Test Blu-ray : Irma la douce

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Irma la douce

 
États-Unis : 1963
Titre original : –
Réalisation : Billy Wilder
Scénario : Billy Wilder, I.A.L. Diamond
Acteurs : Jack Lemmon, Shirley MacLaine, Lou Jacobi
Éditeur : Rimini Éditions
Durée : 2h27
Genre : Comédie
Date de sortie cinéma : 28 septembre 1963
Date de sortie DVD/BR : 24 avril 2018

 

 

A Paris, dans le quartier des Halles, les prostituées et leurs souteneurs vivent en bonne intelligence avec les gens de la police. C’est alors que débarque Nestor Patou, flic droit, honnête et naïf. Il ne tarde pas à tomber amoureux d’Irma la Douce, la plus populaire des prostituées de la rue…

 

 

Le film

[4/5]

Unanimement considéré comme un film « mineur » dans la carrière de Billy Wilder, Irma la douce est pourtant une très sympathique comédie, bien menée malgré quelques longueurs et très habilement mise en scène. On pourra néanmoins expliquer le « désamour » que l’on retrouve de la part de la critique en remettant un peu le film dans son contexte historique. A la toute fin des années 50, Billy Wilder et ses complices I.A.L. Diamond (scénario) et Jack Lemmon (acteur) rencontrent deux immenses succès aux relents très provocateurs avec les formidables Certains l’aiment chaud (1959) et La garçonnière (1960 – lire notre article). Malheureusement, l’année suivante, patatras : avec le brillant et cynique Un, deux, trois tourné sans Jack Lemmon, le succès ne répond plus à l’appel. Le trio gagnant se reforme donc, allant même jusqu’au quatuor de La garçonnière, puisque Shirley MacLaine répond également présente, amenant toute sa gouaille et sa fantaisie pétillante au personnage-titre, Irma, la pute au grand cœur.

De peur peut-être d’effrayer le public, Billy Wilder et I.A.L. Diamond mettent la pédale douce sur la critique sociale acerbe qui faisait tout le sel de leurs films précédents et qui, si elle est bel et bien présente en filigrane (avec une illustration du système capitaliste sur la base d’une rue où la prostitution bat son plein), cède largement sa place à une romance à l’eau de rose qui s’étirera sur toute la durée du film. Les deux scénaristes adaptant une comédie musicale signée Alexandre Breffort, le film propose toujours beaucoup de personnages hauts en couleurs, mais ceux-ci bénéficient d’un traitement moins fouillé et moins convaincant que sur les films précédents. Bien sûr, Irma la douce ne fait pas tout à fait l’impasse sur la description de ces fameux personnages secondaires, mais ces derniers n’existent finalement que comme de simples « silhouettes » vaguement interchangeables ; rien à voir avec les caractères bien définis qui participaient au foisonnement d’idées et à la richesse de leurs grandes réussites de la fin des années 50.

De fait, Irma la douce est sans aucun doute moins riche que les films précédents signés Wilder et Diamond ; certes, l’histoire d’amour étirée sur deux heures et demi comporte des longueurs, et aurait mérité d’être écourtée de quelques rebondissements, même si les ressorts comiques du film s’avèrent souvent très efficaces. Le film mérite-t-il pour autant sa fâcheuse réputation ? Sûrement pas ! Irma la douce s’avère même une très plaisante comédie, à mi-chemin entre la fable romantique et la comédie de mœurs développant un bon nombre d’outrances et de provocations chères à une époque où la censure américaine s’assouplissait de plus en plus. Formellement, le film de Wilder prend place dans un Paris fantasmé, imaginaire, et directement issu de l’image d’Epinal et des clichés que peuvent avoir les américains concernant la France : les croissants, la baguette, l’accordéon et le béret, mais également les cafés, les rues tortueuses et bondées remplies à craquer de filles de joie, et par extension l’amour et le romantisme… Le Paris d’Irma la douce, conçu par Alexandre Trauner, est certes totalement faux, excessif et plein de couleurs ; mais cette reconstitution irréelle devant la caméra de Wilder nous propose également assurément un spectacle visuellement époustouflant. Une vision fantasmée et presque magique, qui fait beaucoup dans le charme d’un film plein de charme, qu’on aurait tort de bouder !

 

 

Le Blu-ray

[4,5/5]

La sortie d’Irma la douce sur support Blu-ray en France constitue un événement, dans le sens où contrairement à La garçonnière, également sorti sous les couleurs de Rimini Editions fin février, le film de 1963 demeure encore à ce jour entièrement inédit en Haute-Définition, et ce dans le monde entier… Même si cette édition ne restera pas longtemps la seule sur le marché international : les américains de chez Kino Lorber ont en effet annoncé à l’automne 2017 la sortie d’un Blu-ray proposant une restauration 4K, prévue dans le courant de l’année 2018. Une sortie imminente donc, mais Rimini peut avoir la fierté d’avoir une nouvelle fois devancé l’éditeur américain, comme il l’avait fait en 2015 en sortant Le flic ricanant quelques semaines avant lui.

Et pour une première présentation sur support Blu-Ray, Irma la douce bénéficie d’un rendu HD imparfait mais satisfaisant : la copie est relativement stable, les couleurs sont éclatantes, les contrastes bien gérés, et le gain en termes de définition est très appréciable. On notera simplement une légère atténuation du grain d’origine par l’utilisation d’un réducteur de bruit ou DNR, le tout apparaît un poil trop lissé, même si cela demeure relativement discret sur un écran plat standard et se remarquera surtout en cas de diffusion sur un écran de très grande taille. Côté son, VF et VO sous-titrée sont toutes deux proposées en DTS-HD Master Audio 2.0 (mono d’origine) ; on préfèrera la VO pour la voix inimitable de Shirley MacLaine, mais la version française d’origine, pleine du charme désuet des doublages des années 60, s’en tire plutôt bien – les deux mixages sont bons, équilibrés, et débarrassés de tout souffle trop important.

Dans la section suppléments, Rimini Éditions choisit la cohérence avec son édition Blu-ray de La Garconnière sortie il y a quelques semaines, avec une série de bonus inédits et produits en France par les équipes de Rimini. On commencera avec une conversation entre Mathieu Macheret et Fréderic Mercier, respectivement journalistes pour Le Monde et Transfuge, qui nous proposent au fil de leurs propos une intéressante analyse du film, tout en prenant bien soin de le replacer dans son contexte de tournage. Les deux critiques reviennent sur les points forts ainsi que sur les quelques défauts du film, et s’avèrent suffisamment passionnants pour débattre autour du film durant une demi-heure sans jamais provoquer l’ennui. On continuera avec un entretien avec Didier Naert, peintre et architecte, ayant droit des archives d’Alexandre Trauner, qui revient sur Irma la douce par le biais de son travail artistique sur les photos de tournage et de repérages de Trauner, dont il s’est amusé à « prolonger » par le dessin les décors et l’environnement, livrant au final une très intéressante rencontre entre la photo, le cinéma, la peinture et l’architecture. Enfin, on terminera avec un entretien avec Laurent Valière revenant largement sur la pièce d’Alexandre Breffort, et sur ses différences avec l’adaptation de Billy Wilder et IAL Diamond, et avec la traditionnelle bande-annonce.

 

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