Test Blu-ray 4K Ultra HD : L’Arriviste (Alexander Payne)

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L’Arriviste

États-Unis : 1999
Titre original : Election
Réalisation : Alexander Payne
Scénario : Alexander Payne, Jim Taylor
Acteurs : Matthew Broderick, Reese Witherspoon, Chris Klein
Éditeur : Paramount Pictures
Genre : Comédie
Durée : 1h43
Date de sortie cinéma : 12 janvier 2000
Date de sortie DVD/BR/BR4K : 31 juillet 2024

Tracy Flick est une étudiante ambitieuse à qui tout réussit. Son élection comme Présidente du Conseil des étudiants du lycée Carver ne fait aucun doute. Son professeur, Jim McAllister décide de donner une leçon à la petite peste et persuade un autre élève de se présenter. La course à l’élection s’intensifie, la fièvre monte de jour en jour. Les certitudes de Jim sont remises en cause, sa vie calme devient un enfer…

Le film

[4/5]

Quand on évoque la carrière d’Alexander Payne, on pense avant tout à des films tels que Sideways, The Descendants ou Nebraska. De fait, on oublie souvent qu’avant de devenir la coqueluche du cinéma indépendant américain et d’être largement acclamé par la critique internationale, le cinéaste avait débuté avec L’Arriviste, un « Teen Movie » prenant place dans un lycée du Nebraska. Le genre, assez typique de la comédie US depuis les années 50, était alors en perte de vitesse, mais remporterait tout de même 15 millions de dollars au box-office américain.

En France, L’Arriviste ne serait probablement pas sorti dans les salles obscures si le triomphe d’American Pie n’avait pas soudain relancé l’intérêt pour le Teen Movie à la fin de l’année 1999. Pour autant, le film n’attirerait qu’un peu moins de 8.000 curieux dans les salles françaises : le timing pensé par Paramount n’était peut-être pas le bon, et surtout, le film d’Alexander Payne ne jouait pas du tout dans le même registre que celui de Chris Weitz, et même s’il utilisait volontiers quelques ficelles du genre, c’était pour mieux les détourner et arriver à ses fins.

Parce qu’au-delà de son intrigue et de son contexte qui répondent aux codes traditionnels de la chronique de mœurs adolescente, L’Arriviste se trouve également – et surtout – être une savoureuse comédie noire, qui prend rapidement les atours d’une féroce satire politique : le titre original du film, Election, ne faisait d’ailleurs pas de mystère quant à l’objectif réel d’Alexander Payne. Les observateurs de l’époque ne s’y sont d’ailleurs pas trompé : le film a en effet valu à Payne une nomination à l’Oscar du meilleur scénario, a été récompensé de trois Independent Spirit Awards (meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur scénario), et son scénario a également salué par des distinctions aux Writers Guild of America Awards et au New York Film Critics Circle.

Il faut dire que le scénario de L’Arriviste, cosigné par Alexander Payne et Jim Taylor, s’avère une sacrée pépite, abordant de façon détournée et cynique la vie en banlieue, la crise de la quarantaine chez l’homme contemporain, et d’autres sujets de société tels que le désenchantement professionnel, l’obsession, la vengeance… Pur produit de son temps, L’Arriviste se situe en quelque sorte à la croisée des chemins entre deux autres films sortis en 1999 : American Pie et American Beauty. Il n’y a finalement rien d’étonnant à ce qu’il s’agisse de l’adaptation d’un roman de Tom Perrotta, également auteur des « Enfants de chœur » qui serait adapté au cinéma par Todd Field sous le titre Little Children.

L’Arriviste commence avec la présentation de Tracy Flick (Reese Witherspoon), une élève très ambitieuse, et de Jim McAllister (Matthew Broderick), professeur d’éducation civique. Tracy se présentant aux élections pour la présidence du conseil des élèves de son lycée. Il s’agit a priori d’une élection gagnée d’avance, faute d’opposant. Assez rapidement, le film d’Alexander Payne utilisera un certain nombre de techniques dans sa narration pour éclaircir les enjeux narratifs, et en particulier les arrêts sur image, les flashbacks et les voix off, qui permettront tout au long du film de présenter des parties du récit en adoptant le point de vue de l’un des quatre personnages principaux : Mr McAllister, Tracy, Paul et Tammy.

