Le marché français
En amont de la fête du cinéma, le box-office français reprend des couleurs en cette semaine 26, allant du 23 au 29 juin. Pour la deuxième fois depuis la réouverture des salles à la mi-mai, le cumul hebdomadaire dépasse la barre des deux millions de spectateurs. Ainsi, avec près de 2 156 000 tickets vendus, les exploitants peuvent envisager plutôt sereinement la saison estivale. Et mercredi dernier, premier jour de la fête qui était en cours cette année jusqu’à dimanche, leur donne raison avec ses plus d’un demi-million de spectateurs en quête d’émotions cinématographiques fortes ! De quoi parier avec un peu d’optimisme sur des chiffres plus proches des trois millions d’entrées, voire au-delà pour la semaine prochaine …
En cette dernière semaine avec jauge, le cinéma français rétrograde d’ores et déjà à la place qui est traditionnellement la sienne pendant l’été. A savoir celle d’une contre-programmation presque anecdotique face aux rouleaux compresseurs américains qui dominent les mois de juillet et d’août. La part de marché des productions françaises baisse par conséquent à 35 % sur la semaine et à 44 % sur l’année tronquée. Une tendance qui devrait se confirmer au fil des annonces des résultats du box-office d’ici la fin de l’été, malgré toutes les bonnes volontés des distributeurs, le coup de pouce cannois et de grosses sorties nationales restées sur les étagères depuis des mois.
Les films en continuation
Il n’y a pas vraiment de grands changements à signaler cette semaine au sein du classement. Avec sept films à l’affiche depuis au mieux cinq semaines – on dit adieu à Adieu les cons de Albert Dupontel, le dernier rescapé des ressorties post-confinement – face à seulement trois nouveautés, le statu quo est largement respecté. Le Top 10 a certes une nouvelle championne, mais tout porte à croire que son règne ne soit guère plus durable que celui de son prédécesseur américain.
En effet, Conjuring Sous l’emprise du diable de Michael Chaves continue sa baisse conforme aux films de son genre, l’horreur faisant souvent forte impression au démarrage avant de s’éclipser rapidement. La même chose vaut pour Sans un bruit 2 de John Krasinski qui reste même en dehors du Top 3 à trois mille entrées près et qui enregistre de surcroît la plus forte baisse dans le Top 10. Heureusement pour lui, il est en train d’effectuer un parcours sensiblement plus solide outre-Atlantique.
Au moins pour deux films, l’enthousiasme de la critique s’est traduit par des retours commerciaux assez satisfaisants. Les 2 Alfred de Bruno Podalydès décline doucement en deuxième semaine, tandis que Nomadland de Chloé Zhao fait une fois de plus figure d’exception avec sa baisse de moins de 10 %. C’est fort honorable, mais cela ne suffira sans doute pas pour atteindre le palier des 500 000 entrées en fin de carrière. Quant à Les Bouchetrous de David Silverman, il fait preuve d’un incroyable gain de popularité auprès du public familial semaine après semaine. Cette hausse hautement atypique devrait bien s’arrêter tôt ou tard. Cependant, après deux semaines vaillantes de résistance en bas du classement, le film d’animation pourrait raisonnablement terminer avec un cumul final supérieur à celui du drame social oscarisé !
Les nouveautés
Ce n’est pas qu’on en veut aux trois films ayant tant soit peu réussi leur démarrage. Mais qu’est-ce qu’on aurait aimé pouvoir évoquer ici les entrées conséquentes de titres comme Minari de Lee Isaac Cheung, Ibrahim de Samir Guesmi ou encore Gagarine de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh ! Hélas, dans la vraie vie, le public sollicite les films qu’il mérite et qui nous paraissent, cette semaine encore plus qu’à d’autres moments, infiniment plus consensuels que leur concurrence directe plus exigeante.
La recette des adaptations de classiques animés s’avère toujours aussi payante pour Disney. Avec moins de 400 000 entrées en première semaine, le démarrage de Cruella de Craig Gillespie n’est pas fulminant. Il s’inscrit par contre parfaitement dans une stratégie commerciale de marchés étrangers, susceptibles d’amortir plus facilement le coût de production d’une telle œuvre extravagante que les seules salles américaines, déjà passées à autre chose. Quoiqu’il en soit, après des retours économiques en demi-teinte de ses films précédents Battle of the Sexes de Jonathan Dayton et Valerie Faris et La Favorite de Yorgos Lanthimos, l’actrice Emma Stone y retrouve les faveurs du public, quatre ans après son Oscar pour La La Land de Damien Chazelle.
