Le Géant égoïste
Grande-Bretagne : 2013
Titre original : The Selfish Giant
Réalisateur : Clio Barnard
Scénario : Clio Barnard
Acteurs : Conner Chapman, Shaun Thomas, Sean Gilder, Siobhan Finneran
Distribution : Pyramide Distribution
Durée : 1 h 31
Genre : Drame
Date de sortie : 18 décembre 2013
Globale : [rating:3.5][five-star-rating]
Il y a 3 ans, la réalisatrice britannique Clio Barnard s’était fait connaître avec The Arbor, un documentaire consacré à Andrea Dunbar, une dramaturge originaire de Bradford, dans le Yorkshire, film présenté et récompensé dans de nombreux festivals mais jamais sorti en salle dans notre pays. C’est dans cette même région de Bradford, dont elle est originaire, que Clio Barnard est allée tourner Le géant égoïste, son premier véritable long métrage de fiction, présenté à la Quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes 2013 et primé au Festival de Film Britannique de Dinard 2013 ainsi qu’au Festival des jeunes réalisateurs de Saint-Jean de Luz 2013.
Synopsis : Arbor, 13 ans, et son meilleur ami Swifty habitent un quartier populaire de Bradford, au Nord de l’Angleterre. Renvoyés de l’école, les deux adolescents rencontrent Kitten, un ferrailleur du coin. Ils commencent à travailler pour lui, collectant toutes sortes de métaux usagés. Kitten organise de temps à autre des courses de chevaux clandestines. Swifty éprouve une grande tendresse pour les chevaux et a un véritable don pour les diriger, ce qui n’échappe pas au ferrailleur. Arbor, en guerre contre la terre entière, se dispute les faveurs de Kitten, en lui rapportant toujours plus de métaux, au risque de se mettre en danger. L’amitié des deux garçons saura-t-elle résister au Géant Egoïste ?
Un conte transposé dans le quotidien
Depuis longtemps, Clio Barnard projetait de porter à l’écran « Le Géant égoïste », un conte écrit par Oscar Wilde et qui raconte l’histoire d’un géant qui, dans un premier temps, interdit aux enfants d’entrer dans son jardin avant de se raviser après avoir constaté que ces derniers ont besoin de ce jardin et que son jardin a besoin de ces enfants. Pour elle, cette histoire très fictionnelle rencontrait de façon évidente une réalité qu’elle avait constatée durant les 19 années qu’elle avait passées à Bradford : l’exclusion des enfants défavorisés à la fois des parcs, de la vie sociale et du monde du travail. Pour se lancer dans cette adaptation, restait une difficulté : comment intégrer le géant d‘un conte dans une histoire si proche, malheureusement, du quotidien de nombreux enfants. Petit à petit s’est imposée à elle l’idée de recourir à un ferrailleur pour incarner ce personnage, un de ces individus parfois ambigus dont on peut se demander s’ils aident les jeunes ou si, au contraire, ils les exploitent.
Deux adolescents, un ferrailleur, un cheval
Bradford : une ville industrielle du Yorkshire, proche de Leeds, une ville de ce nord de l’Angleterre que la politique menée depuis le règne de Margaret Thatcher a conduit à un déclin inexorable, avec de forts taux de chômage et beaucoup de pauvreté. Comme presque toujours dans ces cas là, on y a beaucoup perdu en matière de valeurs morales et intellectuelles, le fric étant devenu, pour des raisons de survie, la valeur la plus importante. C’est avant tout du fric que veulent gagner Arbor et Swifty, deux adolescents à problème, exclus de leur école, lorsqu’ils rentrent en contact avec « Kitten », un ferrailleur pas toujours regardant sur l’origine de ce qu’on lui apporte. Pour Arbor, le plus jeune, le fric est même le seul centre d’intérêt et il est prêt à prendre tous les risques lorsqu’il s’agit d’aller voler du métal sous quelque forme que ce soit. Swifty, lui, a une autre passion, les chevaux. Il se trouve que « Kitten » possède un cheval de trot et que des courses sur route sont régulièrement organisées dans la région de Bradford, d’où l’émergence d’un rêve chez Swifty : prendre les rênes du sulky de « Kitten » lors d’une de ces courses.
Deux jeunes acteurs bourrés de talent
Dans Le Géant égoïste, Clio Barnard s’inspire manifestement du cinéma de Ken Loach, même si elle n’a pas encore son talent lorsqu’il s’agit de glisser de courtes phases de respiration au milieu des moments les plus durs ou les plus tendus. En tout cas, elle semble avoir la même aptitude (ou la même chance) que Ken Loach pour aller pêcher des adolescents qui n’avaient jamais joué et qui s’avèrent bourrés de talent : Conner Chapman, âgé de 12 ans lors du tournage, est un Arbor très instinctif alors que Shaun Thomas, 15 ans, avait surtout pour lui, au départ, l’avantage d’être un bon cavalier. Le fait qu’il soit également un très bon comédien est apparu postérieurement, lors du tournage. Du côté des comédiens professionnels, Sean Gilder, qui joue « Kitten », et Siobhan Finneran, qui interprète la mère de Swifty, sont tous les deux très connus en Grande-Bretagne, ne serait-ce que pour leurs participations à des séries télé très populaires, dans le rôle de Paddy Maguire dans Shameless pour le premier, dans le rôle de Sarah O’Brien dans Downton Abbey pour la seconde.
Résumé
Dans son premier long métrage de fiction, Clio Barnard n’hésite pas à nous montrer une image de l’Angleterre du Nord contemporaine digne de Dickens, ce qui, malheureusement, n’est pas totalement faux. A côté de Le Géant égoïste, les films de Ken Loach, même les plus durs, font presque figures de bluettes sentimentales. Cela étant, il manque encore quelque chose à cette jeune réalisatrice pour qu’on puisse la ranger au même niveau que celui qui, manifestement, est un modèle pour elle.
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