Jeff Panacloc : À la poursuite de Jean-Marc
France : 2023
Titre original : –
Réalisation : Pierre-François Martin-Laval
Scénario : Daive Cohen
Acteurs : Jeff Panacloc, Claude Perron, Vincent Deniard
Éditeur : M6 Vidéo
Durée : 1h29
Genre : Comédie
Date de sortie cinéma : 20 décembre 2023
Date de sortie BR/DVD : 18 avril 2024
Jeff, homme calme et un peu candide, croise la route de Jean-Marc, un singe en peluche tout juste échappé d’une base militaire. Particularité : cette peluche… est vivante. Jean-Marc, sans gêne et sans filtre, embarque alors Jeff dans une aventure déjantée. Entre course-poursuite, rires et situations loufoques, rien ne va se passer comme prévu…
Le film
[3/5]
Pour ceux qui l’ignoreraient encore, Jeff Panacloc est un ventriloque français révélé par Patrick Sébastien il y a une dizaine d’années, s’étant fait connaître grâce à ses interactions avec Jean-Marc, une peluche de singe politiquement incorrecte, grossière et dévergondée. Sorti sur les écrans français à Noël 2023, Jeff Panacloc : À la poursuite de Jean-Marc est le premier rôle au cinéma de Jeff Panacloc, qui interprète ici son propre rôle en compagnie de la marionnette qui l’a rendu célèbre.
Ce qui pourra interpeller le spectateur à priori, c’est la façon dont Jeff Panacloc semble être arrivé au cinéma presque par hasard. Si ses spectacles avaient jusque-là été coécrits avec l’aide de ses complices Thomas Maurion et Tom Villa, le scénario de Jeff Panacloc : À la poursuite de Jean-Marc a en revanche été confié aux bons soins de Daive Cohen, à qui l’on devait le scénario des Nouvelles aventures d’Aladin. Par conséquent, il n’y a rien de vraiment étonnant à ce que la tonalité générale du film soit finalement assez différente de celles développée par l’humoriste dans ses spectacles.
La peluche Jean-Marc attirant énormément les enfants, Jeff Panacloc : À la poursuite de Jean-Marc jouera de fait plutôt la carte de la comédie familiale. Si la peluche délivre encore ici ou là quelques punchlines en-dessous de la ceinture, l’ensemble ne fait pas dans le trash décomplexé des spectacles joués depuis quelques années sur scène par Jeff Panacloc. On pourra également s’interroger sur le titre du film, qui utilise le nom de l’humoriste comme si ce dernier était au centre de l’intrigue, alors qu’il n’interprète pas son propre rôle, mais celui d’un gentil comédien au chômage, un peu geek, qui sera amené à croiser la route d’un singe en peluche se déplaçant et parlant par lui-même.
Cette volonté des producteurs du film de mettre le nom de l’humoriste en avant pourra semer une certaine confusion dans l’esprit du spectateur, dans le sens où il pourra s’avérer surpris de ne pas découvrir la même dynamique dans les interactions entre le ventriloque et sa marionnette. L’intrigue de Jeff Panacloc : À la poursuite de Jean-Marc imagine au contraire la rencontre de Jeff et de Jean-Marc sur le mode très classique du buddy movie, à la différence près que l’un des deux personnages centraux n’est pas un humain mais une peluche.
On peut comprendre l’enthousiasme de l’ex-Robin des Bois Pierre-François Martin-Laval à l’idée de mettre en scène un des rares « Puppet Movies » réalisés en France : à ce titre, on ne peut que souligner les nombreux défis techniques auxquels ont dû faire face les équipes de Jeff Panacloc : À la poursuite de Jean-Marc. Le pari est d’ailleurs globalement bien tenu : l’ensemble est parfaitement efficace, bien torché, et les enfants devraient se régaler à la découverte de ce petit film familial sans prétention.
Mais il y a un mais.
« Sans prétention » ne devrait pas forcément devenir le synonyme de « Sans ambition ». On ne peut par exemple que regretter le manque d’implication de Jeff Panacloc dans le scénario de Jeff Panacloc : À la poursuite de Jean-Marc. Si le film de Pierre-François Martin-Laval est ponctuellement amusant, il semble se refuser à retranscrire l’univers foisonnant développé par Panacloc dans ses spectacles qui, depuis de nombreuses années déjà, mettent en scène d’autres marionnettes que Jean-Marc. Pourquoi ne pas avoir opté pour l’utilisation de plusieurs marionnettes (telles que celles de Nabilouche, de Jacky, etc.), quitte à plonger le film dans un univers où les humains et les Puppets se côtoient, comme dans les nombreux films adaptés du Muppet Show ?
