Les Crimes du Futur
Canada, Grèce : 2022
Titre original : Crimes of the Future
Réalisation : David Cronenberg
Scénario : David Cronenberg
Acteurs : Viggo Mortensen, Léa Seydoux, Kristen Stewart
Éditeur : Metropolitan Vidéo
Durée : 1h47
Genre : Fantastique, Science-fiction
Date de sortie cinéma : 13 avril 2022
Date de sortie DVD/BR : 26 septembre 2022
Alors que l’espèce humaine s’adapte à un environnement de synthèse, le corps humain est l’objet de transformations et de mutations nouvelles. Avec la complicité de sa partenaire Caprice, Saul Tenser, célèbre artiste performer, met en scène la métamorphose de ses organes dans des spectacles d’avant-garde. Timlin, une enquêtrice du Bureau du Registre National des Organes, suit de près leurs pratiques. C’est alors qu’un groupe mystérieux se manifeste : ils veulent profiter de la notoriété de Saul pour révéler au monde la prochaine étape de l’évolution humaine…
Le film
[4/5]
La sortie des Crimes du Futur, 22ème long-métrage de cinéma réalisé par le canadien David Cronenberg, constituait à elle-seule un double-événement. Il s’agissait en effet du premier film de David Cronenberg, 79 ans, depuis Maps to the Stars en 2014. Mais, plus important encore, il s’agissait surtout pour le cinéaste canadien d’un retour au cinéma fantastique – le genre qui avait fait sa gloire et qu’il n’avait plus abordé de front depuis eXistenZ en 1999.
Le fait de voir David Cronenberg à nouveau arpenter les terres du fantastique et du « Body Horror » a forcément de quoi faire frissonner n’importe quel cinéphile. Le cinéaste, audacieux et original, semblait s’être éloigné de ses thèmes de prédilection en s’attaquant à des films très différents, et par ailleurs occasionnellement brillants, mais qui ne semblaient pas forcément correspondre à sa sensibilité et à son inclinaison naturelle pour le genre. Les Crimes du Futur lui permet ainsi de revenir à ses obsessions, et par la même occasion de (re)plonger le spectateur au cœur d’un monde de chair et de réflexion.
Il ne fait aucun doute que dans l’esprit de David Cronenberg, Les Crimes du Futur est probablement le prolongement de son deuxième long-métrage, tourné en 1970, et qui portait exactement le même titre. Un peu plus de cinquante années séparent les deux films, mais ne vous attendez pas à voir un remake du film de 70 : mis à part peut-être un élément formel – la bave se formant aux commissures des lèvres du jeune garçon dans la première scène du film – rien ne lie réellement les deux films, et aussi bien d’un point de vue technique que narratif, Les Crimes du Futur cuvée 2022 n’aurait pu être tourné en 1970, et inversement bien sûr.
Comme dans son chef d’œuvre Videodrome, David Cronenberg entreprend de nouveau avec Les Crimes du Futur d’entamer une réflexion sur la société contemporaine, et ses évolutions possibles. Mais il délaisse cette fois la télévision – et même plus largement les écrans – pour emporter le spectateur encore un petit peu plus loin, à savoir dans un monde où les écrans ne sont plus nécessaires, et où toute la technologie est implantée à même le corps. Étant donné la fascination dont Cronenberg a toujours fait preuve dans son cinéma pour les modifications physiques, il y avait fort à parier pour que la montée en puissance des théories du transhumanisme depuis une vingtaine d’années n’aient pas laissé le cinéaste de glace.
A sa façon, Les Crimes du Futur nous emmène dans un futur dystopique et transhumaniste. Le récit se déroule dans l’univers de la « performance artistique », l’Art du personnage de Saul Tenser (Viggo Mortensen) ayant pour objet la modification / pollution de son corps (et de son esprit) par le biais de corps étrangers, d’organes qu’il génère lui-même sans trop savoir comment. Après avoir fait pousser de nouveaux organes à l’intérieur de son corps, il se donne en spectacle, avec sa partenaire Caprice (Léa Seydoux), qui opère ses entrailles à l’aide de machines connectées presque vivantes qui permettent au public d’admirer le processus chirurgical.
En dépit de la froideur habituelle du cinéma de Cronenberg, qui se double ici d’une narration parfois un peu confuse, le fait est que le cinéaste n’a pas perdu la main dès qu’il s’agit de plonger le spectateur dans un univers étrange – celui de l’extase chirurgicale. Les Crimes du Futur ne tardera donc pas à explorer la relation entre Saul et Caprice, se basant sur une sexualité « à corps ouvert », les performances de l’artiste inspirant d’ailleurs des réactions lascives chez les autres, et notamment chez Timlin (Kristen Stewart), qui dirige avec Wippet (Don McKellar) le Registre National des Organes et ne pourra retenir son attirance pour ces pratiques nouvelles.
