Etats-Unis, 2015
Titre original : San Andreas
Réalisateur : Brad Peyton
Scénario : Carlton Cuse, Andre Fabrizio et Jeremy Passmore
Acteurs : Dwayne Johnson, Carla Gugino, Alexandra Daddario, Paul Giamatti
Distribution : Warner Bros.
Durée : 1h55
Genre : Catastrophe
Date de sortie : 27 mai 2015
Note : 2,5/5
Si le risque sismique faisait partie des craintes raisonnables en région parisienne, particulièrement tranquille de ce point de vue-là, nous aimerions qu’un homme beau et fort comme Dwayne Johnson vienne sauver l’humanité en cas de sinistre majeur. Par défaut, nous avions l’espoir sans doute démesuré que cet acteur au charme dévastateur revigore le genre du film catastrophe, retombé dans un état moribond depuis sa brève renaissance au tournant du siècle. Face à un film aussi platement conventionnel que San Andreas, il nous paraît difficile de ne pas être déçus. Ce blockbuster estival remplit certes le contrat établi à travers sa bande-annonce, à savoir de fournir un divertissement tonitruant aux opérations de secours incroyablement téméraires. Mais il y parvient d’une manière si ennuyeusement sérieuse et peu inspirée qu’il supporte à peine la comparaison avec des films récents comparables, au lieu de les dépasser à la fois en termes d’effets spéciaux et d’excitation morbide.
Synopsis : En instance de divorce, le sauveteur Ray Gaines doit emmener sa fille Blake à l’université, où elle commencera ses études. Ce voyage en famille est rendu impossible par l’écroulement du barrage Hoover dans le Nevada après un tremblement de terre. En tant que capitaine des pompiers californiens, Ray doit rejoindre son équipe sur place afin d’y participer aux secours. Mais avant même qu’il ne puisse partir, une secousse violente frappe également la côte ouest des Etats-Unis. Après avoir sauvé in extremis sa femme Emma, Ray s’envole avec son hélicoptère en direction de San Francisco, où Blake est prise au piège sous les gravats. Ce qu’il ignore encore, mais ce que les scientifiques autour du professeur Lawrence Hayes craignent pouvoir désormais prédire, c’est que le pire reste à venir pour cette région-là.
Jamais sans ma fille
Selon un raisonnement qui n’appartient qu’aux scénaristes du cinéma commercial de Hollywood, quand le monde s’écroule autour d’hommes ou de femmes qui pourraient jouer un rôle essentiel dans l’organisation des secours, la seule chose à laquelle ils pensent serait de préserver leur nid familial et de rapatrier leur progéniture éparpillée aux quatre vents. Le cas le plus exemplaire de ce nombrilisme personnel se trouve dans Le Jour d’après de Roland Emmerich, où un climatologue visionnaire plaque tout pour traverser à pied un continent enneigé et retrouver son fils échoué à New York. Le même principe dramatique est à l’œuvre ici, à une échelle géographique moindre, puisqu’il suffit de parcourir un seul état américain pour rétablir le bonheur familial. Globalement, il émane un manque d’ambition préjudiciable de ce film, qui enchaîne sagement les poncifs, sans jamais chercher à les intensifier ou au contraire à les tourner en dérision. A côté des séquences de destruction massive, là où des narrations un peu plus futées tenteraient de dresser un portrait au vitriol des Etats-Unis – car ne l’oublions pas, le film catastrophe est avant tout un genre profondément américain –, San Andreas se contente plutôt maladroitement de rafistoler un mariage en ruines. La course contre la montre pour retrouver leur fille permet ainsi à Emma et Ray de s’épancher longuement sur une tragédie familiale du passé. Quelle drôle de façon intimiste de faire face psychologiquement à l’hécatombe que les deux personnages survolent d’un air détaché !
L’abrutissement dû à la surenchère des catastrophes
Au moins, quand l’action devient plus musclée, l’intervention de notre héros pratiquement sans faille se montre légèrement plus concluante. Bien qu’il n’intervienne qu’une seule et misérable fois quand il s’agit de sauver des anonymes étrangers à sa famille, son sang froid et son courage sont mis en exergue lors de la première séquence du film. Celle-ci nous a vaguement rappelé le sauvetage risqué au début de Cliffhanger de Renny Harlin, au détail près que la faille de Ray, aussi minime soit-elle, ne sera révélée que bien plus tard dans le film. Hélas, cette concentration artificielle sur deux ou trois personnages et décors prive le récit d’une quelconque envergure épique, par ailleurs le seul reproche que l’on ne puisse pas faire à Tremblement de terre de Mark Robson qui se complaisait à massacrer les membres de son ensemble de vedettes sur le déclin à intervalles réguliers. Ici, la mort et le désespoir ne dépassent jamais le stade synthétique de la béquille scénaristique, au détriment d’une tension palpable. C’est parce que Ray et les siens survivent à tous les cataclysmes imaginables, avec en point d’exagération suprême le coup de la vague du tsunami, que nous ne tardons pas à nous désintéresser progressivement de leurs aventures répétitives. Car la mise en scène à peine serviable de Brad Peyton gère l’accumulation des désastres sans brio, mais avec la détermination terne du réalisateur qui cherche à éviter la prise de risque avec son mastodonte de film. Enfin, même si l’on ne voit à aucun moment le président américain, d’habitude celui qui personnifie et exprime le trauma national, le scénario n’a pas pu s’empêcher de glisser à la dernière minute une référence au mythe de l’esprit pionnier des Américains, le drapeau national à l’appui.
Conclusion
En dépit d’une certaine efficacité dans l’enchaînement routinier des catastrophes, ce film peine sérieusement à nous enthousiasmer. Notre fantasme du messie Dwayne Johnson reste certes à peu près intact. Mais nous espérons désormais que l’acteur trouvera rapidement un rôle plus exigeant et moins caricatural que celui de ce secouriste en montagne et, surtout, un film moins prévisible pour mettre en valeur ses muscles saillants.