Génération perdue
États-Unis : 1987
Titre original : The Lost Boys
Réalisation : Joel Schumacher
Scénario : Jan Fischer, James Jeremias, Jeffrey Boam
Acteurs : Jason Patric, Corey Haim, Kiefer Sutherland
Éditeur : Warner Bros.
Durée : 1h37
Genre : Fantastique
Date de sortie cinéma : 13 janvier 1988
Date de sortie DVD/BR : 21 septembre 2022
Sam et son grand frère sont de typiques adolescents américains aux centres d’intérêts tout aussi typiques. Mais les choses commencent à changer après qu’ils déménagent avec leur mère dans la paisible ville californienne de Santa Clara. Michael n’est plus lui-même. Et sa maman ne va pas aimer son nouveau style de vie…
Le film
[3,5/5]
Lorsqu’il sort sur les écrans en 1987, Génération perdue s’inscrit dans une vague de teen-movies horrifiques tentant, bon gré mal gré et depuis quelques années, de renouveler les codes séculaires, les passages obligés les plus éculés et les figures par trop poussiéreuses du genre fantastique. Le film de Joel Schumacher fait donc suite à des films tels que Le Loup-garou de Londres (John Landis, 1981), Vampire, vous avez dit vampire ? (Tom Holland, 1985), Peur bleue (Daniel Attias, 1985), Extra Sangsues (Fred Dekker, 1986) ou encore The Monster Squad (Fred Dekker, 1987).
Autant de films qui apportaient une petite touche de modernité typiquement 80’s aux créatures qu’elles abordaient, tout en visant spécifiquement un public d’adolescents et de jeunes adultes par le biais de personnages centraux aux prises avec les affres de la puberté et du coming of age. L’accroche destinée au public sur l’affiche de Génération perdue était d’ailleurs sans équivoque : « Dormir toute la journée. Faire la fête toute la nuit. C’est cool d’être un vampire. » On pourrait d’ailleurs en dire autant de la VF, qui aligne les expressions désuètes telles que « mecton », mais qui nous réserve suffisamment de surprises pour réussir à nous faire régulièrement sourire, et ce même quand la traduction des dialogues originaux est totalement trahie.
Voici d’ailleurs quelques exemples des libertés prises par les auteurs de la version française de Génération perdue :
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« Flies and the undead go together like bullets and guns » deviendra « Mon cher, les mouches ça va aux vampires comme la connerie aux fachos ! »
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« Listen, just so you know, if you try to stop us or vamp out in any way, then I’ll stake you without even thinking twice about it ! » deviendra « Que les choses soient claires : si tu sors tes crocs de merde ou qu’il te prend une petite envie de boire un coup, je te jure que je te plante une allumette géante dans le palpitant ! »
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« Listen, buddy. If you’re looking for the diet frozen yogurt bar, it went out of business last summer » deviendra « Écoute petit, si tu cherches la boutique de toilettage pour chiens, elle a été plastiquée le soir de Noël ! »
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« We trashed the one that looks like Twisted Sister. We totally annihilated his night-stalking ass » deviendra « On s’est payé le grand blond aux rangers noires ! On lui a nettoyé sa gueule de nazi, qu’il en reste aucune trace ! »
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etc, etc.
Plaisir coupable de la génération VHS, Génération perdue nous propose donc de rencontrer une petite horde de vampires aux looks de rockeurs FM de la fin des années 80 : nuques longues, cheveux permanentés / peroxydés, boucles d’oreille ostentatoires, longues bottes, tenues de cuir et de jean… Ce sont les rebelles de l’époque, des « loubards », mecton, qui chevauchent leurs bécanes les cheveux au vent et écument les manèges de foire à la recherche de gonzesses et de chair fraîche. Car les vampires de Génération perdue abandonnent toute idée de « romantisme » au profit d’une jeunesse éternelle dont ils profitent à travers leur recherche des plaisirs immédiats. Ces vampires-là sont également loin, très loin, des prédateurs sexuels des romans d’Anne Rice, ou des bêtes sauvages de films tels que Je suis une légende ou Blade. Ce sont juste des gamins paumés, too cool for School, donnant l’impression de se marrer en bande pendant qu’ils sèchent les cours – le titre original du film, The Lost Boys, fait d’ailleurs explicitement référence aux personnages des Enfants perdus de « Peter Pan ».
