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Chili, Etats-Unis : 2012
Titre original : No
Réalisateur : Pablo Larraín
Scénario : Pedro Peirano
Acteurs : Gael García Bernal, Alfredo Castro
Distribution : Wild Brunch Distribution
Durée : 1 h 57
Genre : Drame, historique
Date de sortie : 6 mars 2013

Globale : [rating:4][five-star-rating]

3ème volet d’une trilogie consacrée à la période de 16 ans pendant laquelle la dictature militaire conduite par le général Augusto Pinochet gouverna le Chili, No est le 4ème long métrage du réalisateur Pablo Larraín . Les 2 premiers films de cette trilogie, Tony Manero et Santiago 1973, Post Mortem, n’étaient qu’indirectement des films politiques. Le sujet de No, par contre, est totalement politique puisque ce film retrace la façon dont le No fut conduit à la victoire lors du référendum plébiscitaire du 5 octobre 1988 qui devait décider si, oui ou non, Pinochet était reconduit à la tête de l’état.

Synopsis :

Chili, 1988. Lorsque le dictateur chilien Augusto Pinochet, face à la pression internationale, consent à organiser un référendum sur sa présidence, les dirigeants de l’opposition persuadent un jeune et brillant publicitaire, René Saavedra, de concevoir leur campagne. Avec peu de moyens, mais des méthodes innovantes, Saavedra et son équipe construisent un plan audacieux pour libérer le pays de l’oppression, malgré la surveillance constante des hommes de Pinochet.

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Petit rappel historique

Le film de Pablo Larraín prend quelques libertés avec la vérité historique. Certes, le contexte international n’a pas été totalement étranger au référendum du 5 octobre 1988 et à sa conséquence principale : la fin, en 1990, de la dictature militaire au Chili. Il n’empêche que la constitution chilienne adoptée en 1980 prévoyait déjà ce scénario. En fait, le 11 mars 1981 voyait le début d’une période de 8 ans jour pour jour pendant laquelle le général Augusto Pinochet était assuré de rester à la tête de l’état. La constitution de 1980 prévoyait qu’au moins 90 jours avant la fin de ce mandat serait organisé un référendum plébiscitaire devant décider si, oui ou non, un candidat présenté par la junte militaire était accepté par la population chilienne pour devenir chef de l’état pendant 8 ans à partir du 11 mars 1989. Sans surprise, Augusto Pinochet est désigné pour, éventuellement, se succéder à lui-même. Du côté de l’opposition, une loi de 1987 ayant rétabli le droit de réunion des partis politiques à l’exception du Parti Communiste, 17 partis arrivent à s’entendre en publiant un document appelant à la victoire du No. La campagne électorale commence le 5 septembre 1988 : chaque camp a droit chaque jour à 15 minutes de spots télévisés.

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Une bataille publicitaire

Pour aboutir à la victoire du No, deux voies sont en concurrence : une voie plutôt défensive mettant l’accent sur le présent, insistant sur les violences et les injustices de la dictature militaire ; une voie positive mettant en avant la joie de vivre qu’une victoire du No ne manquerait pas de redonner au Chili. Malgré les réticences de nombreuses personnalités de l’opposition, le camp du No demande à René Saavedra, un jeune publiciste, de chapeauter leur campagne. Curiosité : Saavedra travaille dans une agence de pub dont le patron, Lucho Guzman, fait le même travail que lui dans le camp opposé. Un camp qui, au début, se considère comme gagnant certain du référendum. Le film de Pablo Larraín nous fait rentrer dans l’intimité des 2 camps, on assiste à leurs réunions, on visionne leurs spots qui se répondent les uns aux autres. Grâce aux méthodes publicitaires de René Saavedra, la campagne du camp du No s’avère beaucoup plus novatrice même si, avec le recul, les jingles et les clips musicaux s’avèrent souvent assez médiocres et passablement ringards. Même le slogan chanté « la alegria ya viene » (la joie arrive), si populaire à l’époque, si important durant cette campagne, n’échappe pas au jugement de l’histoire. Petit à petit, le camp du oui se durcit lorsqu’il prend conscience d’une défaite possible, l’opposition doit faire face à des intimidations et, dans les villes du Chili, les manifestations des uns répondent à celles des autres. Dénouement ironique : dans un pays qui, depuis 15 ans, a suivi les préceptes économiques ultra-libéraux des Chicago Boys, la victoire va revenir au camp opposé qui a su le mieux utiliser une des armes du libéralisme, la publicité. Une étape de plus pour consolider définitivement le système capitaliste au Chili.

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Un film qui vise la crédibilité

Pour réaliser son film, adaptation de la pièce inédite « El Plebiscito » de Antonio Skármeta. Pablo Larraín a choisi d’utiliser un matériel lui permettant d’obtenir des images d’une qualité (ou d’une absence de qualité!) identique aux images d’archive qu’il souhaitait incorporer dans la fiction : format 4:3, utilisation de caméras à tube Ikegami des années 1980. Ce choix ne satisfera sans doute pas les fanatiques de l’image HD mais il donne une grande crédibilité au film, ne serait-ce qu’en permettant d’incorporer des prestations de Pinochet ou de Jane Fonda sans qu’apparaisse une différence fondamentale avec les images de la fiction. Quant au choix des comédiens, il s’avère judicieux avec les très bonnes et très crédibles prestations de Gael Garcia Bernal dans le rôle de Saavedra et d’Alfredo Castro, l’acteur fétiche du réalisateur, déjà présent dans ses 3 films précédents, dans le rôle de Lucho Guzman. L’ensemble de ces qualités ont valu à No d’obtenir le Art Cinema Award, prix majeur de la Quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes 2012, décerné par la Confédération Internationale des Cinémas d’Art et d’Essai, et de faire partie des 5 films en compétition pour l’ »Oscar du meilleur film en langue étrangère » de 2013.

Résumé

Tout en prenant quelques libertés avec la vérité historique et en créant de toute pièce le personnage principal du film, personnage faisant sans doute la synthèse de personnages bien réels, Pablo Larraín nous présente une œuvre passionnante à mi-chemin entre fiction et documentaire historique. Ce film nous montre que, si certaines conditions sont réunies, un peuple peut arriver à vaincre une dictature par la voie électorale. Comment ? En empruntant ses outils idéologiques à l’adversaire !

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