Test Blu-ray : Costa-Gavras – Intégrale vol. 1 (1965-1983)

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Depuis le temps qu’on l’espérait, on n’osait plus trop croire qu’un éditeur français se lancerait dans une réédition des premiers films de Costa-Gavras ; si cultes et réputés soient-ils, la plupart de ses films réalisés à partir du milieu des années 60 demeuraient à ce jour encore inédits en France sur support DVD. Grâce soit donc rendue à Arte Éditions, qui a pris l’heureuse initiative fin 2016 de remédier à cette énorme lacune avec l’édition d’un coffret INTÉGRALE VOL.1, réunissant l’intégralité des films du cinéaste de 1965 à 1983.

Et comme un bonheur ne vient jamais seul, ce coffret Costa-Gavras – Intégrale vol. 1 (1965-1983) débarque dans deux versions, et se voit donc décliné soit en DVD, soit en Blu-ray, dans des versions restaurées supervisées par le réalisateur lui-même…

 

 

Coffret Costa-Gavras – Intégrale vol. 1 (1965-1983)


France, Italie, Allemagne, Algérie, États-Unis, Israël : 1965-1983
9 longs-métrages + 1 court-métrage
Réalisateur : Costa-Gavras
Scénario : Costa-Gavras
Acteurs : Yves Montand, Jean-Louis Trintignant, Jacques Perrin
Éditeur : Arte Éditions
Genre : Drame, Politique
Date de sortie DVD/BRD : 23 novembre 2016

 

 

En mélangeant le policier au film politique, Costa-Gavras trouve entre 1965 et 1983 ses thématiques de prédilection. Aujourd’hui président de la Cinémathèque Française, ce cinéaste engagé a choisit de réunir pour la première fois, les 9 premiers films de sa carrière. Neuf films mythiques qui ont marqués l’histoire du cinéma…

 

 

Konstantínos Gavrás (en grec Κωνσταντίνος Γαβράς), dit Costa-Gavras (Κώστας Γαβράς), est un cinéaste de cinéma français né à Loutra-Iraias (Arcadie) le 12 février 1933. Chacun de ses films est, pour lui, l’occasion de témoigner de son engagement dans ses idées et de délivrer un message à propos du pouvoir. Ses premiers succès sont des thrillers politiques comme Z et L’aveu ; il passera par la suite au drame sentimental puis à la social-fiction.

En raison des positions politiques de son père (antiroyaliste), Costa-Gavras ne peut étudier en Grèce où le régime écarte les opposants et est contraint de fuir Athènes à 19 ans pour pouvoir étudier. Il rejoint Paris, où il s’inscrit en licence de lettres à la Sorbonne tout en travaillant pour assurer sa subsistance. Il s’est intéressé au cinéma en se rendant à la Cinémathèque française qui se trouvait à l’époque rue d’Ulm. Il cite notamment Les rapaces d’Erich von Stroheim comme l’un des films qui lui fit découvrir que le cinéma pouvait montrer des choses sérieuses. Il est ensuite admis à l’Institut des hautes études cinématographiques (IDHEC). Il travaille comme assistant pour Henri Verneuil, Jacques Demy et René Clément. Le film Le jour et l’heure, pour lequel il travaille comme assistant, lui permet de rencontrer Simone Signoret et Yves Montand, avec lesquels il deviendra très ami.

Découvrant le livre Compartiment tueurs de Sébastien Japrisot, il en fit le scénario et réussit à y intéresser le producteur Julien Derode ; le film, réalisé en 1965, eut du succès en France et même aux États-Unis, où il reçut des critiques dithyrambiques. Formellement sublime, tourné dans un noir et blanc littéralement somptueux, Compartiment tueurs s’avère en effet un petit trésor de film policier, malicieux et prenant. Une totale réussite.

Son deuxième film, Un homme de trop (1967), est souvent le grand « oublié » de son début de carrière. Pourtant, il s’agit d’un excellent film sur la seconde Guerre Mondiale, dont la pléthore de personnages, les ruptures de ton, le rythme trépidant et l’intrigue laissant une large place à une action parfaitement mise en scène évoquent forcément Les douze salopards de Robert Aldrich, également réalisé en 1967.