Les deux ados au cœur de Génération perdue sont donc pris entre deux feux : d’un côté, il y a l’autorité parentale (représentée par le personnage de Dianne Wiest), de l’autre une éternité de plaisirs et d’insouciance. Si Michael se laisse tenter par l’appel des vampires, le jeune Sam quant à lui a rapidement fait son choix : « Mon propre frère est une bon dieu de saloperie de vampire ! Tu vas voir ce que dira maman quand elle rentrera ! » Pour le reste, l’intrigue du film de Joel Schumacher tend à laisser penser que les ravages commis par les vampires au sein de la petite communauté de Santa Carla n’ont aucune espèce d’incidence sur la population, ni sur les jeunes locaux, qui sortent tous les soirs à la fête foraine sans se soucier du nombre effarant de disparitions dans la ville. Les seuls personnages du film à se soucier un tant soit peu de la situation sont les frères Frog (Corey Feldman et Jamison Newlander), deux adolescents qui tiennent une boutique de comics – c’est d’ailleurs par le biais des comics que la vérité sera amenée au jeune Sam.
Globalement, le mélange de fantastique et d’humour que nous propose Génération perdue est assez efficace. Véritables héros du film, les frères Frog apportent au film un humour assez unique, ce qui permet de détendre l’atmosphère et occasionne plusieurs scènes mémorables. Parmi celles-ci, on notera bien entendu le climax du film, riche en débordements « gore », qui achève de donner à ce divertissement de l’ère MTV une esthétique certes kitsch et tape-à-l’œil, mais tout à fait réjouissante – d’autant que le film, malgré son côté über-80’s, a finalement plutôt étonnamment bien résisté aux poids des années.
Le Blu-ray 4K Ultra HD
[4/5]
Sorti en même temps que la nouvelle édition 4K de Poltergeist, ce grand classique de l’ère VHS qu’est Génération perdue s’offre également une édition Blu-ray 4K Ultra HD, toujours sous les couleurs de Warner Bros. Cette édition 4K, qui coïncide avec le 35ème anniversaire du film de Joel Schumacher, reprend les mêmes bonus que l’édition Blu-ray de 2008, mais nous propose une amélioration visuelle du film que les nombreux fans apprécieront à sa juste valeur.
Coté image, le transfert 2160p de Génération perdue nous propose une image stable, conservant le grain cinéma d’origine et respectant parfaitement la jolie photo de Michael Chapman, ainsi que les occasionnelles très astucieuses compositions de plans de Joel Schumacher. Parce qu’on aime ou on déteste, mais à l’image d’un film tel que Razorback par exemple, Génération perdue possède vraiment un style visuel unique, très fort, avec des niveaux de noir persistants soutenus par des éclairages vifs – c’est certes typique des années 1980, et cela a un côté ouvertement artificiel, mais le fait est que ça a de la gueule à l’image. On se régalera donc tout particulièrement de certaines scènes encore plus marquées que d’autres : la scène des vampires dans les arbres, celle prenant place dans le QG souterrain des vampires, etc. Tout semble y avoir été éclairé pour le spectacle, c’est kitsch, mais c’est cool, d’autant que la technologie HDR appuie sans problème tous les niveaux avec des textures et des contrastes très marqués. Côté son, la VO du film nous est proposée en DTS-HD Master Audio 5.1, et s’avère tout à fait efficace dans son genre. La reprise de « People are Strange » des Doors par Echo & The Bunnymen donne le ton, et sonne particulièrement bien. Les surrounds sont subtils et dynamiques. Les canaux arrière et le caisson de basses jouent la carte de l’ambiance, mais l’ensemble fait preuve d’une bonne dose de punch. La VF hérite en revanche du mixage Dolby Digital 2.0 que l’on connaît depuis le DVD de 1998.
Du côté des suppléments, outre un commentaire audio de Joel Schumacher (en VO uniquement), on trouvera un intéressant making of rétrospectif divisé en quatre parties (19 minutes), qui s’attarderont sur la personnalité de Joel Schumacher, sur le mélange d’horreur et de comédie dans le film, sur le regard neuf porté sur le mythe du vampire, ainsi que sur les idées de suites qui avaient été évoquées à l’époque. On aura également droit à un regard approfondi sur les maquillages et effets pratiques du film (14 minutes) aux côtés de Greg Cannom, à un sujet sur les deux « Coreys » du film (5 minutes), l’amitié entre Corey Feldman et Corey Haim remontant à leur audition pour le même rôle dans Les Goonies. On retrouvera ensuite à nouveau Corey Haim, Corey Feldman accompagnés de Jamison Newlander pour un commentaire vidéo de certaines scènes du film (19 minutes). Les plus curieux pourront également se régaler d’une poignée de scènes coupées (15 minutes). On terminera avec une galerie de photos, une carte interactive qui nous permettra de découvrir les légendes de vampires du monde entier, un clip vidéo de « Lost in the Shadows » par Lou Gramm, et la traditionnelle bande-annonce. On notera également que le Blu-ray 4K Ultra HD de Génération perdue édité par Warner Bros. est présenté dans un superbe Steelbook aux couleurs du film.