Test Blu-ray : Contre toute attente

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Contre toute attente

États-Unis : 1984
Titre original : Against all odds
Réalisation : Taylor Hackford
Scénario : Eric Hughes
Acteurs : Rachel Ward, Jeff Bridges, James Woods
Éditeur : Sidonis Calysta
Durée : 2h08
Genre : Policier, Thriller
Date de sortie cinéma : 30 mai 1984
Date de sortie DVD/BR : 20 mai 2021

Blessé, le joueur de football américain Terry Brogan tombe sous le coup d’une sanction sévère : son équipe le congédie. Sous la pression de Jack Wise, un bookmaker véreux qui en sait beaucoup sur ses tricheries, Terry accepte de se lancer sur les traces de Jessy Wyler. En possession de 50.000 $ volés à celui qu’elle fuit, cette dernière se réfugie au Mexique. Quand Terry lui met la main dessus, il en tombe amoureux. Une erreur à ne pas commettre…

Le film

[4/5]

On n’oserait pas affirmer si le temps détruit ou révèle tout ; quoi qu’il en soit, il est sûr que le temps opère des choix, et que le commun des mortels n’y peut pas grand chose. Ainsi, les films passent, et, parfois, les bandes originales restent – et inversement. Une chose est sûre en tous cas : la chanson de Phil Collins « Take a look at me now » passe encore aujourd’hui une à plusieurs fois par jour sur les ondes de plusieurs radios françaises (Chérie FM, RTL 2…). Ainsi, si cette ritournelle sirupeuse s’incruste encore régulièrement dans de nombreux mariages, on ignore parfois cependant qu’elle est issue de la bande originale du film Contre toute attente, sorti en 1984.

D’ailleurs, si Sidonis Calysta n’était pas là pour rafraîchir la mémoire des cinéphiles, Contre toute attente aurait peut-être fini par sombrer dans l’oubli – le film n’avait ainsi pas été réédité depuis sa sortie en DVD en 2000. La redécouverte du film de Taylor Hackford nous permet également aujourd’hui de remettre la chanson dans son contexte – si elle est souvent considérée comme un hymne romantique célébrant l’amour fou, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’au moment où les notes de Phil Collins commencent à résonner sur les dernières images du film, elles servaient surtout à livrer un commentaire amer, noir et assez désespéré sur la futilité de l’amour au sein d’un monde profondément corrompu, où tous les rapports humains semblent régis par les rapports de force et la manipulation d’autrui.

Rien d’étonnant à cela si l’on creuse un peu : avec Contre toute attente, Taylor Hackford nous livrait en effet un remake du « Film Noir » de Jacques Tourneur La griffe du passé (1947), connu pour nous proposer avec le personnage de Kathie Moffat (Jane Greer) une des garces les plus mémorables de l’Histoire du genre. Le film, qui s’inscrivait dans une large vague de remakes de succès du Film Noir des années 40/50 (Le facteur sonne toujours deux fois en 1981, J’aurai ta peau en 1982, Scarface en 1983…), développait donc fort logiquement le nihilisme misanthrope qui caractérisait le genre. Ainsi, dans Contre toute attente, même les personnages qui à priori semblent au départ animés de bonnes intentions se retrouvent manipulés ou utilisés par d’autres.

Le scénario d’Eric Hughes, développé avec le réalisateur à partir du scénario de La griffe du passé (1947), lui-même adapté du roman « Pendez-moi haut et court » de Geoffrey Homes (1946), est d’une précision remarquable, surtout dans la façon dont il tisse une série de liens étranges entre Terry (Jeff Bridges) et Jake (James Woods). Si au départ on comprend mal l’idée d’engager un ex-joueur de football américain pour retrouver une gosse de riche disparue, les pièces du puzzle Contre toute attente s’assembleront par la suite, tendant à faire comprendre au spectateur que les deux personnages sont un peu comme les deux faces d’une même médaille, constamment en concurrence l’un avec l’autre. Ainsi, si impressionnante et dangereuse soit-elle, la course en voiture Porsche / Ferrari qu’ils se livreront sur Sunset Boulevard ne sera au final qu’une façon de déterminer lequel des deux a la plus grosse – Terry le demandera d’ailleurs par la suite très clairement à Jessie (Rachel Ward) : « Does he have a bigger cock than I do ? »

