormais affronter Rudolph Schiller, le maire corrompu de la ville, et Alfred Jeffries, important propriétaire terrien. Il lui faut surtout résister aux avances plus qu’insistantes de Weston, le fils brutal et imprévisible d’Alfred. Quand Olsen rentre du front, Vivienne et lui ne sont plus les mêmes. Ils doivent réapprendre à se connaître pour s’accepter tels qu’ils sont devenus…

Le film

[3,5/5]

Pour son deuxième film en tant que réalisateur, Viggo Mortensen a choisi avec Jusqu’au bout du monde de se tourner vers le western, et signe à cette occasion un petit film plein de charme qui privilégie le romantisme et la féminité plutôt que la traditionnelle violence teintée de machisme qui est généralement l’apanage du genre. Le film met en scène Holger, interprété par Mortensen lui-même, un immigrant danois vivant dans le Nevada entamant une relation amoureuse de Vivienne, une Canadienne française incarnée par l’excellente Vicky Krieps (Old, Les Trois Mousquetaires – D’Artagnan), et suivra l’évolution de leur histoire au cœur d’une époque pour le moins troublée : celle de la Guerre Civile…

Si la romance n’est pas à proprement parler totalement absente des quelques poignées de westerns sortis sur les écrans ces trente dernières années, la relation amoureuse qui se crée à l’écran entre Holger et Vivienne constitue vraiment le cœur de Jusqu’au bout du monde et contre toute attente, cette orientation du récit permet à Viggo Mortensen de nous donner à voir l’Ouest sauvage à travers un prisme original et relativement imprévisible. L’idée est d’autant plus intéressante que le scénariste / réalisateur nous donne à voir s’épanouir le lien romantique entre deux personnages plus âgés, porté par une alchimie qui troque la passion et le drame pour quelque chose de beaucoup plus doux et de plus honnête.

Le couple formé à l’écran par les deux acteurs est sans conteste le point fort de Jusqu’au bout du monde, et il faut avant tout souligner la prestation de Vicky Krieps, qui compose une femme capable de voler de ses propres ailes, qui fera le choix de rejeter un homme plus riche pour tomber amoureuse de Holger. L’actrice germano-luxembourgeoise dépeint de façon extrêmement sensible et fine les complexités de son personnage, de même que sa compréhension du monde qui l’entoure. C’est probablement également parce qu’elle est une immigrée aux Etats-Unis qu’elle parviendra à tisser un lien si fort avec Holger : s’ils ne peuvent pas être considérés comme des marginaux dans leur communauté, ils se sentent comme tels, et leur rapprochement se fera d’autant plus facilement qu’ils sont littéralement entourés d’archétypes occidentaux plus stéréotypés, qui forment une menace sourde et omniprésente.

Cela dit, Jusqu’au bout du monde n’oublie pas pour autant de rester un western, avec tout ce que cela sous-entend de violence et de brutalité poussiéreuse. A ce titre, le personnage de Weston (Solly McLeod), qui assassine ceux qui s’opposent à lui en faisant porter le chapeau à d’autres grâce au pouvoir financier représenté par son père (Garret Dillahunt), tiendra une place importante au cœur du film. Il y a certes de nombreuses formes de cruauté au cœur du film, et les passages obligés du genre sont bel et bien au rendez-vous, notamment les affrontements et les coups de feu, mais le film conserve tout au long de son récit une certaine humanité.

En effet, la violence et la rudesse de l’Ouest ne sont pas les éléments qui intéressent le plus Viggo Mortensen dans Jusqu’au bout du monde : il privilégie au contraire la construction de relations réalistes entre les personnages, tout en travaillant de façon assez habile la notion de temps. Ainsi, avec l’aide de son monteur Peder Pedersen, il semble avoir fait le choix de découper son histoire en segments narratifs, qui feront office de chapitres dans le récit, osant commencer par la mort de Vivienne tout en évitant les transitions visuelles franches destinées à illustrer le temps qui passe et les années qui s’écoulent. Comme une façon de souligner que l’amour qui lie les deux personnages n’est pas sensible au temps qui passe…

Le Blu-ray

[4/5]

Après avoir édité le premier film de Viggo Mortensen Falling il y a quelques années, Metropolitan Vidéo lui reste fidèle, et c’est aujourd’hui sous les couleurs de Metro que débarque le Blu-ray de Jusqu’au bout du monde. Et comme d’habitude, on ne pourra que s’incliner devant le travail technique époustouflant abattu par l’éditeur : le western atypique de Viggo Mortensen s’offre en effet vraiment une galette Haute-Définition en tous points irréprochable. Le master est superbe, le piqué est d’une précision absolue, les couleurs sont extraordinaires, les contrastes s’avèrent plus que solides et les noirs sont profonds. En deux mots comme en cent, c’est du très beau boulot, rendant pleinement honneur au travail sur la photo de Marcel Zyskind (The Killer inside me). Côté son, VF et VO sont proposés en DTS-HD Master Audio 5.1, et les deux mixages imposent un solide dynamisme, dont le spectateur profitera surtout durant les nombreuses scènes en extérieur, qui proposent de multiples détails sonores parfaitement spatialisés. Que l’on visionne le film en français ou en anglais, le rendu acoustique est ample et fidèle aux ambitions artistiques de Viggo Mortensen.

Du côté des suppléments, on commencera avec un making of, étonnamment long et généreux (1h09). En dépit de quelques répétitions, ce documentaire est bien structuré et extrêmement complet. On y apprendra que comme de nombreux films sortis ces derniers mois, le développement et l’écriture de Jusqu’au bout du monde remontent au « Grand Confinement » de 2020. Plusieurs membres de l’équipe du film sont interviewés, mais au-delà des intervenants classiques dans ce genre de making of, on aura ici droit à des rencontres avec des métiers auxquels on ne donne pas souvent la parole. Ainsi, le sound designer Morten Groth Brandt ou le dresseur de chevaux Rex Peterson aborderont tous deux des aspects essentiels mais souvent négligés du genre western. Bien sûr, on aura également la chance de découvrir l’équipe du film au travail et à un aperçu des coulisses, des costumes, des décors et de leur évolution au fil des séquences, etc.

On continuera ensuite avec un entretien inédit avec Vicky Krieps et Viggo Mortensen (10 minutes), ayant la particularité d’avoir été réalisé en français. Ils y reviendront sur le tournage de Jusqu’au bout du monde, sur sa photo et sa structure narrative, ainsi que sur la volonté de réaliser un western en prenant le point de vue d’une femme. Outre la traditionnelle sélection de bandes-annonces, l’éditeur nous propose pour terminer de découvrir quatre scènes coupées (7 minutes), qui sont toutes de bonne qualité et prolongeront assurément l’intérêt pour les fans du film. Elles capturent de jolis moments entre les personnages, mais on peut supposer qu’elles ont été écartées du montage final afin de resserrer le rythme du métrage.

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