Test Blu-ray : Comme un chien enragé

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Comme un chien enragé

États-Unis : 1986
Titre original : At close range
Réalisation : James Foley
Scénario : Nicholas Kazan, Elliott Lewitt
Acteurs : Sean Penn, Christopher Walken, Mary Stuart Masterson
Éditeur : Carlotta Films
Durée : 1h56
Genre : Drame, Thriller
Date de sortie cinéma : 14 janvier 1987
Date de sortie DVD/BR : 22 août 2018

Brad Jr. vient d’arrêter ses études et s’ennuie ferme dans sa petite ville de Pennsylvanie où il passe son temps à traîner avec son frère et ses amis. Lorsque son père, Brad Sr., refait surface après des années d’absence, il est immédiatement subjugué par cet homme devenu leader d’un gang local et décide de le suivre. Mais sa rencontre avec Terry, une jeune lycéenne, et l’attitude de Brad Sr., de plus en plus violent et intraitable, amènent Brad Jr. à vouloir prendre du recul vis-à-vis de son père et à monter son propre gang…

Le film

[4/5]

Un peu plus de trente ans après sa sortie dans les salles françaises, la redécouverte de Comme un chien enragé provoquera à coup sûr une interrogation dans l’esprit du spectateur contemporain : mais qu’est-il donc arrivé à James Foley ? Pour les cinéphiles les plus jeunes, si le nom de James Foley n’est peut-être pas tout à fait inconnu, il est en revanche probablement associé à deux nanars érotiques ayant fait grand bruit dans le calecif de certains à leur sortie : Cinquante nuances plus sombres (2017) et Cinquante nuances plus claires (2018). Avant son retour aux commandes de ces deux films, les films précédents de James Foley, réalisés entre 1996 et 2007, n’étaient pas nécessairement beaucoup plus glorieux, « petits » thrillers Hollywoodiens sans réelle envergure ni véritable identité (Le corrupteur, Confidence, Dangereuse séduction…).

Et pourtant, durant les dix premières années de sa carrière, James Foley avait été considéré comme l’un des jeunes réalisateurs les plus prometteurs des années 80. Ses débuts sont très marqués par la personnalité de Madonna, la dernière « superstar » du vingtième siècle et véritable icône de la musique internationale : après avoir réalisé une poignée de clips pour elle, il signerait par la suite le très amusant Who’s that girl ? (1987), que l’on désespère de voir débarquer un jour en Blu-ray en France. D’ailleurs, même si Comme un chien enragé (1986) n’a à priori rien à voir avec la chanteuse, le film est également profondément marqué par la présence de Madonna, qui chante la chanson du générique (le tube « Live to tell ») sur la musique du compositeur Patrick Leonard. On peut également supposer que la chanteuse, mariée avec Sean Penn à l’époque du tournage du, a pu avoir une importance déterminante quant au choix de l’acteur. Néanmoins, la prestation de ce dernier s’avère absolument remarquable, et fera à coup sûr taire les mauvaises langues qui auraient pu crier au « piston » éhonté.

Inspiré d’un fait divers datant de 1978, Comme un chien enragé tend moins à retrouver la véracité des événements s’étant déroulé à l’époque qu’à développer une espèce d’authenticité « émotionnelle », que le scénariste Nicholas Kazan parviendra à atteindre par le biais de l’emphase, du lyrisme exacerbé. Ainsi le film de James Foley prend-il rapidement des airs de tragédie grecque, mettant en scène l’éternelle lutte du Bien contre le Mal. Le personnage de Christopher Walken, séduisant et charmeur, représente donc le modèle paternel auquel souhaite ressembler le fils abandonné depuis des années. Mais plus le récit évolue, plus le masque du père se fissure pour laisser apparaître le Mal à l’état pur, la violence de sang-froid, le calcul et l’horreur. Face à lui, Sean Penn et Mary Stuart Masterson incarnent les représentants d’une race humaine abandonnée aux sentiments, et donc vulnérable… Le propos est indéniablement ambitieux, et si la narration évolue selon une lenteur calculée et solennelle, le rythme est néanmoins assuré par les éclairs de violence, portés non seulement par le talent de metteur en scène de James Foley, mais également par la photo du film, occasionnellement sublime, assurée par Juan Ruiz Anchía. La sobriété formelle de l’ensemble assure par ailleurs au film une classe visuelle indéniable, qui contribuera certainement à lui apporter une pérennité que n’imaginaient peut-être pas ses auteurs à l’époque du tournage.