La complexité de la relation entre les deux anciens joueurs est une composante-clé de la façon dont Contre toute attente se déroule ; ainsi, la masculinité orgueilleuse de Terry et sa compétition déplacée vis à vis de Jake le forceront à refuser quand la mère de Jessie – incarnée à l’écran par Jane Greer, actrice emblématique de La griffe du passé – lui fera la même offre que Jake, à savoir retrouver sa fille, pour le double de la somme proposée par Jake, avec en bonus sa réintégration dans l’équipe qui l’avait viré comme un malpropre. C’est parce qu’il connaît parfaitement Terry et ses failles que Jake peut le manipuler sans la moindre difficulté. Cependant, les intrigues, manipulations, trahisons et alliances, avec en toile de fond un gros trafic à base de placements immobiliers, finiront par plonger les différents protagonistes du récit au cœur de situations littéralement inextricables.

Côté casting, Contre toute attente est porté par les performances impressionnantes du trio Jeff Bridges / James Woods / Rachel Ward. Cependant, les seconds-rôles sont tout aussi remarquables : on pense bien sûr à la prestation de Swoozie Kurtz (future avocate opposée à Jim Carrey dans Menteur, menteur), d’un Saul Rubinek encore jeune et fringant et bien sûr, du vétéran Richard Widmark et de Jane Greer, extraordinaire dans un rôle trouble et glacial.

Le Blu-ray

[4,5/5]

Contre toute attente débarque donc en Blu-ray sous les couleurs de Sidonis Calysta, qui nous propose de découvrir le film de Taylor Hackford en Haute-Définition. Le résultat est à la hauteur de nos attentes : l’image est propre, d’une stabilité impeccable, et définition et piqué sont excellents. Le transfert respecte par ailleurs à la lettre le grain argentique du film, qui a été préservé, et l’encodage ne nous réserve aucune mauvaise surprise. Côté son, les deux mixages (VF/VO) encodés en DTS-HD Master Audio 2.0 proposent des dialogues dynamiques et bien équilibrés. La VO est également proposée en DTS-HD Master Audio 5.1 ; la spatialisation apporte un peu de punch à l’ensemble, mais elle respecte globalement l’esprit de la piste originale, avec des effets surround ou multi-directionnels essentiellement basés sur la restitution des ambiances. Pour les amateurs, notons que le doublage de la version française est assuré par Jacques Frantz, François Leccia et l’excellent Roger Rudel.

Du côté des suppléments, le Blu-ray de Contre toute attente édité par Sidonis Calysta comporte tout d’abord rien de moins que deux commentaires audio en VOST. Le premier est assuré par Taylor Hackford, accompagné des acteurs Jeff Bridges et James Woods. Ils semblent assez contents de se retrouver, et la discussion vire régulièrement à la plaisanterie. Le deuxième commentaire réunit Taylor Hackford et le scénariste Eric Hughes ; d’après les propos du cinéaste, il a enregistré ce commentaire-ci le lendemain du précédent. De fait, les deux intervenants s’attacheront ici un peu moins à ce qui se passe à l’image, revenant notamment sur le développement du film, ainsi que sur les différentes thématiques abordées par ce dernier.

On continuera ensuite avec une présentation du film par Gérard Delorme (14 minutes), qui reviendra essentiellement sur la nature de « remake » de l’œuvre et des nombreuses différences entre Contre toute attente et La griffe du passé. On trouvera également un entretien d’époque avec James Woods (8 minutes), ainsi qu’un passionnant sujet consacré aux grands rôles de Jeff Bridges (26 minutes), composé de son discours aux Golden Globes lorsqu’il a reçu le Cecil B. DeMille Award début 2019, puis d’une interview accordée à GQ durant laquelle il reviendra, face caméra, sur les rôles les plus iconiques de sa carrière.

Mais ce n’est pas tout, puisque l’éditeur nous propose également une large sélection de scènes coupées en VOST (23 minutes), disponibles avec le commentaire optionnel de Taylor Hackford. Enfin, on terminera avec les clips vidéo de « Take a look at me now » par Phil Collins, de « My male curiosity » par Kid Creole and the Coconuts, ainsi qu’avec la traditionnelle bande-annonce.

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