Z (1969) est son premier succès majeur, et les débuts d’une nouvelle direction dans la carrière de Costa-Gavras. C’est lors d’un séjour en Grèce qu’il découvre le roman Z, de Vassilis Vassilikos, retraçant l’assassinat du leader de la gauche organisé par la police et camouflé en banal accident. Dès son retour, il écrit le scénario du film Z en collaboration avec Jorge Semprún. Ne trouvant pas le financement, il en parle à Jacques Perrin, qu’il connaissait depuis le film Compartiment tueurs. C’est à cette occasion que Jacques Perrin va créer sa propre maison de production pour monter le film et utiliser ses contacts, en particulier en Algérie, où sera tourné le film. Jean-Louis Trintignant a accepté un faible cachet, ainsi qu’Yves Montand. Le film fut un succès à travers le monde et les gens applaudissaient à la fin des séances. Bluffant, réaliste et sans le moindre temps mort, Z s’avère encore aujourd’hui un film majeur et indispensable. Le film a d’ailleurs été récompensé par le « prix du Jury » au festival de Cannes, l’Oscar du « meilleur film étranger » et celui du « meilleur montage ».

Lors du montage de Z, au cours du dîner de Noël, Claude Lanzmann lui parle d’Artur London, qui avait été vice-ministre des Affaires étrangères de Tchécoslovaquie et était un des trois rescapés des procès de Prague qui s’étaient tenus en 1952. Beaucoup d’intellectuels de sa génération s’étaient enthousiasmés pour le stalinisme « parce qu’il ouvrait des perspectives qui paraissaient formidables. Jusqu’à ce que, peu à peu, on prenne conscience de l’envers du décor. » Yves Montand adhère aussi au projet de L’aveu, et les financements se débloquent grâce au succès de Z. L’aveu est sorti après Z, dans une époque assez manichéenne : on lui a reproché d’attaquer la droite, puis la gauche, alors qu’il ne voulait que dénoncer les totalitarismes. Certaines personnes ne lui pardonnèrent pas d’avoir levé le voile sur le stalinisme et l’évitaient ostensiblement. Le film a connu un succès considérable et devint un véritable phénomène politique et culturel qui a bouleversé son époque.

Avec État de siège en 1972, le cinéaste s’attaque aux dictatures d’Amérique Latine, dénonçant ouvertement la torture propagée par la CIA. Puissant réquisitoire contre les méthodes employées par les dictatures avec l’appui des États-Unis, le film est très sombre et réaliste, Costa-Gavras proposant comme dans ses films précédents une approche quasi-documentaire de son sujet. La mise en scène est sobre et efficace, et contribue à livrer un film sec, d’une force et d’une résonnance qui n’ont rien perdu de leur impact plus de quarante ans plus tard.

En 1975, Costa-Gavras revient aux sombres heures la seconde Guerre Mondiale avec Section spéciale, et aborde de front un épisode bien peu glorieux (et très peu connu) du régime de Vichy : la création en août 1941 de tribunaux d’exception chargés de juger les communistes et les anarchistes. Une véritable parodie de justice, puisque la loi s’avérait de plus rétroactive, et enverrait à la mort plusieurs dizaines de résistants et opposants au régime. Troublant, le film renvoie la France à sa propre honte d’avoir pu, avec l’aide de « juges » censés servir la justice, coopérer à cette épuration arbitraire, le cinéaste poussant le vice jusqu’à montrer des nazis s’opposant à ce système. Une énorme claque pour un film qui, dans tout ce qu’il sous-entend de la nature humaine, fait vraiment froid dans le dos.

Avec Clair de femme (1979), le cinéaste opte pour un virage à 180 degrés dans sa carrière en choisissant d’adapter un roman de Romain Gary, qui estima d’ailleurs que c’était la première fois qu’il était content de l’adaptation d’une de ses œuvres à l’écran. Costa-Gavras fut séduit, dans cette histoire d’amour, par le fait qu’il s’agissait d’une « tentative de profanation du malheur, d’un hymne à la vie et d’une réhabilitation du couple ».

