Les Adieux à la reine
France, Espagne : 2011
Titre original : Les Adieux à la reine
Réalisateur : Benoît Jacquot
Scénario : Benoît Jacquot
Acteurs : Léa Seydoux, Diane Kruger, Virginie Ledoyen
Distribution : Ad Vitam
Durée : 1h40
Genre : Histoire
Date de sortie : 21 mars 2012
Globale : [rating:3.5][five-star-rating]
Librement adapté du roman de Chantal Thomas du même nom, « Les adieux à la Reine » signe le retour de Benoît Jacquot à un style qu’il affectionne: l’histoire. Toujours empli de féminité et de rapport à l’autre, son nouveau film se voit comme un thriller amoureux versaillais…
Synopsis : En 1789, à l’aube de la Révolution, Versailles continue de vivre dans l’insouciance et la désinvolture, loin du tumulte qui gronde à Paris. Quand la nouvelle de la prise de la Bastille arrive à la Cour, le château se vide, nobles et serviteurs s’enfuient… Mais Sidonie Laborde, jeune lectrice entièrement dévouée à la Reine, ne veut pas croire les bruits qu’elle entend. Protégée par Marie-Antoinette, rien ne peut lui arriver. Elle ignore que ce sont les trois derniers jours qu’elle vit à ses côtés.
Un film d’histoire (et) d’amour
Benoît jacquot, (Au fond des bois, Sade, Tosca) retrouve dans ce film des sujets qui lui sont chers: l’amour, la féminité, la sensualité et l’éveil des sens. Le ton est donné, et les amateurs de la première heure ne seront pas déçus. Diane Kruger, d’habitude dans des rôles plus musclés, Virginie Ledoyen et la timide Léa Seydoux vous offrent dans « Les adieux à la Reine » une dose d’œstrogène qui vous tiendra jusqu’à la fin de l’année au moins.
Voilà enfin un film qui plaira aux hommes. Les actrices omniprésentes vous offrent gorges dévêtues et se mettent à nu dans tous les sens du terme pour faire déborder le film de sensualité. Les femmes quant à elle devront se contenter d’un gondolier certes très mignon, mais qui ne « servira » que 5 mn dans le film, avant de voir son histoire morte dans l’œuf. Dommage. D’autres personnages se voient ainsi accordé un traitement de défaveur face au triangle amoureux Kruger-Ledoyen-Seydoux. Le roi est quasi inexistant, mais qu’importe, comme son nom l’indique, ce qui nous intéresse dans le film c’est la reine. Et qui mieux en effet que Diane Kruger pouvait interpréter une reine belle, sensuelle, et une autrichienne expatriée.
Virginie Ledoyen en marquise aimée n’en est pas non plus moins sensuelle, même si malheureusement elle est beaucoup trop absente. Avec très peu de répliques, elle ferait presque un caméo alors que son personnage est primordial à cause de sa relation avec la reine. Mais heureusement, le reste laisse champs libre à la jeune et timide Léa Seydoux, habituée depuis peu à quelques escapades hollywoodiennes (MI4, Minuit à Paris). La jeune femme dans le rôle de la lectrice attitrée de Marie-Antoinette porte littéralement le film sur elle.
Elle est de tous les plans, de tous les milieux sociaux. Toute en formes généreuses et décolleté plongeant, elle nous mène aussi bien dans les appartements de la reine que dans la cuisine des domestiques. L’histoire est racontée de son point de vue, les personnages ressentis au travers de ses sens. On peut presque la trouver fade, sans grand intérêt, jusqu’au moment où l’on voit le sacrifice qu’elle est prête à faire pour sa reine. Et là, toute la philosophie de Sidonie se révèle dans la dernière scène, dans la dernière phrase prononcée presque. Jacquot nous fait alors revoir tout le film d’un œil différent, et actualise une situation comparable à des effets de mode d’aujourd’hui comme le star system. Son film devient alors intemporel, poignant et parmi les plus belles histoires d’amour filmées au cinéma.
En effet, Sidonie voue une admiration sans borne à sa reine qui la fascine. Prête à tout pour elle, jusqu’au sacrifice, elle ne se rend même plus compte de sa solitude. Tout ce qu’elle souhaite, c’est être prête de Marie-Antoinette, que celle-ci la regarde et s’intéresse à elle. Elle vit alors ces derniers jours à la cour dans le déni le plus total, persuadée que rien ne peut atteindre sa Reine. Car c’est aussi de cela que traite « Les adieux à la Reine » : de la chute d’un empire, et de l’angoisse de tout un royaume face à son avenir incertain.
Un huis clos dans Versailles
Car les « Adieux à la reine » est certes un film d’époque, mais il n’est pas un film historique. Malgré une magnifique démonstration de la vie versaillaise de l’époque dans toute sa puanteur, ses lieux magnifiques, ses rituels, ses costumes glamour, sublimes et colorés, et surtout son ostentation, le film ne se veut pas être « historique ». Les évènements de la bastille sont relayés au second plan et le rythme du film se veut lent et en douceur. Ce qui compte c’est ce que vit notre triangle amoureux pendant ces 4 derniers jours de monarchie.
Pourtant, le réalisateur s’est entouré de nombreux historiens, pour nous offrir une reconstitution extrêmement fidèle de ce qu’étais en réalité le château de Versailles en 1789. Oublié le côté glamour, le canal du château est rempli de rats et l’insalubrité transpire à chaque plan. Benoit Jacquot nous offre également un lot de rituels versaillais peu connus et chaque scène nous enseigne comment bien se comporter à la cour à cette époque. On réalise que les nobles préféraient s’entasser dans des chambres minuscules dans les caves du Château en espérant être vu 2mn par le Roi que d’aller vivre dans leurs grands châteaux respectifs. Là encore, le désir de se faire remarquer à tout prix dépasse les époques…
Surtout, le film devient petit à petit un thriller à huis clos dans les couloirs versaillais. Inédit, angoissant, et prenant, on assiste devant le film à une montée en puissance des angoisses et des sentiments quels qu’ils soient. Le réalisateur compare l’ambiance filmée aux dernières heures du Titanic avec justesse. La reine perd pied petit à petit, tout en refusant de quitter le navire. Les versaillais sont pris au piège à l’intérieur du château et voient leur fin venir sans pouvoir faire quoi que ce soit. Ils comprennent alors que leur richesse ne les sauvera pas et perdent tous leurs repères. Le huis clos devient de plus en plus oppressant au fur et à mesure des minutes, avec de moins en moins de lumière et des lieux devenant presque. La musique accompagnant le peu de paroles du film accentue ces angoisses et le malaise des personnages, à commencer par celui de Sidonie qui s’inquiète pour sa Reine.
Diane Kruger joue en effet ici un personnage complexe. Hormis le fait qu’elle interprète une reine lesbienne (pilule tout de même très difficile à avaler, même si MA était connue pour ses mœurs légères), Diane Kruger interprète surtout une femme perdue, en manque de repères, en manque d’amour et extrêmement seule. Lunatique à souhait, elle passe de la gentillesse à l’irritabilité, de l’horreur à l’amour en quelques secondes. Pourtant, les femmes et les hommes qui la fréquentent ne peuvent s’empêcher de l’aimer et de lui vouer un culte sans limite….et le film de Benoit Jacquot n’en devient qu’encore plus romantique.
Résumé
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