Comme un chien enragé représente donc, avec le trop méconnu Glengarry (1992), l’un des sommets de la carrière de James Foley. On croise les doigts pour que ce dernier retrouve un jour la flamme qui l’animait il y a une trentaine d’années !

Le Blu-ray

[5/5]

Avec la sortie de Comme un chien enragé en « édition prestige », dont le tirage est limitée à 2000 exemplaires, Carlotta Films fait le choix de chouchouter le consommateur français : outre le Combo Blu-ray + DVD du film, ce coffret comprend donc également le fac-similé du dossier de presse d’époque, l’affiche du film (en 40×60) et huit reproductions de photos d’exploitation, utilisées lors de la sortie du film en salles..

Côté Blu-ray, le film bénéficie d’ailleurs d’un joli upgrade Haute-Définition. Le film a visiblement été restauré, et le Blu-ray nous propose aujourd’hui un piqué précis tout en conservant la granulation d’origine, et une stabilité exemplaire. La sublime photo de Juan Ruiz Anchía s’en trouve en magnifiée, la profondeur de champ est remarquable, et les contrastes ont été particulièrement soignés : les noirs sont profonds sans être bouchés, les blancs ne sont pas « cramés » ; bref, l’éditeur a fait tout son possible pour nous permettre de (re)découvrir Comme un chien enragé dans les meilleures conditions possibles. Du côté des enceintes, la VO anglaise nous est proposée en DTS-HD Master Audio 2.0, en mono d’origine évidemment, la VF d’époque en DTS-HD Master Audio 1.0. Les dialogues sont clairs, les ambiances et la musique parfaitement bien préservées, et le tout ne souffre pas de souffle disgracieux. On notera cependant une nette domination de la version originale sur sa petite sœur française, pour de simples raisons artistiques – même si la VF d’époque nous permet d’entendre quelques voix bien connues des amateurs (Bernard Tiphaine, Éric Baugin, Agathe Mélinand…).

En plus d’être un bel objet, le coffret édité par Carlotta Films nous propose par ailleurs un supplément de choix avec un entretien inédit avec James Foley, d’une durée d’un peu plus d’une demi-heure. Ce dernier y évoquera dans le détail la genèse du film, le tournage et défendra ses choix artistiques (notamment le fait d’avoir choisi Sean Penn en tant qu’acteur principal alors qu’il l’avait écarté du casting de son film précédent au profit d’Aidan Quinn). Bien sûr, une partie de l’entretien sera consacré à Madonna, qui a permis au film de s’offrir un succès en vidéo après son échec dans les salles. Et comme s’il voulait répondre à la question que l’on posait en préambule de notre critique du film, James Foley évoque également la suite de sa carrière à Hollywood, avec une relative franchise. Il ironisera donc volontiers sur la « nouvelle » carrière que lui a permis d’obtenir sa participation en tant que réalisateur sur la série House of cards ; au sujet des deux Cinquante nuances qu’il a réalisés, il est pleinement conscient des faiblesses des romans d’origine, et a du composer avec ces dernières. Il termine en disant espérer que le fait d’être à nouveau sur la « A List » des cinéastes Hollywoodiens lui permettra d’accéder à des projets lui tenant d’avantage à cœur. La traditionnelle bande-annonce est également de la partie.

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