Très discrète en règle générale, l’imposante minorité portugaise en France sait se faire entendre quand elle le souhaite. Quand ce sursaut communautaire se focalise sur un film comme La Cage dorée de Ruben Alves au printemps 2013, on n’y voit aucun inconvénient. Lorsque elle porte en son cœur une comédie à première vie truffée de clichés tendancieux comme Opération Portugal de Frank Cimière, cela nous inspire tout de suite moins de sympathie lusophone. De même, le thriller d’espionnage Un espion ordinaire de Dominic Cooke avec Benedict Cumberbatch dépasse certes de justesse la barre des 100 000 entrées en première semaine, ce qui est remarquable en ces temps post-pandémiques. Cela reste pourtant loin du dernier film millionnaire porté par l’acteur de la série « Sherlock », Imitation Game de Morten Tyldum en janvier 2015.
Le classement français
Voici les principaux chiffres du Top 10 du box-office français entre le mercredi 23 et le mardi 29 juin 2021 :
- Cruella – distribué par The Walt Disney Company France – Nouveauté – 379 133 entrées cumulées – 18 % part de marché
- Conjuring Sous l’emprise du diable – distribué par Warner Bros. France – 3ème semaine / – 31 % – 280 750 entrées / 1 355 509 cumul – 13 % part de marché
- Opération Portugal – distribué par Sony Pictures Releasing France – Nouveauté – 147 706 entrées cumulées – 7 % part de marché
- Sans un bruit 2 – distribué par Paramount Pictures France – 2ème semaine / – 37 % – 144 070 entrées / 372 914 cumul – 7 % part de marché
- Un tour chez ma fille – distribué par Pathé – 2ème semaine / – 26 % – 108 672 entrées / 255 061 cumul – 5 % part de marché
6. Un homme en colère – distribué par Metropolitan Filmexport – 2ème semaine / – 29 % – 105 201 entrées / 254 226 cumul – 5 % part de marché
7. Un espion ordinaire – distribué par SND – Nouveauté – 103 555 entrées cumulées – 5 % part de marché
8. Les 2 Alfred – distribué par UGC – 2ème semaine / – 15 % – 101 604 entrées / 220 487 cumul – 5 % part de marché
9. Nomadland – distribué par The Walt Disney Company France – 3ème semaine / – 8 % – 96 352 entrées / 325 821 cumul – 4 % part de marché
10. Les Bouchetrous – distribué par SND – 5ème semaine / + 13 % – 62 709 entrées / 307 723 cumul – 3 % part de marché
Le marché américain
Le retour à la normale s’est opéré avec plus de fracas du côté des cinémas américains. Les studios hollywoodiens, Universal en tête, ont dû se frotter les mains, après le démarrage musclé de Fast and Furious 9 de Justin Lin. Toute cette joie est bien sûr relative, puisque le soi-disant record établi par le dixième film de l’univers des gros bolides ne s’applique en fait qu’aux démarrages en temps de coronavirus. Ces nouvelles aventures font tout de même mieux que le film précédent de la saga Fast and Furious Hobbs and Shaw de David Leitch, qui avait fait son premier tour de piste début août 2019 à dix millions de dollars en moins. Néanmoins, on reste assez loin des près de cent millions de dollars rapportés par Fast and Furious 8 de F. Gary Gray lors de ses trois premiers jours d’exploitation le week-end de Pâques 2017.
Ça aussi, c’est une pratique récurrente dans les salles obscures aux États-Unis : face à un mastodonte projeté sur plus de quatre mille écrans, il n’y a pratiquement rien d’autre qui sort. Sans surprise, les autres sorties restent pour le moins négligeables. A la onzième place, il y a eu l’adaptation de jeu vidéo Werewolves Within de Josh Ruben, onze rangs plus bas le film de gangster Lansky de Eytan Rockaway avec Harvey Keitel, suivi de près par le drame gay I Carry You With Me de Heidi Ewing qu’on avait pu découvrir l’année dernière au Festival de La Roche-sur-Yon. Enfin, la reprise de Le Cercle rouge de Jean-Pierre Melville obtient une très solide moyenne par copie de neuf mille dollars dans une seule salle, dépassée seulement par celle conduite par Vin Diesel et compagnie à plus de seize mille dollars par écran.
Le classement américain
Voici les principaux chiffres du Top 5 du box-office américain pour le week-end se terminant le dimanche 27 juin 2021 :
- Fast and Furious 9 – distribué par Universal Pictures – Nouveauté – 70 043 165 $ cumulés, sortie française le 14 juillet
- Sans un bruit 2 – distribué par Paramount Pictures – 5ème semaine / – 31 % – 6 193 494 $ / 136 381 860 $ cumul
- Hitman and Bodyguard 2 – distribué par Lionsgate – 2ème semaine / – 57 % – 4 851 229 $ / 25 849 915 $ cumul
- Pierre Lapin 2 – distribué par Sony Pictures Entertainment – 3ème semaine / – 21 % – 4 772 230 $ / 28 777 328 $ cumul
- Cruella – distribué par Walt Disney Studios – 5ème semaine / – 21 % – 3 805 367 $ / 71 382 602 $ cumul