Test Blu-ray : Frissons d’horreur

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Frissons d’horreur

Italie : 1975
Titre original : Macchie solari
Réalisation : Armando Crispino
Scénario : Lucio Battistrada, Armando Crispino
Acteurs : Mimsy Farmer, Barry Primus, Ray Lovelock
Éditeur : Le Chat qui fume
Durée : 1h41
Genre : Horreur, Giallo
Date de sortie cinéma : 31 octobre 1979
Date de sortie Blu-ray : 15 avril 2022

Rome, années 1970 – La capitale italienne subit un été caniculaire et une vague de suicides inexplicable. Ce climat anxiogène a des effets néfastes sur Simona Sanna, jeune légiste à la morgue. Surmenée, elle commence à être victime d’hallucinations. Dans le même temps, ses rapports avec son petit ami Edgardo Fiorini, photographe, se dégradent. C’est alors qu’elle rencontre Paul Lenox, un prêtre persuadé que sa soeur ne s’est pas suicidée comme on le lui affirme. Simona accepte de l’aider dans ses investigations…

Le film

[4/5]

Sorti dans les salles françaises en 1979, Frissons d’horreur a surtout été popularisé dans l’hexagone par sa sortie au format DVD en 2008. Exploité en vidéo sous le titre qu’il portait en salles, le film d’Armando Crispino se nommait en réalité Macchie Solari (soit « Taches solaires »), ce qui est un titre plus poétique, en plus d’être en rapport direct avec son intrigue. L’histoire se déroule dans les années 70, en plein été, sous le cagnard rital – la mise en scène nous fera rapidement comprendre que la chaleur trouble les esprits, provoquant une véritable flambée de violence et de suicides à Rome. Une aubaine pour Simona, la jeune étudiante en médecine interprétée par Mimsy Farmer (La Traque, Le Parfum de la dame en noir), qui rédige justement une thèse destinée à mettre en évidence les différences entre les vrais suicides et les meurtres déguisés.

Le spectateur sera rapidement amené à rencontrer l’héroïne du film, qui s’avère un des éléments-clés d’une séquence d’ouverture mémorable, conçue par Armando Crispino pour capter l’attention du public dès le départ. Brillant, le premier quart d’heure de Frissons d’horreur offrira au spectateur son lot d’images étranges et d’événements macabres. L’horreur bat son plein dès la fin du générique, enchaînant les suicides et les actes vicieux pour terminer au cœur d’une morgue, où l’on suivra les gestes professionnels de plusieurs médecins légistes, et leur façon détachée de faire face à la mort. Parmi ces médecins, on trouvera donc Simona, épuisée, au bord de l’effondrement après avoir travaillé sans relâche pendant de longues heures : elle sera renvoyée chez elle après avoir été victime d’une hallucination effrayante à base de cadavres se relevant afin de forniquer entre eux.

Cet élément inaugural ne consiste pas, pour Armando Crispino, à simplement dépeindre le sentiment de paranoïa et de désorientation du personnage de Mimsy Farmer, mais nous donne un indice important sur sa personnalité : il s’agit d’une femme frigide, rejetant clairement la sexualité. Il n’échappera non plus à personne que la jeune femme souffre du complexe d’Électre, et cherche à tout prix à plaire à son père (Carlo Cattaneo). Et quand elle finit par s’offrir à son petit ami Edgardo (Ray Lovelock, le héros hippie du Massacre des morts-vivants), c’est après avoir déjeuné avec son père et l’avoir largement évoqué avec Edgardo. De plus, elle demandera naturellement à ce que celui-ci baisse les lumières, afin de ne pas avoir à contempler son visage… Ce sont des événements troublants, mais là n’est pas réellement le cœur de Frissons d’horreur : si la psychologie de Simona est mise en évidence à de nombreuses reprises, le réalisateur Crispino ne cherchera jamais réellement à expliciter ce sous-texte psychanalytique ou plus largement les raisons de la frustration de la jeune femme.

Ce complexe d’Électre se double d’ailleurs d’une obsession certaines pour la mort de la part de la jeune femme, mais ce rapport étroit qu’elle entretient avec Thanatos sert aussi, en quelque sorte, à renforcer l’atmosphère mortifère du film. Si les meurtres s’enchaînent sur un rythme lent et peu démonstratif une fois passée la séquence d’ouverture, Armando Crispino compense avec de longs plans sur le sujet des recherches de Simona : des photos froides, en noir et blanc, de scènes de crime, d’autopsies et d’anomalies médicales. Il s’agit bien sûr de photos « réelles », grotesques et parfois étrangement belles, mais qui contribuent à donner à Frissons d’horreur une ambiance diffuse de malaise discret mais tenace, du genre qu’une douzaine de scènes gore ne pourraient égaler.