Quitte à utiliser le nom de Jeff Panacloc en gros sur l’affiche, on aurait pu rêver d’un univers déjanté au cœur duquel la marionnette du ventriloque prenait vie et cherchait à découvrir le secret de ses origines, tout en étant traqué par d’autres marionnettes et humains bossant pour le gouvernement, jusqu’à la découverte finale, dans la jungle de Sumatra, de plusieurs congénères de Jean-Marc, dont sa famille. Sans forcément aller jusqu’à proposer à Quentin Dupieux de mettre en scène Jeff Panacloc : À la poursuite de Jean-Marc et la rencontre au sommet entre Jean-Marc, Flat Eric et chef Didier, la marionnette de Fumer fait tousser, on a quand même vaguement tendance à se dire que le talent de Jeff Panacloc aurait mérité mieux que la petite intrigue cousue de fil blanc imaginée par Daive Cohen, avec son groupe de vilains militaires à la recherche d’une peluche qui parle.
À ce titre, il est d’ailleurs particulièrement révélateur que les passages les plus hilarants de Jeff Panacloc : À la poursuite de Jean-Marc ne mettent pas directement en scène Jeff et Jean-Marc, mais des interactions entre personnages humains, à la façon de ce gag imparable suivant un militaire (Patrick Ligardes) ayant d’énormes difficultés à énoncer un compte à rebours. Les apparitions de Pierre-François Martin-Laval devant la caméra, dans trois rôles différents, sont également réussies et assez drôles.
Au-delà du défi technique donc, Jeff Panacloc : À la poursuite de Jean-Marc laisse au spectateur un léger goût d’inachevé, et le public ne s’y est pas trompé : le film n’a attiré dans les salles qu’un peu plus de 650.000 français, ce qui est un résultat en demi-teinte, que l’on imagine très inférieur aux espoirs de son distributeur SND. De fait, on suppose que l’on n’est pas forcément près de revoir Jeff Panacloc et Jean-Marc au cinéma, même si on espère qu’une suite verra le jour, avec Jeff Panacloc aux manettes et une petite touche de folie supplémentaire. Et si mon scénario se terminant dans la jungle de Sumatra vous intéresse, n’hésitez pas, je suis dispo !
Le Blu-ray
[4/5]
Côté Blu-ray, la galette de Jeff Panacloc : À la poursuite de Jean-Marc éditée par M6 Vidéo rend pleinement honneur à la jolie photo du film signée Vincent Richard : le rendu visuel du film est de toute beauté, la définition et le piqué sont à couper le souffle et les couleurs explosent littéralement nos mirettes. Un soin tout particulier semble par ailleurs avoir été porté aux scènes sombres ou en basse lumière ; en deux mots comme en cent, c’est du très beau travail technique. Côté son, le film nous est proposé dans un mixage DTS-HD Master Audio 5.1 relativement sobre, nous proposant des ambiances finement distillées ; les scènes de poursuite profitent d’un pep’s et d’une spatialisation toute particulière.
Du côté des suppléments, M6 Vidéo nous propose tout d’abord un entretien avec Jeff Panacloc et Pierre-François Martin-Laval (8 minutes), qui permettra à l’ex-Robin des Bois de revenir sur son enthousiasme à l’idée de tourner un « Puppet Movie » à la française, tout autant que les difficultés que cela engendre. On pourra ensuite prolonger le plaisir par le biais d’un commentaire audio de Jeff Panacloc et Pierre-François Martin-Laval, également proposé en Picture-in-Picture, le réalisateur et l’acteur principal du film y étant naturellement accompagnés de la marionnette Jean-Marc. Si l’humoriste parvient à placer quelques vannes durant la première demi-heure, Jean-Marc sera dans l’ensemble assez silencieux, ce que Pef lui fera régulièrement remarquer. La piste est néanmoins plutôt plaisante et informative : le réalisateur et l’acteur y révéleront de nombreux secrets de tournage. On y apprendra notamment que Jeff Panacloc s’est blessé à la jambe lors du tournage de la scène de la rencontre avec Jean-Marc, et que de nombreuses astuces de mise en scène ont été nécessaires afin de cacher au spectateur que l’acteur boitait. Autre anecdote amusante, Pef, qui semble plutôt impliqué dans la défense de l’environnement, avouera avoir piqué une crise de colère noire à l’encontre d’un technicien parce que ce dernier avait oublié de prévoir un cendrier portable afin d’écraser une cigarette à l’issue d’une prise. Quelques pistes de scénario non exploitées ou modifiées seront également abordées au détour d’une séquence ou une autre. Un bon moment !