Jeepers Creepers
États-Unis : 2001
Titre original : –
Réalisation : Victor Salva
Scénario : Victor Salva
Acteurs : Gina Philips, Justin Long, Jonathan Breck
Éditeur : Metropolitan Vidéo
Durée : 1h31
Genre : Fantastique, Horreur
Date de sortie cinéma : 3 juillet 2002
Date de sortie DVD/BR : 17 novembre 2022
Tous les 23 ans et pendant 23 jours apparaît une créature terrifiante qui traque les voyageurs sur les routes désertiques du sud-est yankee. Ce que deux jeunes étudiants, frère et soeur, vont découvrir sur cette route, dépasse de loin leurs pires cauchemars : le Creeper…
Le film
[3,5/5]
Véritable standard de la musique jazz, le morceau « Jeepers Creepers », interprété par Louis Armstrong pour le film Le Cavalier errant en 1938, a donné naissance à d’innombrables reprises dans divers styles musicaux. Cependant, le dérivé le plus inattendu de ce titre devenu un classique n’est pas une simple « reprise », mais bel et bien un film d’horreur, sorti sur les écrans du monde entier en 2001 et réalisé par le scénariste / réalisateur Victor Salva, qui revenait à la réalisation après avoir défrayé la chronique dans les années 90 pour des affaires de mœurs.
Jeepers Creepers intègre donc la célèbre chanson à son intrigue, qui nous propose de découvrir un Boogeyman qui réapparaît tous les 23 ans, pendant 23 jours, et se nourrit d’organes humains, ces derniers lui permettant de le maintenir en vie. Comme une version vivante et monstrueuse du bateau de Thésée, cette créature prélèvera un organe à chacune de ses victimes et l’assimilera afin d’assurer sa survie. La principale originalité de Jeepers Creepers lors de sa sortie au début des années 2000 réside dans son approche du genre qui, bien que teintée d’une certaine modernité, proposait au public une relecture extrêmement sérieuse et premier degré des grands classiques du film de monstre des années 30/40.
Sauf qu’en lieu et place de Dracula, Frankenstein et les autres, Jeepers Creepers nous proposait donc de faire connaissance avec le « Creeper », une espèce de ghoule semi-humaine prenant l’apparence d’un prédateur sexuel vicieux, violent et sans pitié. Le film évolue à la manière d’un diesel, avec un un début des plus tranquilles, suivant Trish (Gina Philips) et Darry, frère et sœur, étudiants à l’université, qui rentrent chez eux dans leur vieille Chevrolet pour les vacances de printemps. Alors qu’ils traversent les coins les plus paumés de l’Amérique rurale au volant de leur voiture, ils se chamaillent et plaisantent comme seuls des frères et sœurs peuvent le faire. Habile et désireux de laisser le spectateur s’attacher à ses personnages et comprendre l’attachement profond qu’ils éprouvent l’un pour l’autre, Victor Salva laisse ces bavardages d’apparence futile durer pendant près de cinq minutes.
Très inhabituelle dans le domaine du cinéma d’horreur, cette séquence d’introduction laissera ensuite la place à la découverte progressive du Creeper, qui est l’objet de plusieurs légendes urbaines nées des dizaines de disparitions inexpliquées ayant eu lieu dans la région au fil des années. Toute la première moitié de Jeepers Creepers permet à Victor Salva de faire monter le suspense au fil des découvertes macabres que feront Trish et Darry. Le fait de laisser le Creeper dans l’ombre pendant une large partie du métrage se retrouve d’ailleurs dans le clin d’œil adressé par le scénariste / réalisateur au Duel de Steven Spielberg, la créature étant dans un premier temps personnifiée par son camion rouillé. Le film démarre réellement quand les deux jeunes héros aperçoivent la silhouette du conducteur du camion devant une vieille église abandonnée, en train de déposer ce qui ressemble étrangement à un corps enveloppé dans un drap sanglant dans un large tuyau en tôle ondulée sortant du sol.
La curiosité de Trish – et surtout de Darry – les mènera à leur perte au fur et à mesure que l’angoisse monte : en descendant le long du tuyau (image très fortement connotée d’un point de vue sexuel), le jeune homme découvrira une caverne souterraine abritant une mise en scène sinistre à base de cadavres conservés, étalés, grossièrement recousus et accrochés sur les parois de la grotte comme une espèce de recréation morbide d’un tableau cauchemardesque de Hieronymus Bosch. A partir de cette découverte pour le moins dérangeante, Jeepers Creepers avancera bon gré mal gré sur un fil ténu entre le grotesque et la terreur pure. On pense par exemple à cette séquence montrant le Creeper reniflant avec avidité les caleçons sales de Darry, dont on ne sait réellement si elle est censée faire frémir ou sourire…
Dans son dernier tiers, une fois le monstre clairement découvert, Jeepers Creepers délaissera par ailleurs la notion d’atmosphère au profit de séquences plus démonstratives, mais pas nécessairement des plus passionnantes, telles que, par exemple, l’assaut du commissariat par le Creeper, qui vire rapidement au carnage et sacrifie un peu de l’âme du film sur l’autel du grand spectacle. Cela dit, Jeepers Creepers n’en conserve pas moins de beaux restes, et méritait de fait que la créature qu’il nous donnait à voir s’impose instantanément comme un des Boogeymen les plus iconiques de l’histoire du cinéma horrifique.
Le Blu-ray
[4/5]
Sorti en France durant l’été 2002, sur un parc finalement assez impressionnant de 335 salles, Jeepers Creepers avait attiré dans les salles un peu moins de 144.000 français, mais les fantasticophiles ont plus largement découvert le film de Victor Salva par le biais de sa sortie en vidéo, et du DVD édité par StudioCanal en 2003. Malheureusement, ce DVD était bien loin de rendre justice au film ainsi qu’à la photo de Don E. FauntLeRoy, et beaucoup ont probablement gardé du film un souvenir assez éloigné de ce qu’il était réellement. Presque vingt ans plus tard, c’est Metropolitan Vidéo qui nous propose de redécouvrir Jeepers Creepers grâce à un Blu-ray impeccable, qui remet à leur place les partis pris esthétiques de Salva et son équipe. L’image est superbe, le grain respecté, et on comprend enfin ce qui se passe à l’écran durant les scènes nocturnes. Même constat du côté des pistes son, avec deux mixages (VF / VO) en DTS-HD Master Audio 5.1, extrêmement efficaces dans leur genre, même si évidemment le film ne se savourera vraiment totalement qu’en version originale.
Du côté des suppléments, à l’exception du documentaire The American Nightmare, qui n’avait de toute façon absolument rien à voir avec Jeepers Creepers, tous les suppléments de l’édition DVD Collector de 2003 ont fait le voyage : on commencera avec le making of ultra complet (1 heure), qui reviendra sur tous les aspects du film avec de nombreuses interventions de Victor Salva et on continuera avec les scènes coupées (17 minutes), qui incluent la scène d’ouverture originale ainsi que la très intéressante fin alternative. On notera par ailleurs qu’à ce jour, le Blu-ray de Jeepers Creepers est uniquement disponible au sein d’un coffret le couplant au quatrième épisode de la saga, à savoir Jeepers Creepers : Reborn. Il devrait logiquement sortir à l’unité d’ici quelques mois.