Une étude en jaune – Giallos et thrillers européens
France : 2021
Titre original : –
Auteur : Frédéric Pizzoferrato
Genre : Guide, Cinéma
Éditeur : Artus Livres
Date de sortie : 5 novembre 2021
Nombre de pages : 396 pages
Note : 5/5
Après une tentative de définition du giallo, « ce genre qui n’en est pas un », et un historique du genre, suivi d’une petite rétrospective du krimi et d’une chronique de l’ancêtre « Les diaboliques », le livre s’intéresse aux grands maîtres du giallo (Mario Bava, Dario Argento, Umberto Lenzi, Lucio Fulci et Sergio Martino) dont tous les films sont chroniqués. Ensuite nous envisageons les trois grandes périodes de l’histoire du giallo et du thriller d’angoisse européen: l’âge d’or (de « La fille qui en savait trop » à la fin des années ’70), la plus fructueuse et la plus intéressante ; le néo-giallo (lancé par « Ténèbres ») qui se caractérise par ses emprunts au slasher et au thriller érotique ; enfin le renouveau (depuis le début des années 2000) avec les hommages, déclinaisons et autres tentatives de relancer le genre. Une dernière partie propose quelques titres non européens manifestement influencés par les codes narratifs et visuels du thriller italiens. Une courte annexe reprend de brèves bio / filmo de quelques acteurs et actrices incontournables du genre. En tout plus de 250 films critiqués !
S’il s’agit plus que jamais d’un genre extrêmement populaire auprès des cinéphiles et des amateurs de Bis en France, le Giallo n’a jamais tellement déchaîné les plumes dans l’hexagone, et jusqu’à Une étude en jaune – Giallos et thrillers européens, aucun ouvrage ne lui avait été intégralement consacré. A ce jour, le livre de référence sur le sujet n’en était pas réellement un : il s’agissait en effet d’un « hors-série » du magazine Mad Movies, sorti en 2003 et intitulé « L’âge d’or du cinéma de genre italien ». Epuisée depuis plusieurs années, cette revue était souvent vendue à prix d’or sur le marché de l’occasion. On ne doute pas cependant que l’imposant ouvrage édité par Artus Livres ce mois-ci contribue fortement à faire dégringoler sa côte…
Mais Artus s’est fait griller la politesse à la dernière minute : Une étude en jaune – Giallos et thrillers européens ne sera ainsi pas le premier en français consacré au genre, puisque l’on note la parution récente d’un autre livre français consacré au Giallo : « L’ultima maniera – Le Giallo, un cinéma des passions » est en effet sorti chez Rouge Profond courant septembre. Il est signé Alice Laguarda, architecte / philosophe et professeure d’esthétique. Cet ouvrage très « universitaire » dans sa conception et sa rédaction, se targue de parcourir l’histoire du Giallo en partant d’un corpus d’une trentaine de films parmi les plus emblématiques – et les plus connus – du genre. On soulignera donc qu’il s’agit de deux livres fort différents l’un de l’autre : en véritable guide du routard exhaustif du genre, Une étude en jaune – Giallos et thrillers européens revient quant à lui sur environ 250 films… Certains sont connus, mais dans la plupart des cas, il s’agit de films inédits en DVD / Blu-ray, que l’on découvrira à travers des critiques complètes et passionnées.
« Un livre pour les gouverner tous ; pour les trouver, pour les amener tous et dans les ténèbres les lier » : voilà en gros ce que nous propose Une étude en jaune – Giallos et thrillers européens, pavé cartonné et grand format de près de deux kilos et 400 pages supervisé par Frédéric Pizzoferrato. En plus d’être un bel objet, il parait franchement difficile d’affirmer que cet ouvrage ne puisse s’imposer comme « LA » référence française dans le genre. Fruit de plusieurs années de recherches, de labeur acharné et de visionnages intensifs, ce gros bouquin élargit son champ de recherches au thriller européen en général, incluant donc le « Krimi » allemand ou le « film de machination » britannique, dérivé du film d’Henri-Georges Clouzot Les Diaboliques.
