On the ice
USA : 2011
Titre original : On the Ice
Réalisateur : Andrew Okpeaha MacLean
Scénario : Andrew Okpeaha MacLean
Acteurs : Josiah Patkotak, Frank Qutuq Irelan, Teddy Kyle Smith
Distribution : Memento Films Distribution
Durée : 1h36
Genre : Drame, Thriller
Date de sortie : 14 décembre 2011
Globale : [rating:4][five-star-rating]
Ce premier film inuit réussit le subtil mélange du polar et du film social en fusionnant une histoire très classique de meurtre et un décor de banquise où le blanc n’a rien de paradisiaque. Joli coup !
Synopsis : Dans le grand nord de l’Alaska, des Inuits vivent à l’année. Très fortement envahis par la culture américaine, les jeunes connaissent les mêmes problèmes qu’ailleurs, les conditions climatiques et l’austérité de la nature en plus. Au cours d’une expédition de chasse, une rixe va opposer trois d’entre eux, amis pourtant. Un coup de couteau mortel va faire basculer tout le village dans le désarroi et déstabiliser l’auteur et son complice.
Enfer blanc
Dans nos pays où se produisent plusieurs centaines de films par an, la fraicheur de l’inédit est devenue une denrée bien rare. Plus d’un siècle après l’arrivée du train en gare de La Ciotat, les Lumière et autres Méliès, voici sur nos écrans le premier film inuit. La curiosité devrait suffire à remplir les salles. Et la qualité du film favoriser le bouche à oreille. Car On the ice réussit l’alchimie du vrai film de genre et l’ancrage dans les racines de son cinéaste.
Nous ne sommes pas comme dans de nombreux films iraniens, turcs ou israéliens aux prises avec une étude ethnologique où le constat sociétal étaye, voire justifie, un propos. Le caractère revendicatif de certaines productions (dont certaines ont donné d’authentiques chefs-d’œuvre comme Une séparation cette année) est ici minimisé sans être totalement absent pour laisser la part belle à une intrigue. Le cinéaste et auteur du scénario s’efforce avant tout de nous raconter une histoire. Nous sommes dans un thriller avec toute la grammaire inhérente au genre.
Le procédé contient en soi ses propres limites comme dans tout sujet à la narration classique où s’opère une transposition. La première séduction doit donc venir davantage du décor que de l’histoire (un meurtre, des coupables, une enquête, équation mille fois vue) même si le cinéaste va gommer toute velléité de contemplation devant ces étendues blanches à perte de vue et de vie pour les intégrer à son propos. Elles constituent bien sûr un personnage à part entière un peu comme dans le récent et très réussi Révoltés de l’Ile du diable. Et déterminent bien des comportements.
Des personnages un peu… frappés
Les nuits blanches chères à Dostoïevski quand elles se déroulent à Saint-Pétersbourg sont ici plus accentuées encore car le lieu du film se situe plus au nord encore que la cité de Pierre le Grand. Le jour et la nuit se confondent dans une même clarté dont on dit qu’elle fatigue jusqu’à la folie. Ce ne sera pas vraiment le sujet de ce film même si chaque personnage semble avoir un petit grain de folie, parfois meurtrière, parfois comportementale (l’opiniâtreté du père du criminel à comprendre, l’alcoolisme d’une mère).
Mais rien de semblable avec cette folie métaphysique russe si longuement décrite chez les auteurs qui ont planté le décor de leurs œuvres à Saint-Pétersbourg. Car un autre spectre se profile avec constance : celui de l’oubli des traditions par l’américanisation outrancière. Un panneau publicitaire d’une célèbre marque de boisson gazeuse, l’évocation d’un passé où les chiens de traineaux servaient d’outils de travail avant l’arrivée des motoneiges et bien sûr la perte identitaire avec l’oubli de la langue vernaculaire largement supplantée par l’anglais, la langue du rap et sa cohorte de consommations qui va avec.
En ce sens, On the ice constitue une belle surprise. Entre constat social et polar, judicieusement imbriqués, le cinéaste nous offre un film à la fois inattendu et de facture classique. Que de promesses dans un tel cinéma !
Résumé
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