Critique : Personal Affairs

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Personal Affairs

Israël : 2016
Titre original : Omor Shakhsiya
Réalisation : Maha Haj
Scénario : Maha Haj
Acteurs : Hanan Hillo, Amer Hlehel, Ziad Bakri, Maisa Abd Elhadi
Distribution : Sophie Dulac Distribution
Durée : 1h28
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie : 1er mars 2017

4.5/5

Présenté dans la sélection Un Certain Regard lors du dernier Festival de Cannes, Personal Affairs est le premier long métrage de Maha Haj, réalisatrice palestinienne au passeport israélien. Maha est en effet originaire de Nazareth, comme la famille dont son film nous fait le portrait, et Nazareth est une ville pleinement israélienne, quand bien même la quasi totalité de la population est arabe. Suite à la vision de Personal Affairs, on ne sera pas surpris d’apprendre que Maha Haj a commencé sa carrière cinématographique aux côtés de Elia Suleiman, Prix du Jury au Festival de Cannes 2002 avec Intervention divine. Elle était en effet décoratrice sur Le temps qu’il reste, le 3ème long métrage de ce réalisateur palestinien, souvent comparé à Jacques Tati.

Synopsis : À Nazareth, un vieux couple vit au rythme de la routine quotidienne. De l’autre côté de la frontière, à Ramallah, leur fils Tarek voudrait rester un éternel célibataire, leur fille est sur le point d’accoucher, son mari garagiste décroche un rôle au cinéma, alors que la grand-mère perd le Nord… Entre-temps, en Suède, leur fils aîné Hisham attend leur visite. Chacun vaque à ses occupations, entre moments de plaisir et désaccords, rêves et désillusions. Certains souhaitent partir, d’autres rester, mais tous ont des histoires personnelles à régler…

Une affaire de famille

Dans la famille dépeinte par Maha Haj dans Personal Affairs, on demande le père, Saleh, et la mère, Nabila. Saleh et Nabila habitent à Nazareth, et les communications entre eux sont, depuis longtemps, réduites au strict minimum, genre un « passe moi le sel », première réplique du film, lancée par Saleh à Nabila alors qu’il n’a qu’à tendre le bras pour atteindre la salière. En fait, Saleh passe son temps à lire des pages Wikipedia sur Internet alors que Nabila tricote, cuisine et regarde les premières minutes de séries télévisées devant lesquelles, régulièrement, elle s’endort. Un vieux couple au sein duquel l’amour s’est enfuit, si tant est qu’il ait jamais existé.  Leurs 3 enfants ont choisi d’aller s’établir ailleurs, Hicham en Suède, Tarek et Samar à Ramallah. Hicham, qui correspond via Skype avec ses parents, aimerait que ces derniers viennent lui rendre visite dans son nouveau pays. Samar, toute proche d’accoucher, est mariée avec George, un garagiste dont la mère, qui vit avec le couple, est à la fois sénile et diabétique. Quant à Tarek, il est plus ou moins metteur en scène et une relation professionnelle et plus ou moins amoureuse le lie à Maïssa, la meilleure amie de Samar.


Très drôle et plus politique qu’il n’en a l’air

Tourné avec très peu de mouvements de caméra, le plus souvent en plans séquence, Personal affairs est un film regorgeant d’un humour très fin et qui présente tout à la fois un volet universel et un volet lié à la situation des palestiniens en Israël. Le volet universel, c’est l’incommunicabilité 2.0, celle qui se vit au travers d’internet, de Skype, des réseaux sociaux et des séries télévisées. Quant au volet israélo-palestinien, ce sont les difficultés que rencontrent les palestiniens dans leur vie de tous les jours, tout particulièrement avec les fameux checkpoints, ou le fait pour un trentenaire de ne jamais avoir vu la mer, pourtant située à seulement 60 km, tout simplement parce qu’il a toujours habité à Ramallah, une ville située en zone A, avec toutes les difficultés que cela représente pour aller voir ailleurs.

On ne peut que succomber au charme fou que dégage ce film, aussi bien dans sa description pleine de tendresse d’une famille éclatée qui, par de nombreux côtés, pourrait avoir ses racines dans n’importe quel pays du monde que dans toutes les métaphores parsemées de façon très subtile par Maha Haj tout au long du film et qui font de Personal Affairs une œuvre beaucoup plus politique qu’elle n’en a l’air.

Peu de têtes connues

Très vite, Maha Haj a pris la décision de ne pas travailler qu’avec des acteurs professionnels. C’est ainsi que le couple formé par Saleh et Nabila est interprété par un couple d’amis à elle qui vit ensemble depuis plus de 30 ans. Quant à la mère de George, son interprète est une amie de la mère de la réalisatrice. Parmi les comédiens professionnels, on reconnait surtout Maisa Abd Elhadi, qui interprétait le rôle principal dans 3000 nuits et qui joue ici le rôle de Maïssa.

Conclusion

Pour son premier long métrage, Maha Haj a tapé très juste et très fort. Sous couvert d’une comédie familiale, le plus souvent très drôle, elle parvient à montrer de façon presque subliminale la situation de prisonniers vécue par les palestiniens, qu’ils soient de nationalité palestinienne ou israélienne. Face à ce tour de force, on est en droit de regretter que Personal Affairs ne se soit pas vu attribuer la Caméra d’or, récompense qu’il méritait amplement.

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