Une étude en jaune – Giallos et thrillers européens est naturellement divisé en plusieurs partie. En introduction, Frédéric Pizzoferrato nous donnera sa définition du Giallo, ainsi que les différentes « dates » importantes dans l’apparition de ce sous-genre. Si l’on se réfère à la page de vulgarisation Wikipédia consacrée au Giallo, il s’agirait d’un « genre de film d’exploitation italien à la frontière du cinéma policier, du cinéma d’horreur et de l’érotisme (…) Les films de ce type sont caractérisés par de grandes scènes de meurtres excessivement sanglantes, un jeu de caméra très stylisé et une musique inhabituelle (…). Ces films mettent en avant la violence sadique et brutale, l’érotisme. La forme primitive de ce cinéma est l’image d’une femme, seule chez elle et qui a peur ». On ajoutera que mis à part une volonté manifeste de régulièrement mettre en scène une bourgeoisie décadente commettant des actes criminels en toute impunité, le Giallo se tient globalement à distance des prises de position engagées des films italiens tournés à la même époque, et qu’il développe souvent des atmosphères baroques et morbides, qui traduisent peut-être le poids de cette bonne vieille culpabilité catholique. Frédéric Pizzoferrato abordera également d’entrée de jeu une rétrospective du genre Krimi, dont l’influence n’est sans doute pas à négliger.
Par la suite, Une étude en jaune – Giallos et thrillers européens optera pour une approche « historique » du genre : on commencera tout d’abord avec « l’âge d’or », qui débute avec La fille qui en savait trop de Mario Bava en 1963, jusqu’à la fin des années 70. On continuera ensuite en se déplaçant légèrement dans le temps, avec l’apparition du « néo-Giallo » lancé par le Ténèbres de Dario Argento en 1982 – une évolution parfois considérée comme décadente se nourrissant d’influences étrangères, allant du slasher au thriller érotique. Enfin, Frédéric Pizzoferrato et son équipe éditoriale évoqueront le Giallo post-2000s : si le genre semble malheureusement mort et enterré d’un point de vue populaire, on vient régulièrement apparaître des hommages, des clins d’yeux, quand il ne s’agit pas de tentatives pures et simples afin de relancer le genre.
Dans cet état d’esprit, on notera également que la préface du livre a été rédigée par Hélène Cattet et Bruno Forzani, qui s’étaient affirmés dès leur premier film / premier chef d’œuvre Amer comme des inconditionnels du Giallo. Quelques déclinaisons françaises du genre seront d’ailleurs abordées : outre les films du duo Cattet / Forzani, on notera également la présence de films tels que Peur sur la ville (Henri Verneuil, 1975) et Le couteau sous la gorge (Claude Mulot, 1986).
L’équipe d’auteurs rassemblée autour de Frédéric Pizzoferrato pour la rédaction d’Une étude en jaune – Giallos et thrillers européens contient certaines plumes bien connues des amateurs de cinéma Bis : David Didelot (Vidéotopsie), Jacques Coupienne (Rétroviseur), Philippe Delvaux (Sueurs froides), Alan Deprez (Cinemagfantastique), Claude Gaillard (Écran Bis), Justin Kwedi (DVDClassik), Didier Lefèvre (Medusa), Nio Lynes (Chroniques visuelles) et Joel Pfister (Cinéphiliquement votre) nous livrent donc leurs pensées sur de très nombreux films appartenant au genre, ou s’y apparentant. Tous semblent vraiment donner le meilleur d’eux-mêmes pour livrer au lecteur ce qui s’imposera sans peine comme le guide ultime du Giallo en langue française. Aussi incontournable qu’indispensable ! Plus d’informations sur le site de l’éditeur.
Un mot sur l’éditeur : Maison d’édition vidéo créée en 2005, Artus Films nous propose de découvrir ou redécouvrir les chefs d’œuvres du cinéma légendaire européen, du cinéma Bis et d’exploitation sous la forme de Médiabooks, Blu-ray ou DVD. En 2014, Artus Films rajoute une corde à son arc en créant Artus Livres, une collection d’ouvrages dédiés à la culture populaire et au cinéma Bis.