Et s’il ne révèle pas tout de suite sa nature de Giallo, le film d’Armando Crispino ne tardera finalement pas à verser dans la plus pure tradition du genre, avec la rencontre de Simona avec une touriste américaine qui détient un sombre secret, et qui sera retrouvée le lendemain sur une des dalles de la morgue – un événement qui entraînera finalement le personnage de Mimsy Farmer au cœur d’un mystère embrouillé et mortel. A partir de là, Frissons d’horreur nous présentera un certain nombre de personnages/suspects, dont bien sûr son père et son petit ami, mais également le père Paul, un prêtre déjanté qui se trouve être le frère de la victime. Comme dans la plupart des gialli, les fausses pistes sont nombreuses, l’intrigue est alambiquée, et le mystère insoluble.

Tourné à Rome avec un budget visiblement confortable, Frissons d’horreur s’impose de fait comme un giallo réussi, dénotant avec les classiques du genre grâce à une ambiance globalement diurne, aux couleurs riches et vibrantes. La mise en scène et le montage, bien que n’étant pas à la hauteur d’un Dario Argento, transmettent efficacement l’atmosphère du film, qui exploite parfaitement l’architecture unique de Rome, avec quelques poursuites en voiture et une touche de sexualité décadente.

Le Blu-ray

[5/5]

A nouveau, Le Chat qui fume fait le choix de chouchouter le consommateur français avec la sortie événement de Frissons d’horreur en Blu-ray, qui vient nous proposer un « upgrade » assez considérable par rapport au DVD du film, sorti en 2008. Comme d’habitude avec l’éditeur, le film bénéficie d’une édition en tous points magnifique, s’imposant d’entrée de jeu dans un luxueux Digipack trois volets surmonté d’un fourreau aux couleurs du film, et composé par le talentueux Fred Domont.

Côté Blu-ray, vous pouvez d’ores et déjà vous débarrasser de votre antique DVD, car le film bénéficie d’un upgrade Haute-Définition net et sans bavure. Le film a visiblement été restauré, et le Blu-ray nous propose aujourd’hui un piqué précis tout en conservant la granulation d’origine, et une stabilité exemplaire. La sublime photo de Carlo Carlini s’en trouve en magnifiée, la profondeur de champ est remarquable, et les contrastes ont été particulièrement soignés : les noirs sont profonds sans être bouchés, les blancs ne sont pas « cramés » ; bref, l’éditeur a fait tout son possible pour nous permettre de (re)découvrir Frissons d’horreur dans les meilleures conditions possibles. Du côté des enceintes, VF d’époque et VO nous sont proposées, en DTS-HD Master Audio 2.0, en mono d’origine évidemment. Les dialogues sont clairs, les ambiances et la musique d’Ennio Morricone parfaitement bien préservées, et sans souffle. On notera par ailleurs que la VF d’époque nous permet d’entendre quelques voix bien connues des amateurs, telles que celles de l’inimitable Dominique Paturel.

Du côté des suppléments, on commencera avec une présentation du film par Jean-François Rauger (23 minutes). Devenu un habitué des éditions estampillées Le Chat qui fume, le directeur de la programmation à la Cinémathèque française reviendra sur ce qu’il considère comme un giallo tardif mais novateur, apportant des éléments nouveaux au genre à une époque où il peinait à se renouveler. Il reviendra sur la carrière d’Armando Crispino, sur la genèse du projet, ainsi que sur le film terminé – casting, musique, psychologie du personnage incarné par Mimsy Farmer. On continuera ensuite avec un long entretien avec Francesco Crispino (39 minutes), le fils du réalisateur Armando Crispino. Avant d’aborder Frissons d’horreur, il retracera les grandes lignes de la carrière de son père, sa filmographie et, bien sûr, le cas particulier du film qui nous intéresse aujourd’hui, de sa préparation à l’évolution du scénario en passant par les partis-pris esthétiques, les problèmes avec la censure, ou encore l’accueil du film à sa sortie et sa réhabilitation récente. Outre la traditionnelle bande-annonce, on retrouvera Francesco Crispino dans un sujet tout spécialement consacré à l’évolution du scénario du film (10 minutes), illustrée par plusieurs documents de travail issus des archives familiales. Pour vous procurer cette édition limitée à 1000 exemplaires, rendez-vous sur le site de l’éditeur !

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