C’est surtout la trajectoire extrêmement contrariée du professeur McAllister qui occupera Alexander Payne dans L’Arriviste. On ressent en effet dès le début du film que le personnage incarné par Matthew Broderick a des comptes à régler avec Tracy : la jeune fille a non seulement séduit Dave, l’ami et le collègue de Jim, mais elle a surtout l’enseignant laissé dans un état lamentable, au chômage et divorcé. Déterminé à donner une leçon d’humilité à la jeune femme, McAllister convainc Paul (Chris Klein), un athlète populaire, de se présenter contre elle. Les choses commenceront à échapper à tout contrôle quand Tammy (Jessica Campbell), la sœur de Paul, qui a un compte très personnel à régler avec son frère, décidera de se présenter également. Au fur et à mesure que l’intrigue du film évolue, on comprendra que Jim est prêt à aller jusqu’au bout pour stopper la course au pouvoir de Tracy…

L’intrigue du roman adapté par Alexander Payne et Jim Taylor s’inspirait de deux événements s’étant déroulés en 1992 : l’élection présidentielle américaine, au cours de laquelle Ross Perot s’était présenté en tant que candidat indépendant (à la façon de Tammy dans L’Arriviste) et avait obtenu presque 19 millions de voix, et un incident survenu au Memorial High School d’Eau Claire, dans le Wisconsin, au cours duquel une élève enceinte avait été élue reine du bal… Mais le personnel de l’établissement avait préféré annoncer une autre gagnante et brûlé les bulletins de vote pour dissimuler l’incident.

Même si les personnages sont globalement attachants, L’Arriviste est un film cruel, qui n’hésite jamais à les mettre dans des situations compliquées. Celui qui morflera le plus est sans aucun doute le professeur McAllister, qu’Alexander Payne et Jim Taylor prennent un grand plaisir à tordre, à essorer, émotionnellement et physiquement, laissant le pauvre homme meurtri et tremblant, même si la fin du film laisse entrevoir un peu d’espoir (ce que lui refusait la fin du roman original). Tracy devra également franchir un certain nombre d’obstacles, mais en dépit des explications égrenées par Reese Witherspoon en voix-off, le contraste entre ses propos et les images font que le film la présente dans un premier temps comme la « méchante » de l’histoire, un rouleau-compresseur dont les ruses sexuelles et les plans calculés permettent de contrôler tous ceux qui se trouvent sur son chemin.

Mais une des grandes forces de L’Arriviste se situe probablement dans la façon dont Alexander parvient à retourner leurs performances contre le public, dans le but de susciter des émotions contradictoires dans le troisième acte du film. Ainsi, le spectateur ressentira une sensation très inconfortable : celle d’avoir encouragé un homme d’âge mûr rancunier et à détester une adolescente qui, quelles que soient ses actions, ne méritait peut-être pas ce que McAllister lui réservait. Il est assez étonnant de voir avec quelle facilité Alexander Payne suscite ce type d’émotions contradictoires, et fait en sorte que le public s’identifie au personnage de Broderick pour mieux le rejeter par la suite.

Et c’est probablement seulement au deuxième visionnage de L’Arriviste que le spectateur se rendra compte de l’extrême précision de son intrigue et de ses dialogues acérés. Il devient clair en effet qu’Alexander Payne savait exactement ce qu’il voulait que son public ressente, comment il voulait qu’il réagisse et quand il voulait qu’il réponde aux questions obscures qui remontent à la surface à chaque développement de l’histoire. De fait, Alexander Payne n’a pas seulement réalisé un des meilleurs Teen Movies de l’histoire, mais a également semé une partie des graines tonales qui porteraient leurs fruits dans ses œuvres ultérieures, qui seraient moins dépendantes des codes immuables du genre auquel L’Arriviste appartient.

Le Blu-ray 4K Ultra HD

[4/5]

Malgré le peu d’attachement du public français pour L’Arriviste, le film débarque ces jours-ci au format Blu-ray 4K Ultra HD, sous les couleurs de Paramount Pictures. On salue et on applaudit l’initiative de l’éditeur, qui petit à petit commence à sortir au format Katka les Teen Movies les plus prestigieux de son catalogue : après l’excellent Lolita malgré moi en avril (7,1/10 sur le site de référence IMDb), voici donc débarquer L’Arriviste (7,2/10 sur IMDb). Alors franchement, on vous donne un conseil : achetez-les AUJOURD’HUI, ou ne venez pas vous plaindre dans trois mois quand ils seront épuisés en France et qu’il faudra lâcher 100€ pour les trouver sur les sites de seconde main.

L’Arriviste s’offre donc une édition Blu-ray 4K Ultra HD minimaliste mais efficace. L’upgrade Ultra Haute-Définition est impressionnant, le film est proposé en Dolby Vision + HDR10, et nous propose une amélioration visuelle du film que les nombreux fans apprécieront à sa juste valeur. Côté master, le film d’Alexander Payne nous propose un rendu visuel époustouflant, avec une fine granulation argentique et un niveau de détail d’une finesse vraiment extraordinaire, même si on pourra remarquer une légère atténuation du grain sur certains arrêts sur image proposés par le film. Les couleurs, les contrastes et les noirs sont impressionnants : c’est magnifique, un bel hommage rendu au travail sur l’image assuré par le chef opérateur du film James Glennon. Même constat d’excellence et de fidélité au matériau d’origine du côté des pistes sonores : la VO est mixée en Dolby TrueHD 5.1, la VF en Dolby Digital 5.1, et toutes deux proposent un bon équilibre et une excellente stabilité d’ensemble, sans souffle ni craquements intempestifs. Les deux mixages s’avèrent également plutôt dynamiques, surtout durant les scènes musicales. Du très beau travail. Pas de bonus.

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