Il reviendra néanmoins rapidement au film « politique » avec Missing (1981), adapté du livre de Thomas Hauser L’exécution de Charles Horman, lui-même inspiré d’une histoire vraie. Le film raconte l’histoire de la disparition d’un jeune journaliste américain durant le coup d’État du général Augusto Pinochet en 1973. Ce qui l’avait touché dans cette histoire était « beaucoup moins le contexte politique du putsch que le thème du père qui, accompagné par sa belle-fille, recherche son fils coûte que coûte dans un pays en plein chaos. » Le film a été très controversé aux États-Unis car il met en lumière l’action des agents du gouvernement américain et leur responsabilité dans ce coup d’État. L’extrême-droite américaine demanda : « Mais que vient faire ici ce communiste européen ? ». Cependant le film reçut la Palme d’or et le prix d’interprétation masculine au festival de Cannes, et l’Oscar du « meilleur scénario », et il est toujours montré et présenté comme un film majeur dans les grandes universités américaines.

Le dernier long-métrage à (re)découvrir au sein du coffret Costa-Gavras – Intégrale vol. 1 (1965-1983) est Hanna K. (1983), qui mélange les deux tendances à l’œuvre dans la carrière de Costa-Gavras quinze ans après ses débuts au cinéma : le film mêle en effet une intrigue sentimentale à un sujet politique fort. C’est d’ailleurs par manque d’équilibre entre ces deux thématiques qu’Hanna K. rate malheureusement sa cible, le procès du jeune clandestin palestinien s’effaçant derrière les hésitations de l’héroïne entre son mari et le procureur dont elle porte l’enfant.

On croise les doigts pour que le coffret édité par Arte Éditions rencontre dans les bacs le succès qu’il mérite afin de découvrir la suite de la riche filmographie de Costa-Gavras…

Source biographie : Wikipédia

 

 

Le coffret Blu-ray

[4,5/5]

Le coffret Costa-Gavras – Intégrale vol. 1 (1965-1983) édité par Arte Éditions contient donc 10 Blu-ray (9 films + un Blu-ray proposant un entretien fleuve de plus de trois heures avec le cinéaste, que l’éditeur n’a malheureusement pas pu nous fournir), ainsi qu’un riche livret de 64 pages intitulé « Costa-Gavras ou l’espoir », écrit par Edwy Plenel. Le tout s’impose dans une belle boite cartonnée ornée d’une photo du réalisateur au travail.

Côté Blu-ray, les films de Costa-Gavras s’imposent d’entrée de jeu dans des masters Haute Définition tout à fait resplendissants. Restaurés en 2K ou 4K selon les cas, ils affichent une définition et un niveau de détail assez bluffant, tout en respectant scrupuleusement la granulation d’origine de la pellicule. Sur tous les films, l’image étonne par sa propreté (adieu tâches et autres poussières disgracieuses) et sa stabilité, et le rendu des couleurs et des contrastes semble avoir également bénéficié d’un soin tout particulier. Point de trace de DNR ou autres bidouilles numériques, on regrettera juste un grain peut-être un poil trop accentué lors des passages nocturnes ou en basse lumière. Le seul point négatif côté image se situe dans l’utilisation (sur tous les films) d’un encodage Blu-ray effectué en 1080i, avec un cadencement de 25 images par seconde, ce qui réduit la durée des films de quelques minutes. Côté son, nous aurons droit à des pistes DTS-HD Master Audio 2.0 sur tous les films, VF et VO étant disponibles pour les films tournés aux États-Unis.

Il est difficile d’aborder chaque film individuellement, mais on se prosterne à genoux devant l’initiative de l’éditeur d’enfin nous permettre de voir et revoir ces films, à ce jour tous inédits en DVD, la perspective chronologique nous permettant non seulement une parfaite immersion au cœur du cinéma du réalisateur, mais également de constater à quel point son Cinéma a pu s’affiner au fil des années.

Du côté des suppléments, plusieurs heures de bonus sont dispatchées sur les différentes galettes composant le coffret. De nombreux entretiens avec le cinéaste, des sujets d’archives nous rafraichissant la mémoire sur les différents contextes politiques, ou donnant la parole au cinéaste et aux acteurs (Yves Montant, Simone Signoret…), ou encore des extraits d’émissions TV françaises évoquant le film (Le masque et la plume, Les dossiers de l’écran)… Parmi les suppléments les plus notables, on notera un entretien entre Costa-Gavras et Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice entre 2012 et 2016, au sujet du film Section spéciale. C’est très complet, et souvent vraiment passionnant. Les complétistes seront également ravis d’apprendre que le premier court-métrage de Costa-Gavras, Les ratés (1958 – il s’agit de son film de fin d’études à l’IDHEC), est également disponible, et en Haute Définition. Un coffret définitivement indispensable.

 

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