Visuellement, Les Crimes du Futur s’avère une belle réussite : c’est en grande partie grâce aux délires formels fascinants du cinéaste que le spectateur parviendra à passer au-dessus d’une intrigue imparfaite et d’un rythme comme toujours un peu bancal. Les effets spéciaux, en grande partie traditionnels, sont très réussis et contribuent à enrichir encore un peu plus l’univers de David Cronenberg en termes d’accessoires et d’environnements basés sur la chair. L’intrigue est souvent reléguée au second plan par rapport à l’atmosphère, mais le scénario nous emmènera, bon gré mal gré, vers vers un climax réussi et finalement moins pessimiste que ne le laissait présager le récit jusque-là.
Le Blu-ray 4K Ultra HD
[4,5/5]
Avec seulement un peu moins de 109.000 entrées en France, Les Crimes du Futur a réalisé, dans les salles françaises, un des scores les plus faibles de la carrière de David Cronenberg : pour retrouver des chiffres aussi bas, il faut en effet remonter aux années 90, période Le Festin nu (1992, 97.000 entrées) et M. Butterfly (1994, 101.000 entrées). S’il semble que le public ait un peu puni le cinéaste pour son absence prolongée, Metropolitan Vidéo en revanche ne lâche pas Cronenberg, et lui offre avec Les Crimes du Futur le tout premier Blu-ray 4K Ultra HD de sa carrière (en « Édition Spéciale Fnac »).
Et côté galette, c’est vraiment sublime : la présentation des Crimes du Futur en 2160p/HDR permet vraiment à l’image, et tout particulièrement à la sublime photographie du film signée Douglas Koch, de briller de mille feux. L’image est d’une stabilité remarquable, le piqué ainsi que le niveau de détail sont nets et précis, tout est fait pour que le spectateur profite à 100% de l’intense richesse visuelle du film, que cela soit en termes de décors, de costumes ou de profondeur de champ. L’amélioration des couleurs HDR / Dolby Vision nous offre également de toutes nouvelles perspectives : les couleurs s’épanouissent réellement à l’image, en affichant à la fois une profondeur et une intensité remarquables. Ajoutez à cela des niveaux de noir absolument sublimes et des blancs éclatants : l’apport de la technologie HDR10 trouve ici son expression la plus pure et la plus spectaculaire. Côté son, Les Crimes du Futur bénéficie également d’une solide prestation technique, avec une VO et une VF mixées en DTS-HD Master Audio 5.1. Riches et dynamiques, ces deux mixages privilégient les ambiances pour une immersion totale au cœur du film. Bien sûr, le film en lui-même ne prête pas forcément à la démonstration de grand spectacle sonore, mais le rendu acoustique est précis, avec de nombreux détails sonores prenant place sur tous les canaux. La musique d’Howard Shore profite également d’une belle présence, large et pleine de vie.
Du côté des suppléments, on commencera avec un entretien exclusif avec David Cronenberg (15 minutes). Il nous expliquera qu’il pensait sincèrement ne plus tourner pour le cinéma, et que Maps to the Stars était censé être son dernier film. A l’origine, Les Crimes du Futur avait été développé afin d’être une série sur Netflix. Il reviendra sur son approche de la science-fiction, basée sur l’étude d’un petit groupe de personnages, ainsi que sur certaines caractéristiques de son film, et notamment son humour. Sans forcément préciser si c’était le cas pour Les Crimes du Futur, il admettra avoir parfois été troublé par les réactions du public, qui riait à des moments qui n’étaient pas censés être drôles, ou inversement. Enfin, il déclarera ne pas pratiquer l’auto-référence, et ne pas avoir disséminé au cœur de son film des références conscientes à ses films précédents. Cette déclaration est assez curieuse, dans le sens où il disait exactement l’inverse dans le dossier de presse du film au moment de la sortie en salles.
On terminera avec la traditionnelle bande-annonce, qui s’accompagnera d’une courte featurette (5 minutes), qui nous donnera un aperçu des thématiques et du scénario des Crimes du Futur, mais qui nous permettra également de découvrir quelques images volées sur le tournage du film en Grèce. On trouvera également de courts entretiens avec le scénariste / réalisateur David Cronenberg, le producteur Robert Lantos, la conceptrice de la production Carol Spier et les acteurs (Viggo Mortensen, Kristen Stewart, Léa Seydoux…). On notera également que le Blu-ray 4K Ultra HD des Crimes du Futur édité par Metropolitan Vidéo est présenté dans un superbe Steelbook aux couleurs du film.
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